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Le déclin de Marine Le Pen (suite et fin)

Ici encore je n’aurais pas réagi, la vie d’un parti politique ne m’intéressant pas plus que cela, si l’actualité n’avait rattrapé mes propos une nouvelle fois, avec la fronde de la Moselle, le parachutage déplaisant du favori (on a parlé de la pauvre et grande Dalida, je parlerai plutôt de Cristina Kirchner) et surtout le renvoi très déplaisant de la pauvre Marie d’Herbais, que je connais depuis vingt-cinq ans, et qui accompagnait depuis plusieurs années Jean-Marie Le Pen dans son journal de bord sur le site du Front National. Cela nous permettait de savoir ce que pensait le grand homme, et de savoir aussi qu’il ne changeait pas, tout en gardant sa tête, sa vision, ses expressions. Le reste du site du parti est nul, je le dis comme je le pense, une surboum techno réactive, mais c’est peut-être mieux comme ça, je veux dire mieux adapté au nouvel électorat branché du Front qui n’est ni raciste ni anti-immigration, ni libéral ni socialiste, ni pro-syrien ni anti-américain, ni féministe ni opposé au mariage gay, ni opposé à quoi que ce soit d’ailleurs. Si, peut-être au gouvernement. Lequel ?

Le néo-frontiste, ce tiers-mondain qui a pris le contrôle du parti, ne veut plus de révolution, de programme ou de présence dans la rue, c’est simplement le quidam qui veut réagir sur BFM. Pour être sincère je rappelle l’article que j’avais écrit de passage à Paris sur la France de 2007, pays qui ne m’inspirait guère confiance avec ses nouvelles cohortes de citoyens postmodernes, frais et dispos de la génération Apple-Picard-Disney. C’est cette France qui est aux commandes maintenant y compris chez les nationalistes ! Zemmour avait prévu un combat final entre les nationaux et les gaullistes, les post-gaullistes auront noyauté les nationaux. Fermez le ban.

Je reste convaincu que le néo-frontiste qui a pris le pouvoir au Front, et avait commencé à le prendre avec l’islamophile branché Alain Soral il y a au moins dix ans, ne représente pas 20 % de son électorat. Mais c’est comme cela dans tous les partis : les derniers venus, les traîtres et les transfuges y ont toujours le dessus. Eternel triomphe du marais. Le communisme était soluble dans l’alcool, le nationalisme sera soluble dans le Canada Dry.

La dureté de la sanction qui a frappé Marie d’Herbais coupable de s’être brièvement épanché sur son Facebook, l’outil orwellien de notre temps, a en tout cas confirmé une éternelle loi : moins on a de convictions, plus on a de cruauté. On se demande à quelle sauce sera traité demain le père, et c’est pourquoi j’ai évoqué "le Roi Lear" en incipit. Pas besoin de citer Labiche comme l’avait fait Stéphane Denis en son temps. Blow, crack, rage !  On traduit, vraiment ?

Le mal vient de plus loin, en tout cas. Un petit rappel. On se souvient en tout cas qu’en 1997 le comportement de Marine Le Pen en avait déjà exaspéré plus d’un ou d’une dans son parti et que cela avait précipité la rupture qui avait failli tout emporter et sans doute limité une performance encore plus extraordinaire au printemps 2002. J’étais complètement hors du coup, n’ayant jamais milité ; je me souviens de Serge Martinez, qui avait été mon directeur à Minute, et qui brandissait la fiche de paye de Régane (ou Goneril) aux journalistes éparpillés devant le Paquebot. Ce geste amusant et désespéré annonçait sans le vouloir ce qui se passerait dans un futur proche : la prise du pouvoir d’une Régane (ou Goneril) qui allait noyer le parti de la colère du peuple dans la tiédeur du média moyen et citoyen. Sans pour autant augmenter ses scores ; parce que, je le dis et je le répète, on était quand même à plus de 20 % en l’an 2002, alors qu’on venait à peine d’entrer dans l’euro et que l’on n’avait pas l’actuel blaireau, comme on dit à Dijon, à l’Elysée. Quand on a un boulevard devant soi, on met si possible le pied sur la pédale (si j’ose dire) de l’accélérateur.

C’est Serge de Beketch qui avait flairé l’ardoise à venir, au point de risquer un affrontement ouvert dont il avait le secret. Il l’avait même mis au rang des nuisibles, la Régane (ou Goneril), parce qu’il sentait monter l’absence de pression. Les ringards, les « vieux cons », comme disait Bruno G., allaient être mis au rancart. Serge ne s’était pas gêné.

Les rares fois que j’ai croisée la patronne, cela a toujours été avant, pendant ou après une émission, de radio ou de télévision. On est un être généré médiatiquement ou pas, c’est comme ça. Une fois, je m’en souviens très bien, c’était au Paquebot, et, alors que j’avais été gentiment invité par un autre responsable pour discuter géopolitique elle était venue nous dire qu’elle partait pour faire un débat de trois heures (seulement ?) à la télé et que cela « la faisait chier ». Comme ça. Dans ce cas pourquoi y aller ? Dans ce cas pourquoi passer sa vie à la télé, et pourquoi affronter quarante fois Mélenchon que tout présentait comme le cocker de service chargé de relativiser l’alternance nationale du parti de la pensée sauvage (Baudrillard encore et toujours). J’avais senti qu’il y avait là comme une postmoderne attitude comme on dit : on gère l’héritage mais on n’a plus grand-chose à proposer. Après moi le déluge et après le déluge, moi encore.

On va me dire que c’est le cas de tous les politiques. C’est justement ça le problème en république.

La république : on n’en aura pas fini avec elle tant qu’elle n’en aura pas fini avec nous, et on a compris que le rassemblement transhumain des clones du gaullisme et des drones du souverainisme qui a pris le contrôle du FN et a éjecté les vieux cathos et profilés vieille France, sans compter tous les révoltés, n’a pas fini de nous enfumer avec une laïcité de comptoir et une technocratie de collège british. Comme dans "le Roi Lear" vu par McLuhan, on passe d’une société de rôles à une société de tâches. On a compris aussi que les joyeux bons règlements de compte à la mode 97 (le fameux pu-putsch qui avait été déjoué mais avait une certaine gueule quand même) était derrière nous, et que maintenant on ferait ses coups en douce en s’en prenant aux mères de famille nombreuse. Qu’est-ce qu’elle va dire la France qui conteste ?

- Pauvre Cordélia !

C’est promis j’arrête. Je reprends ma carte de lecteur et vais reparler de John Wayne et de Virgile, des icônes fascistes d’après Le Monde et Alexander Adler, ces gens à qui il ne faut surtout pas déplaire.

Nicolas Bonnal http://www.france-courtoise.info

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