Dans son éditorial des échos en date du 27 décembre (« le moteur cassé du commerce mondial »), Jean-Marc Vittori pronostique que « la mondialisation ne va pas tirer la croissance ». « Les entreprises écrit-il, reviennent d’une logique de mondialisation qu’elles avaient poussée à l’extrême. Elles veulent désormais se rapprocher de leurs clients et réduire la fragilité de leurs chaînes d’approvisionnement devenues trop sensibles aux aléas climatiques ou politiques. Demain, elles voudront exploiter à plein les possibilités offertes par les nouvelles formes d’automatisation et diminuer des transports décidément trop polluants. Dans ce nouveau monde où la mondialisation ne tirera plus la croissance, les cartes vont être redistribuées. La Chine sait depuis longtemps compter sur ses propres forces. L’Amérique de Trump s’illusionne en rêvant à sa grandeur passée. L’Europe, elle, a un excédent courant colossal. Sa croissance dépend largement de ses ventes à l’étranger. Elle devra faire un énorme effort d’adaptation. Il n’est pas sûr que ses dirigeants en aient conscience. » L’Europe, ou du moins la caste européiste qui parle en son nom, a en tout cas conscience qu’elle joue son avenir : l’idéologie transfrontièriste, libre échangiste, mondialiste qui lui sert de mauvaise boussole ne fait plus recette, y compris sur le plan électoral. Une Union européenne dont la présidence tournante de son Conseil est assurée depuis le 1er janvier par la Roumanie, pour la première fois depuis son adhésion en 2007. L’Afp le rapporte factuellement, « la Roumanie a vu ses relations avec Bruxelles se détériorer fortement ces derniers mois sur fond de réformes controversées du système judiciaire initiées par le Parti social-démocrate (PSD). » Le PSD fut vainqueur des législatives de 2016 mais partage désormais le pouvoir dans le cadre d’une cohabitation ardue avec ses alliés et le président de centre droit du parti PNL, le très européiste Klaus Iohannis, membre de la très réduite minorité d’origine allemande (60 000 personnes) vivant encore en Roumanie.
Bucarest est dans la ligne de mire de l’UE pour son souhait de « faire passer rapidement un décret d’amnistie qui pourrait bénéficier aux responsables politiques ayant des démêlés avec la justice. Un tel projet marquerait le franchissement d’une ligne rouge, prévient-on de source européenne. » «Le gouvernement PSD a commencé à faire pression sur les autorités judiciaires et anticorruption roumaines d’une manière qui rappelle ses homologues en Pologne et Hongrie, deux autres pays très critiques envers le fonctionnement de l’UE, affirme le chercheur Luka Oreskovic, dans une note du think tank European Council on Foreign Relations (ECFR). » ECFR qui n’hésite pas ici à manier l’amalgame bancal…certes un procédé courant de cette influente officine mondialiste que l’on ne présente plus.
Fin décembre, les ministres Teodor Meleșcanu et George Ciamba, dans une déclaration commune mise en ligne notamment sur le site de l’ambassade de Roumanie, ont cependant fait étalage de leurs bons sentiments et de leurs bonnes disposition vis-à-vis de Bruxelles : « nous réitérons notre soutien constant pour le développement et le renforcement du projet européen. (…). Le renforcement d’une Europe plus sûre par plus de cohésion entre les pays membres représente ainsi le point de départ pour la mise en œuvre des politiques nécessaires pour gérer les nouveaux défis en matière de sécurité et pour la continuation du renforcement du rôle mondial de l’UE (…).»
Une lourde langue de bois qui n’effacera pas les propos très durs du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, rapportés dans les médias, suite à son entretien paru samedi dans le quotidien allemand die Welt: « le gouvernement de Bucarest n’a pas encore pleinement compris ce que signifie présider les pays de l’UE. L’action prudente exige aussi la volonté d’être à l’écoute des autres et la ferme volonté de mettre ses propres préoccupations au second plan. J’ai quelques doutes à ce sujet, a-t-il poursuivi. Il a également émis des réserves quant à la capacité de la Roumanie, confrontée à de vives tensions politiques nationales, à apparaître comme une unité compacte en Europe (…). Cela fait plusieurs mois, précise l’Afp, que les institutions européennes sont devenues la cible de la majorité de gauche au pouvoir en Roumanie qui n’a de cesse de dénoncer une Union inique déniant au pays le droit d’avoir ses propres opinions, selon les termes du chef du PSD, Liviu Dragnea.»
