C'est l'hiver démographique : l'Europe se suicide et, comme la nature a horreur du vide, ce sont les immigrés qui viennent remplacer la population vieillissante, selon les derniers chiffres de l'agence Eurostat :
"Le 1er janvier 2018, l'Union européenne comptait 512,6 millions d'habitants, soit 1,1 million de plus qu'un an auparavant. Ce sont les migrations qui permettent cette croissance démographique.Selon les données d'Eurostat, l'office statistique de l'Union européenne, il y a eu en moyenne davantage de décès (5,3 millions) que de naissances (5,1 millions) l'an dernier. Ce qui signifie que dans l'Union la variation naturelle de la population a été négative.
La population a augmenté dans dix-neuf États et reculé dans neuf autres. De manière générale, ce sont les pays où les naissances l'emportent sur les décès qui affichent la plus forte croissance de la population. L'Irlande est ainsi à la fois l'État où les naissances ontle plus dépassé les décès (+ 6,6‰ d'accroissement naturel) et l'un des quatre pays européens à connaître la plus forte augmentation (+ 11,2‰). À l'opposé, les faibles taux de natalité rarement compensés par des arrivées de migrants vont de pair avec les reculs démographiques. La Bulgarie, qui subit une diminution naturelle de sa population de 6,5‰, est ainsi, comme d'ailleurs plusieurs pays de l'ex-bloc soviétique (Roumanie, Lituanie, Croatie…), l'un des États enregistrant le pire recul démographique (- 7,3‰).
C'est le contraire en Allemagne. Malgré une diminution naturelle de sa population (-1,8‰), le nombre d'habitants croît de 4‰, avec l'arrivée de migrants. Quant à la France, en 11e position pour la croissance globale (+3,5‰), elle fait partie des champions de la poussette (+2,5‰ d'accroissement naturel)."
Démographe, économiste, géographe et théoricien du concept d' «hiver démographique», le professeur Gérard-François Dumont, président de la revue Population & Avenir, analyse dans Le Figaro :
"En fait, l'Europe est entrée dans l' «hiver démographique» au milieu des années 1970, lorsque la fécondité est descendue nettement et durablement au-dessous du seuil de remplacement des générations qui est de 2,1 enfants par femme. Depuis 2015, l'Union européenne est entrée dans une nouvelle étape au sein de laquelle la croissance démographique de l'Europe n'est plus assurée que par l'immigration. Toutefois cette situation n'est pas homogène: on compte encore 15 pays dont le taux de natalité est supérieur au taux de mortalité, dont la France et le Royaume-Uni, contre treize dans la situation inverse, dont l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie.
Pour expliquer ces disparités, il faut prendre en compte deux facteurs essentiels. Sur un plan politique d'abord, on observe une corrélation forte entre les budgets alloués à la politique familiale et l'indice de fécondité. Plus ces budgets sont élevés, plus l'indice de fécondité est supérieur à la moyenne de celui de l'Union européenne. Ensuite, il y a un aspect culturel important: dans les sociétés où le mariage reste un prérequis avant d'avoir des enfants, il y a généralement moins de naissances.
Quelles sont les conséquences de la baisse de la fécondité sur l'économie européenne?
Elles sont multiples et il ne faut surtout pas les sous-estimer. Cette baisse de la fécondité est d'abord à l'origine d'un moindre nombre de consommateurs au sein de l'UE et d'une moindre stimulation économique. Or, si la croissance économique européenne est si faible aujourd'hui, c'est entre autres parce qu'elle n'est pas stimulée par la consommation. Cette situation est économiquement défavorable à tous. Par exemple, les entreprises françaises qui exportent chez nos voisins de l'UE sont directement touchées par un nombre contenu de consommateurs et même une baisse dans certains d'entre eux. De plus, une diminution de la population active qui ne serait pas jugulée par une augmentation du taux d'emploi ou de la productivité des travailleurs entraînera indubitablement une baisse du PIB.
Cette situation a-t-elle aussi un impact sur notre modèle de protection social?
Bien sûr! Quand on observe le débat qui s'installe en France autour d'une nouvelle réforme des retraites, on ne peut que se désoler de ce que la question démographique, qui est fondamentale, ne soit guère abordée. On nous propose certes une nouvelle réforme structurelle de nature paramétrique, non nécessairement malvenue, mais la pérennité de notre système de retraites dépend d'abord de la population active qui le finance et donc de la situation démographique. Le principal problème du financement futur des retraites est bien que cette population active pourrait se réduire. En effet, le détricotage de la politique familiale sous le quinquennat de François Hollande a entraîné une diminution de l'indice de fécondité tandis que notre espérance de vie reste l'une des plus élevée au monde. [...]"