Peut être parce que je suis initialement scientifique de formation, collant donc au fait et aux démonstrations algébrisées, je m’amuse toujours des grandes formulations ou expressions dont les baveux ont le plus souvent le monopole. Pourtant, surtout de nos jours, les néologismes ont vocation à être. A titre d’exemple, si l’union de deux hommes ne m’apparaît pas sujet à investissement majeur – ce n’est là qu’un fait très marginal (voir les résultats dans les pays où la légalisation a été adoptée) même si je reconnais qu’il est emblématique de la grande dissolution – je ne peux tolérer qu’elle soit qualifier de « mariage ». Il existe une propension certaine de nos jours à modifier la définition d’un mot – dans le cas présent « mariage » - plutôt que d’en créer un autre correspondant à la nouvelle définition.
Si j’utilise le terme d’islamo-occidentalisme, ce n’est pas le fait d’un jugement subjectif donc contestable, mais bien parce qu’il correspond aux faits. Je sais le côté oxymorique de la formulation puisque ce que l’on a l’habitude de nommer Occident n’a pas de lien historique majeur avec l’islam. On pourrait même voir l’islam sous certains aspects, comme marqueur majeur de la distinction entre l’Europe et une partie de ses voisins : les limites extérieures à l’Europe tant au Sud qu’à la partie sud de l’Est, sont musulmanes. Même si je comprends que cela puisse décevoir les païens dont une partie des arguments est parfaitement recevable, l’Europe a longtemps été chrétienne. De la Scandinavie à l’Italie, des îles britanniques à la Russie. On sera peut être surpris de me voir conjuguer le christianisme européen au passé. Là encore, je colle aux faits. C’est ainsi que les études effectuées par les sociologues des religions ont montré et montrent de plus en plus que le christianisme se meurt chez nous. A ce titre, l’élection d’un pape non européen est un signe. Le Vatican, lui aussi, a pris acte de l’effondrement, bien conscient que l’avenir du Catholicisme se situe désormais en Afrique et en Asie. Le capitalisme, bien plus que le communisme, aura métamorphosé les pensées et laminé les terroirs, y compris religieux. On pourrait mettre le compte de ce désamour sur le christianisme en lui-même et ses dirigeants, si le phénomène ne touchait pas aussi l’islam en profond recul en Afrique du nord. Ce qu’ont montré les bien mal-nommées révolutions arabes, c’est que les peuples là-bas aspirent eux aussi à bénéficier, si j’ose m’exprimer ainsi, de la société de consommation. Et là encore, c’est en Asie ainsi que dans l’Afrique sub-saharienne, que l’islam fait désormais recette.
On sait qu’aujourd’hui en France, 80% des « catholiques » votent à droite. Celle-ci fut représentée par Nicolas Sarkozy et le sera peut être encore. Il y a accord entre les deux parties sur la dénonciation de la pensée de 68 comme on l’appelle couramment. Pourtant, force est de constater que le « jouir sans entrave » est de mise dans ces milieux là. Pourquoi donc s’auto-augmenter de 140% comme l’a fait Nicolas Sarkozy si ce n’est pour, par la suite, jouir ? De la même façon, si les « catholiques » d’aujourd’hui ne se confessent plus régulièrement et fréquemment – facteur majeur de différenciation avec les protestants – c’est probablement parce que l’acte n’a rien de jouissif, bien au contraire. On peut étendre le raisonnement aussi bien à la contraception utilisée dans le cadre des couples « catholiques » qu’au refus de satisfaire aux exigences du carême, sachant les deux rappelés avec insistance par le Vatican. Il y a donc protestantisation, une forme d'américanisation en matière religieuse, des catholiques. Aussi bien les « catholiques » - presque tous – que les hommes de « droite » sont des jouisseurs… Bien mal placés donc, les uns et les autres, pour fustiger l’esprit de 68…
Le monde occidental a donc changé ces dernières décennies. Peut être parce que ce sont les Etats-Unis qui partout ont imposé leur diktat avec la collaboration des foules et des « élites ». Je me suis interrogé ces dernières semaines quant à savoir si la postmodernité que nous connaissons depuis environ quatre décennies, était rupture ou continuité vis-à-vis de la modernité. Je continue de travailler le sujet tout en considérant pour l’instant que la seconde hypothèse est la bonne.
Les liens entre la direction des affaires occidentales et l’islam ne sont pas récents. A titre d’exemple, ce sont les Usa qui ont particulièrement financé les islamistes afghans alors que ceux-ci s’opposaient aux armées soviétiques. Mais on peut remonter plus loin. Durant la guerre d’Algérie déjà, les Etats-Unis aidèrent et financèrent tout autant les réseaux anti-français, qu’ils se réclament de l’arabisme ou de l’islam(isme). De la même façon, alors que les communautés vivaient en harmonie dans l’Irak de saddam Hussein, aujourd’hui l’occidentalisation se traduit par des massacres répétés de chrétiens. Très récemment, les révolutions qualifiées bien à tort « arabes » alors qu’ils eut fallu les nommer « islamistes », ne purent voir le jour que grâce aux occidentaux. Si les Etats-Unis n’ont rien à craindre, protégés qu’ils sont par l’océan atlantique, d’une flambée d’islamisme embrasant toute l’afrique du nord, tel n’est pas notre cas, nous Européens qui sommes en première ligne. Encore une fois, les intérêts américains, non seulement ne sont pas les nôtres, mais y sont opposés.
On sait quelle est la clef de voûte anti-syrienne sur le sol syriens : les intégristes musulmans. Ceux-ci sont formés, financés et instruits par les occidentaux. On comprend dès lors le risque majeur pour nous Européens si d’aventure ils venaient à prendre le pouvoir là-bas. Les Américains considèrent, et à mon avis ils ne se trompent pas, que les islamistes sont moins gênants pour leur impérialisme, que certains pays décidés à leur barrer la route, toutes idéologies confondues (Syrie, Russie, Chine, Venezuela, Corée du nord, Iran, …). Ici sur Voxnr, il ne manque pas d’articles (1) pour montrer que les islamistes savent faire preuve de beaucoup de bonne volonté pour aider les intérêts américains. Par voie de conséquence, l’idée qu’en aidant les Etats-Unis, on freinera l’islamisme, est un leurre : bien au contraire, on parviendra à l’opposé de l’effet souhaité. On en parvient donc à la conclusion paradoxale mais nullement contradictoire que pour s’opposer à l’islamisme, il faut être anti-occidental. Cela au nom de l’Europe, celle là même qui, seule, mérite une majuscule.
Alain Rebours http://www.voxnr.com/cc/a_la_une/EFZlZkkFpkiCEvhrmU.shtml
Notes :
1) «Oui, Morsi et les Frères musulmans allaient céder 40% du Sinaï»: http://www.voxnr.com/cc/etranger/EFZlVuplAEwOyxxxWs.shtml - Les forces radicales dans l’islam servent les intérêts des Américains http://www.voxnr.com/cc/etranger/EFZyVFklkkIbIscPJK.shtml - Le wahhabisme et sa volonté de dominer le monde arabo-musulman : une menace en Méditerranée ? http://www.voxnr.com/cc/etranger/EFyluZVyFFBrkYFhMb.shtml