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Élections italiennes, instabilité politique et victoire de l'antipolitique

Débâcle, victoire de l’antipolitique, ras-le-bol généralisé, voici donc la substance de ces élections italiennes : un article de Audrey D’Aguanno.

Correspondante du journal espagnol « El Manifiesto » en Italie, Audrey D’Aguanno analyse les dernières élections des 24 et 25 février 2013 et la montée du mouvement de Beppe Grillo.
En disqualifiant les partis traditionnels, les tenants des gouvernements technocratiques, et les économistes, les résultats obtenus par Beppe Grillo ne seraient-ils pas finalement  une victoire, pour ne pas dire une revanche, de la démocratie ? Le peuple s’est exprimé sans retenue, montrant son rejet du système. Reste maintenant à savoir quelle sera la fin de cette belle histoire.

Le vote populaire s’est traduit par un désir de « faire payer » la classe dirigeante corrompue et complice de la crise, et de chasser le technocrate Mario Monti. Ni le soutien de l’Eglise, de l’oligarchie mondialiste, de la maçonnerie, du président de la République n’auront suffi : sa politique d’austérité, qui a précipité encore plus le pays dans le chômage, la récession et la pression fiscale, n’a décidément pas séduit l’électorat…
La gauche et son Partito Democratico, qui a encaissé le maximum de voix mais avec un écart minime, sait bien qu’elle n’a pas gagné, depuis trop longtemps son absence de programme et de volonté était trop évidente.
Surprenante, en revanche, est la remontée de Silvio Berlusconi que l’on donnait pour politiquement mort ou totalement fou, étant donné le peu de cohérence de ses déclarations.
Pour ces élections, il a misé sur la séduction pure en promettant aux Italiens, étranglés par les impôts, le remboursement de certaines taxes. Peut-être aussi, le charme personnel et le savoir-faire d’un self made man – certes, un affairiste corrompu mais n’appartenant pas à la superclasse mondialiste – y auront été pour quelque chose.
Mais c’est surtout l’extraordinaire ascension du mouvement Cinque Stelle, qui devient le premier parti du pays ayant obtenu un quart des suffrages sans aucune alliance, que l’on retiendra de ce scrutin. Son chef de file, l’ancien comique Beppe Grillo, avec son talent théâtral de justicier, a promis de « faire le ménage », de « balayer » ces hommes politiques qui se gavent pendant que le peuple est au bord du gouffre. Les thèmes qu’il a abordés pendant la campagne ont joui d’un large consensus, tous bords confondus : démocratie directe, défense du service et de la « chose publique », anti-partis, boycott des médias dominants, écologie, forte critique du pouvoir des banques, tout y est. Ou presque. Car Beppe Grillo avait construit sa carrière sur un concept clé : celui de la souveraineté monétaire, véritable fondement sur lequel se tient le système actuel, véritable enjeu d’une révolution possible. Si l’argument a simplement été abandonné, Grillo promet encore le revenu de citoyenneté qui lui est lié, on se demande donc comment – s’il en avait un jour la possibilité, ce qui n’est certainement pas le cas avec quelques sièges au parlement – il pourrait mettre en œuvre son programme. Les propositions, le mode d’action, les critiques de Grillo sont admirables, mais triste est de constater qu’il n’y a pas d’authentique base idéologique derrière son mouvement.
Il n’en reste pas moins que le pays est ingouvernable ; une majorité nette et apte à prendre des décisions n’est pas sortie du chapeau. Le scénario d’un retour aux urnes sera sûrement entravé, le risque d’un triomphe du mouvement Cinque Stelle étant trop évident. Viendra alors le tour du jeu des alliances. Ou pire : un nouveau gouvernement technique sera « appelé » à la rescousse puisque ce sont avant tout les marchés qu’il faut rassurer. Car les marchés – entités surnaturelles auxquelles nous devons nous soumettre pour ne pas rester en marge du monde « civilisé » – paniquent et grondent à chaque fois que des voix s’élèvent et menacent la stabilité de ce système moisi qui semble désormais voué à sa fin.
Et alors ? Alors, force est de constater que ce vote de contestation ne servira pas à grand chose, que le vote en général ne sert à rien dans ce système de démocratie représentative qui n’est autre qu’une farce, puisque de toutes façons, les décisions sont prises ailleurs.
Audrey D’Aguanno
El Manifiesto.corr
1/03/2013
Titre original : Inestabilidad y victoria de la antipolitica Traduction par le journal
Correspondance Polémia – 8/03/2013

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