Verdun, image de l’horreur de la Première guerre mondiale n’a pas la même résonance, le même poids des deux côtés du Rhin. 75% des soldats français sont passés sur ce champ de bataille qui a fait 700.000 victimes en dix mois : 163.000 Français et 143.000 Allemands tués et disparus 216.000 Français et 190.000 Allemands blessés. Pour l’Allemagne c’est la bataille de la Somme qui incarne le mieux toute l’horreur de conflit (450.000 soldats allemands y ont été tués et blessés). Ce qui est en tout cas commun à nos deux peuples, ce sont les grands symboles de la réconciliation franco-allemande: la rencontre Adenauer-De Gaulle pour la signature du traité de l’Elysée en 1963, Helmut Kohl et François Mitterrand main dans la main à Douaumont en 1984, symbole de la paix retrouvée après les boucheries des deux guerres mondiales, de la coopération, entre les deux nations phares, colonne vertébrale de la «construction européenne». Si ces images du passé, à commencer par celles des commémorations antérieures de la terrible bataille de Verdun, gardaient encore toute leur dignité dans leur simplicité bienvenue, l’épure n’est plus de mise.
La sobriété du recueillement de Mme Merkel et M. Hollande a été de courte durée. «J’avais un camarade» a vite laissé place aux membres des Tambours du Bronx (quand on parle de symbole…) courant au milieu des tombes en compagnie de jeunes Français et Allemands poursuivis par une incarnation de la Mort juchée sur des échasses, selon une scénographie confiée au cinéaste allemand Volker Schlöndorff. «Jogging au milieu des tombes», «spectacle vraiment indécent», «le repos éternel des héros piétiné au son des tam-tams», «l’honneur bafoué de nos ancêtres», «vulgarité de la gauche»… Marine Le Pen, les dirigeants et élus FN n’ont pas manqué de manifester leur indignation.
Une mise en scène qui en dit long sur la perte élémentaire de repères d’un Hollande qui a validé cette pitoyable bouffonnerie. Elle fait écho à la triste propagande européiste à laquelle il s’est livré en compagnie d’Angela Merkel, comme le craignait dimanche matin Bruno Gollnisch invité de Claude Askolovitch sur i télé. Ils ont tour à tour évoqué «l’esprit de Verdun» pour expliquer, qu’il ne saurait y avoir d’autres voies possibles que celle de l’Europe de Bruxelles.
Les deux dirigeants ne se sont pas en effet contentés de remettre au maire socialiste de Verdun, Samuel Hazard, le prix De Gaulle Adenauer, «récompensant les actions en faveur de la paix», pour le consoler de l’annulation du spectacle de Black M. Leurs communicants respectifs ont expliqué que leur déjeuner de travail à la sous-préfecture de Verdun a été l’occasion d’évoquer les préoccupations du moment : le calamiteux traité de commerce transatlantique, de libre échange avec les Etats-Unis en cours de négociation, que veut Angela Merkel mais que François Hollande refuse (pour le moment) soucieux de ne pas braquer encore un peu plus les électeurs français avant la présidentielle; le referendum du 23 juin au Royaume-Uni sur la question du Brexit; le réveil des peuples européens refusant l’euromondialisme , l’accueil des vagues de migrants. Rien qu’en Allemagne ils seront d’ici la fin de l’année 1,5 million en 2016, 2,2 millions en 2017…
La semaine dernière, dans la foulée de la présidentielle autrichienne, le commissaire européen socialiste Pierre Moscovici avait estimé « préoccupant » le niveau de résistance des Européens, du courant patriote . « Face au populisme et à l’extrême-droite, nous avons besoin d’Europe », avait-il assuré. Devant deux apparatchiks de tout premier plan, de président de la Commission européenne, le libéral Jean-Claude Juncker et de celui du Parlement européen, le socialiste Martin Schulz, Mme Merkel et M. Hollande ont rappelé qu’il était impératif, obligatoire de continuer à accueillir les migrants.
Il est vital pour la survie de l’Union européenne «de ne pas nous renfermer sur nous-mêmes, mais d’être ouverts pour l’autre», a estimé la chancelière allemande. «La France et l’Allemagne ont des responsabilités particulières» dont celle «d’accueillir les populations qui fuient les drames et les massacres» a renchéri le président de la république. Le site Polemia indiquait à ce sujet que «d’ici 2020 le gouvernement allemand prévoit de dépenser quelque 93,6 milliards d’euros , soit environ 20 milliards d’euros par an an pour l’accueil des demandeurs d’asile, rapportait samedi 14 mai 2016 l’hebdomadaire Spiegel, citant un document émanant du ministère fédéral des Finances en vue de négociations avec les seize Länder.»
De son côté, M. Hollande «a promis d’accueillir 24.000 réfugiés supplémentaires sur 2 ans». Selon les travaux de Jean-Paul Gourévitch, et «sur la base des coûts estimés par la Cour des comptes, le coût des 24.000 réfugiés peut être évalué à 324 millions d’euros sur 2 ans. -Selon l’Ofpra, 79.130 demandes d’asile ont été enregistrées en 2015. Sur une base minimale du chiffre allemand de 12.500 euros du coût d’un demandeur d’asile, J.P.Gourévitch estime le coût d’accueil de ces demandeurs à 1,3 milliard d’euros. L’auteur est convaincu que les dirigeants européens devront s’accorder sur la répartition des arrivées prévues pour 2016. Sur une base minimale de 1 million de réfugiés et selon les clefs de calcul de l’UE, la France devrait en recevoir 192.500. En supposant qu’elle parvienne à réduire ses délais d’instruction à 12 mois, le coût serait de 2,41 milliards d’euros (en fait probablement 1,5 fois plus, soit 3,6 milliards d’euros) ». Bien évidemment, mais est-il besoin de le préciser, si par par malheur un candidat de la droite pro-bruxelloise comme Alain Juppé ou un Nicolas Sarkozy était élu en 2017, la promesse d’accueil de M Hollande serait reconduite.
«Aimons notre patrie, mais protégeons notre maison commune, l’Europe» déclarait dimanche le président de la république, utilisant comme souvent une formule assez ambiguë, car s’il n‘y a pas d’amour sans désir de protéger ce que l’on aime, il eut été loisible qu’il appelle d’abord à protéger notre patrie tout en appelant en un second temps à aimer l’UE, ce qui certes ne va pas de soi! Il est en effet évident que cette Europe là , technocratique, frileuse, sans souffle, soumise à la finance internationale, au mondialisme, à l’atlantisme, n’est qu’une mauvaise caricature, voire une ennemie résolue de l’Europe réelle, du génie de ses nations, de ses valeurs, de ses identités enracinées. Leur Europe emprunte le chemin des drames à venir si elle ne change pas résolument de cap, ne se réforme pas en profondeur. Toutes choses qui ne pourront se faire que sous la pression de la volonté des peuples, de leurs aspirations à une liberté retrouvée. Voilà ce qu’il faut le dire haut et fort quand on aime sa patrie et la civilisation européenne.