Le double psychodrame de Brignoles et, dans une moindre mesure, de Marseille, révèle la fracture politique croissante du pays réel avec un pays légal dont l’indifférence, voire l’autisme devant les problèmes des Français sont de plus en plus mal acceptés par les électeurs.
Car dans les deux cas, et toutes choses étant égales par ailleurs, c’est bien à une forme de rejet de l’arrogance politicienne que nous avons assisté, ce dimanche 13 octobre. En arrivant largement en tête (25,25 %) du premier tour des primaires socialistes organisées à Marseille pour les prochaines élections municipales, la sénatrice Samia Gahli a non seulement créé la surprise : ses électeurs ont surtout signifié son congé à la représentante du gouvernement, Marie-Arlette Carlotti, ministre-déléguée-aux-personnes-handicapées-et-à-la-lutte-contre-l’exclusion (ouf !), dont les Français ont appris l’existence à l’occasion de ces primaires. En préférant une candidate née à Marseille, issue de l’immigration et qui a grandi dans les « quartiers » de la ville, dont elle connaît la réalité, en plébiscitant surtout au premier tour — à l’heure où nous écrivons nous ignorons si elle transformera l’essai — celle qui en appelle à des mesures radicales (l’envoi de l’armée) dans une ville qui subit à la fois l’immigration galopante, l’insécurité et le clientélisme mafieux — peu importent les propres réseaux dont Samia Gahli est la représentante : il ne s’agit pas ici de mesurer la sincérité de la candidate —, les électeurs socialistes ont eux-mêmes fait preuve de ce populisme honni par une classe politique dont le mépris pour le peuple français n’a d’égal, aujourd’hui, que son propre aveuglement devant la colère qui gronde.
A Brignoles, c’est encore plus évident. L’élection haut la main (54%) du frontiste Laurent Lopez face à la représentante de l’UMP soutenue par la gauche est un désaveu clair et net de cette escroquerie politico-morale appelée front républicain, qui visait, depuis Mitterrand, à interdire à la droite parlementaire toute alliance avec sa propre droite quand la gauche ne s’interdit aucune alliance avec sa propre gauche. Oui, et c’est, en un sens, une bonne nouvelle, nous avons affaire à un pays légal ringard, totalement déconnecté de l’évolution de l’opinion publique et qui n’a pas encore compris que nous ne sommes plus dans les années quatre-vingt du siècle précédent, ni même en 2002, quand on faisait descendre dans la rue contre le péril brun des centaines de milliers de Français, dont de nombreux potaches intrumentalisés par les syndicats enseignants. Il n’y a pas que la parole qui se libère — nos élites le regrettent suffisamment — : le bulletin de vote, lui aussi, est de plus en plus décomplexé.
Certes les Français, si du moins on en croit les instituts de sondage, sont encore dans leur grande majorité hostiles aux solutions nationales, si bien qu’on est en droit de se demander si le pays légal ne surjoue pas sa peur quand il craint une vague bleu marine pour les municipales et les européennes. C’est que des places sont en jeu, de maires et de députés, qui représentent autant de prébendes et de privilèges... bien républicains, ceux-là. Cependant nos élites n’ont pas tort de s’inquiéter. Les signes se multiplient d’un changement d’état d’esprit avec l’inéluctable disparition de la génération de Mai-68. Oh ! rien n’est gagné, surtout que le message de ceux qui tournent le dos à quarante-cinq années d’errements et de renoncements manque encore de clarté. C’est évidemment dû à leur grande diversité, laquelle, pour le coup, est un gage de richesse : encore conviendrait-il maintenant d’assurer un lien politique — nous n’avons pas peur de ces mots— entre tous ceux qui comprennent par des voies différentes que le moment n’a jamais été aussi propice pour clore une époque. Oui, il convient de rassembler dans une même geste politique tous ceux qui perçoivent qu’il est temps de donner un coup d’arrêt aux dérives actuelles qui touchent tous les aspects de la vie du pays — social, économique ou anthropologique —, jusqu’à son indépendance, parce que ces dérives répondent à une même logique de renoncement à notre être français au profit de l’idéologie du village planétaire, laquelle repose sur une réduction consumériste de l’homme. Dans ces conditions, la « jouer perso », c’est-à-dire entretenir les divisions le plus souvent pour de médiocres questions de personne, ou en considération de ce respect humain qui n’a jamais été que le masque de la lâcheté, c’est faire le jeu de l’adversaire. Au fond d’eux-mêmes, les Français actifs, par-delà leurs légitimes sensibilités, ne demandent que l’union, qu’il s’agisse de ceux qui militent politiquement dans un mouvement national parce qu’ils sont souverainistes, nationalistes ou simplement inquiets pour leur sécurité ou leur emploi attaqués par la mondialisation, ou de ceux qui, hier, ont manifesté, parfois pour la première fois, contre le mariage pour tous, entreprennent aujourd’hui de « veiller » et manifesteront demain contre la PMA, la GPA, le gender ou l’euthanasie. Non qu’ils soient toujours les mêmes — c’est loin d’être le cas —, mais leurs préoccupations convergent vers le renversement d’un système dont la logique achève de détruire et la société et la nation.
Oui, les responsables politiques et associatifs, s’ils partagent cette bonne volonté sans laquelle rien n’est possible, doivent s’interroger sur ce qui les rassemble par-delà ce qui peut les diviser pour unifier leur résistance aux forces de destruction de notre civilisation. Car, nul ne l’ignore, c’est désormais l’enjeu. Aussi faut-il en finir autant avec les médiocres logiques de parti chez les nationaux eux-mêmes car elles mettent à mal toute idée de rassemblement, qu’avec cette pusillanimité à entrer en politique de la part de catholiques à l’optimisme impénitent — l’espoir des imbéciles, disait Bernanos — qui pensent, en bons kantiens mais en mauvais chrétiens (car la politique est une forme de charité), que la transformation politique suivra la transformation morale. Et qu’il suffit d’attendre...en perdant tout, ce qu’ils font depuis 1892 et la faillite Ralliement. Oui, il faut rompre avec cette double attitude perdante-perdante. Car le temps presse. Et les combats que la France a à mener, tant sur les fronts extérieur qu’intérieur, exigent de chacun de ses fils sincérité et abnégation.
C’est à la constitution d’un véritable rassemblement national qu’appelle l’Action française. Pour sauver l’héritage.
François Marcilhac - L’AF 2872
http://www.actionfrancaise.net/craf/?Edito-L-AF-2872-Pour-un