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Angela Merkel n'est pas Charlie et interdit l'humour satirique envers Erdogan

Un pas de plus vers le totalitarisme en Europe ? Un humoriste allemand est en train de s'en rendre compte :

"Le journaliste satirique de la chaîne de télévision publique ZDF s’est vu interdire mardi par le tribunal de grande instance d’Hambourg de déclamer à l’avenir publiquement ce poème de sa composition, lu à l’antenne le 31 mars. Seuls 6 des 24 vers ont échappé à la censure. Le poème avait eu le malheur de déplaire au président turc Recep Tayyip Erdogan, personnage principal du texte (...)

Petit retour en arrière. L’affaire Böhmermann débute mi-mars sur une autre chaîne de la télévision publique allemande, la NDR, qui dénonce en chanson la remise en cause des libertés publiques en Turquie, sous le joug du «boss du Bosphore». Ankara tonne, convoque l’ambassadeur d’Allemagne. L’affaire prend un tour politico-diplomatique inconfortable pour Angela Merkel, qui a besoin du gouvernement turc pour se dépêtrer de la crise des réfugiés.

Présentateur vedette de l’émission Neo-Magazine Royale, Jan Böhmermann est l’auteur de plusieurs coups d’éclat (...) En s’en prenant à Erdogan, Böhmermann assure clairement «vouloir tester les limites de la liberté d’expression» en Allemagne. Le risque est grand. La République fédérale possède en effet un instrument redoutable pour le polémiste : l’article 103 du code pénal, dit «de lèse-majesté», largement tombé en désuétude. Il permet à un chef d’Etat ou de gouvernement étranger de porter plainte en Allemagne contre des propos jugés injurieux à son égard. George Bush avait à plusieurs reprises tenté de faire jouer l’article 103 contre des humoristes ou polémistes allemands. En vain : l’article ne s’applique qu’aux pays assurant la réciprocité, ce qui n’est pas le cas avec Washington. Mais bien le cas avec Ankara.

Le 15 avril, Angela Merkel fait savoir que son gouvernement donnera suite à la demande de la Turquie de poursuivre au pénal l’humoriste Böhmermann, qui risque donc trois ans de prison (...) Le débat est vif en Allemagne. Angela Merkel a-t-elle sacrifié la liberté de la presse à la gestion de la crise des réfugiés, comme le lui reproche l’opposition ? Et quid de la sacro-sainte indépendance de la justice ?"

Philippe Carhon

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