C’est hier que le MRAP a officiellement porté plainte, une première pour un ministre de gauche, contre Manuel Valls, coupable aux yeux de cette officine antiraciste d’obédience communiste d’avoir enfoncé une porte ouverte en déclarant que les populations Roms ont vocation à rentrer en Bulgarie et en Roumanie. Et ce, précisait le ministre de l’Intérieur, parce qu’elles «ont des modes de vie extrêmement différents des nôtres et qui sont évidemment en confrontation». Les habitants des quartiers pluriels pourraient certes en soumettre d’autres à M. Valls…
Coïncidence (?) des dates, c’était hier aussi qu’à l’ initiative des parlementaires socialistes du courant dit de La Gauche forte, était organisé dans la soirée un débat à l’Assemblée consacré aux « réponses que la gauche doit apporter face à la montée du FN», en présence de Manuel Valls et du ministre de la Justice Christiane Taubira. Ces deux là se sont embrassés chaleureusement, ostensiblement, pour manifester symboliquement l’unité du gouvernement face à l’adversité.
En fait des réponses à apporter à la montée du FN, rien n’a filtré puisque ce n’était pas tant le but de ce débat bidon que d’essayer une nouvelle fois de ressouder les rangs contre le péril frontiste, de faire peur dans les chaumières. La formule est toujours peu ou prou la même: faire croire que la République est menacée par les factieux, pratiquer l’amalgame entre l’extrême droite et le Front National.
Comme il l’avait fait lors de l’université d‘été du PS, M. Valls a attaqué nommément ses deux têtes de turcs, l’humoriste Dieudonné et l’essayiste Alain Soral –ça ne mange pas de pain- et a enchaîné les formules toutes faites, appelé la gauche « à se ressaisir face au racisme.»
« Quand on siffle le président de la République et que les sifflets viennent de l’extrême droite, il faut que la gauche se ressaisisse, il faut que les républicains s’unissent et disent ça suffit ». Autre pensée forte du ministre de l’Intérieur : la réponse face à l’extrême droite, c’est « l’efficacité » de la politique. «Vous croyez que nous n’agissons pas ensemble avec Christiane Taubira ? (…). Vous croyez que nous nous laissons impressionner par ceux qui veulent nous opposer ? ». On reste pantois devant la fulgurance et l’intelligence du propos …
Certes, dans l’enfilage de perles, Mme Taubira n ’a pas été en reste en demandant « aux voix de la France (de) couvrir » celles du racisme et en affirmant : « Nous devons rappeler que la gauche a su construire des réponses de progrès » (sic) . Formidable…
Bien sûr l’affaire du moment était la Une volontairement provocatrice de l’hebdomadaire Minute consacrée au garde des sceaux, « Maligne comme un singe Taubira retrouve la banane », dont on peut en effet ne pas goûter « la finesse » et les clins d’oeil à l’actualité récente, mais qui a déchaîné une tempête assez ahurissante. L’unanimisme des indignations n’est en fait pas tellement pour surprendre chez les mutins de panurge (dixit Philippe Murray) de la caste politico-médiatique, dont le grégarisme ne se dément pas.
Manuel Valls a affirmé que le gouvernement étudiait « les moyens d’agir contre la diffusion » de Minute ; le ministre de la Santé, Marisol Touraine, y a une « incitation à la haine raciale »; Jean-Marc Ayrault a saisi le procureur de la République de Paris en portant à sa connaissance « ces faits susceptibles de constituer l’infraction d’injure publique à caractère racial»; le premier secrétaire du Parti socialiste, Harlem Désir, a dénoncé une « ignoble Une » ; l’UEJF et SOS racisme ont annoncé des dépôts de plainte…
« Ils n’ont donc pas de limites. C’est même à ça qu’on les reconnaît. Pas une #Minute à perdre. Les nazes en cage », a affirmé Jean-Luc Mélenchon avec sa mesure légendaire dans un tweet. Le chef de file des députés PS, Bruno Le Roux a appelé la société à faire « rempart contre ces extrémismes » et au nom de l’UMP, le député filloniste Eric Ciotti a dénoncé « une dérive ».
En l’espèce, la réaction la plus maline et politique est bien celle de Christiane Taubira «qui a fait savoir qu’elle n’engagera pas d’action juridique contre Minute. Réagir d’une manière ou d’une autre, c’est faire augmenter les ventes de l’hebdomadaire de 10%, explique l’entourage de Christiane Taubira au Lab (blog d’Europe 1), se disant convaincu que l‘hebdomadaire a élaboré sa une en s’entourant des conseils d’un avocat. »
« Si des associations veulent le monter en sauce, c’est leur problème (…) Nous trouvons que c’est indécent, il y a plein d’autres problèmes dans ce pays, a réagi de son côté la porte-parole de Minute, Hélène Valette. Nous assumons cette Une, c’est satirique, personne ne s’offusque des Unes de Charlie Hebdo. »
Dont certaines furent en effet particulièrement gratinées se rappelle Bruno Gollnisch, preuves à l’appui, y compris sur le terrain du racisme (de l’humour ?) supposé. Ajoutons que tout ce beau monde préfère aussi ne pas entendre les toutes dernières critiques adressées par Dieudonné, via une vidéo diffusée sur internet, à Mme Taubira. Propos autrement plus carabinés que les formules de Minute, mais il est vrai que sa couleur de peau similaire à celle du garde des sceaux le protège ici de l’accusation de racisme.
On peut aussi difficilement reprocher à la présidente du FN comme à Bruno Gollnisch d’être racistes -« Je suis heureuse de me faire cracher dessus chaque semaine par Minute quand je vois ce que c’est devenu » a twitté hier Marine .
Jamais le FN n’a attaqué quiconque du fait de sa couleur de peau, de ses origines ethniques ou religieuses. Le FN combat l’immigration pas les immigrés, des programmes politiques, des idées qu’il juge erronés, néfastes, jamais un individu en tant que tel, sachant qu’une personne par ailleurs n’est pas entièrement réductible aux idées qu’elle professe.
Bruno Gollnisch le réaffirmait dans un entretien accordé au site La voix de la Russie que nous mettrons en ligne demain sur ce blog, « Nous ne sommes pas des racistes ou des xénophobes mais nous considérons que ceux qui viennent en France pour bénéficier de notre système social, doivent s’adapter à la culture française (…). »
« Nous aimons bien sûr la France poursuit le député européen frontiste et je ne peux pas dire que monsieur Ayrault déteste la France. Il est prisonnier d’un système mondialiste qui veut le brassage universel des individus, des marchandises et des capitaux. Ce système globaliste détruit les nations, les solidarités familiales et les particularités des peuples et, par conséquent, déracine des êtres humains. Je crois que le Front National est le meilleur défenseur de l’identité française et de tous les peuples. Nous n’avons pas l’intention de partir en guerre contre personne, nous voulons tout simplement rester maîtres chez nous. » Est-ce trop demandé ?