Comme lors de primaires socialistes de 2007 et 2012, médias et partis politiques y sont allés de cœur pour célébrer le succès des primaires de la « droite et du centre ».
Bien peu ont dénoncé la pensée simpliste qui consiste à croire que le vote suffit à fonder la démocratie (quels grands démocrates alors que tous ces potentats élus à coup de 90% des suffrages !) alors que c’est le citoyen qui fonde la démocratie. Et qu’en conséquence, le vote ne peut être démocratique si le corps électoral n’est pas clairement défini (avec donc un « dedans » et un « dehors », ceux qui en font partie et ceux qui n’en font pas), ce que l’on a clairement vu avec ces primaires de novembre et le jeu trouble, ou pour le moins suspect, joué par les « sympathisants » de gauche et du Front national qui se sont rendus aux urnes des « Républicains » et affidés. Autre élément également peu relevé : la formidable machine à éliminer les voix dissidentes qu’est le processus des primaires, que ces voix soient à l’intérieur du parti (M. Guaino pour Les « Républicains », M. Filoche pour le parti « socialiste »), ou à l’extérieur (tout élément extérieur au parti mais sur une ligne politique supposée proche étant, au nom de « l’unité » - voire du « Front républicain » -, sommé de se taire ou de se rallier au principe des primaires, desquelles il peut très bien finalement se faire éjecter comme ce fut le cas pour M. Larrouturou). Enfin, le système des primaires suppose qu’il existerait un ensemble, plus ou moins figé, d’électeurs qui seraient irrémédiablement de « la droite et du centre ». En gros, un « peuple de droite », comme il existerait un « peuple de gauche » (personne ne semblant encore avoir l’audace de mentionner l’existence d’un « peuple du FN »). Et donc, de fait plus de « peuple français », soit une négation complète de la République (qui suppose l’unité et l’unicité des membres de la Cité) d’une part et de la démocratie d’autre part (puisque les citoyens seraient cantonnés à une posture idéologique déterminée par des apparatchiks de partis, sans y changer). Ajoutons en outre que le principe même des primaires à l’intérieur d’une même « famille » politique consiste bien davantage à désigner un individu-candidat qu’à former un programme politique collectif (sur ce point la convergence idéologique des candidats à la primaire « de la droite et du centre » était flagrante), autre déni de démocratie qui vise à interdire au citoyen la participation effective à la politique qui sera conduite pourtant en son nom.
La deuxième escroquerie consiste à présenter les primaires comme une source de légitimité et de rassemblement dès lors qu’elles déplacent quelques millions de votants. Or, avec ses 4,3 millions de votants, la primaire de « la droite et du centre » n’a déplacé même pas 10% du corps électoral (9,3% pour être précis[i]). Et si l’on prend en compte les électeurs de la « droite et du centre » - ou supposés tels – ceux-ci regroupaient au premier tour des présidentielles de 2012 (Nicolas Sarkozy, François Bayrou, Nicolas Dupont-Aignan) 13,7 millions d’électeurs. Ce qui signifie donc que la primaire de la « droite et du centre » n’a réussi à déplacer même pas un électeur « de droite et du centre » sur trois (et même pas un sur deux si l’on ne prend en compte que les suffrages recueillis par Nicolas Sarkozy). Vraiment pas de quoi pavoiser !
A suivre : la déroute annoncée de François Fillon.
[i] En prenant comme base le nombre d’inscrits à la présidentielle de 2012, ce qui ne représente pas la totalité d’un corps électoral qui en outre a cru numériquement depuis 2012.