Il est néanmoins évident que le PSD, membre du Parti socialiste européen et de l’Internationale socialiste, traîne une solide et justifiée réputation de corruption. Il fut et reste d’ailleurs, via la création lors de la chute du bloc communiste en 1989 du Front de salut national, dont l’actuel PSD est issu, un parti refuge pour les cadres du Parti communiste roumain (PCR). Un PCR particulièrement malfaisant, pilier et bras armé du terrible régime Ceaucescu qui oppressa la population de ce pays de langue latine d’Europe centrale. Roumanie qui a une place à part dans le cœur de nombreux Français, une terre de haute culture, patrie d’Eliade, de Cioran, de Ionesco, de Parvulesco… et du père de notre chère Marie-Christine Arnautu ! Un communisme qui a laissé ce pays de 20 millions d’habitants totalement exsangue et qui est aujourd’hui encore un des plus pauvres d’Europe.
Pour autant, le PSD bénéficie parfois du soutien de la puissante église orthodoxe qui fit front commun avec le PSD en 2017 lors du referendum (qui mobilisa très peu les Roumains) qui rejeta le mariage homosexuel. Un PSD qui n’hésite pas à exalter la fibre nationale roumaine pour s’assurer un soutien populaire, comme le firent d’ailleurs en leur temps à des fins démagogiques le PCR et Ceaucescu, voire à développer par le biais de certains de ses dirigeants un discours chauvin, outrancier vis-à vis du voisin hongrois. Hongrie qui jouissait d’une quasi indépendance au sein de l’empire austro-hongrois et que le traité de Trianon de 1920 dépouilla des deux tiers de son territoire et priva de trois millions d’habitants. Dépeçage qui se fit largement au profit de la Roumanie qui compte une minorité magyare (hongroise) comprise entre 1,2 et deux millions d’âmes, selon les décomptes, principalement enTransylvanie et dans le pays sicule.
Sur le site eurolibertés, le journaliste Raoul Weiss, désormais persona non grata en Roumanie, très critique vis-à-vis d’une large partie de la classe politique roumaine, évoque aussi le cas de « la commissaire européenne Corina Crețu, amie personnelle de George Soros, qui maintient une porosité de l’aile gauche du PSD vers l’aile gauche du mouvement #rezist -créé au début des manifestations anticorruption en février 2017, NDLR . Une personnalité qui « aide à se faire une idée assez précise de la Roumanie qu’enfanterait un retour au pouvoir de l’ancien premier-ministre (et contre-candidat malheureux de Iohannis aux dernières présidentielles) Victor Ponta, dont le mouvement Pro România en cours de constitution se veut un PSD non-corrompu et pro-européen – voire une arrivée au pouvoir de Corina Crețu elle-même, dont certains chuchotent qu’elle pourrait être le candidat de Pro România aux présidentielles : autre masque, même système.»
L’ombre de Soros plane aussi, rapporte Sputnik, sur les institutions européennes, lequel utiliserait ses lobbies pour mieux les contrôler. Le site voit la main du milliardaire mondialiste derrière « les accusations qui visent le président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), l’espagnol Pedro Agramunt en Catalogne (où) la crise institutionnelle est instrumentalisée notamment par des ONG de défense des droits de l’Homme l‘European Stability Initiative (ESI) et l’lndependent Diplomacy. Une organisation à laquelle l’exécutif régional de Barcelone a fait appel pour internationaliser le mouvement indépendantiste catalan, (lequel ) a des intérêts politiques complètement opposés à ceux de Pedro Agramunt, membre du Parti Populaire et défenseur de la Constitution espagnole dans la crise catalane. » Bref, « Gérald Knaus, directeur de l’ESI — un lobby financé par George Soros et se présentant comme une ONG- et proche de Nicholas Whyte, un homme à la tête d’une autre organisation financée par Soros et travaillant pour les indépendantistes catalans que M. Agramunt combat, accusent le sénateur espagnol de corruption après que ce dernier ait proposé d’obliger les lobbies actifs à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe à se déclarer. »
« Sans se prononcer sur la culpabilité de Pedro Agramunt dans son affaire de corruption, conclut l’article de Sputnik, force est de constater que la thèse qu’il avance pour sa défense est solide. Les éléments de preuve qu’il a récoltés — et dont Sputnik a pu vérifier l’authenticité - laissent à penser que le sénateur espagnol a été visé tant parce qu’il cherchait à obliger les lobbys à se déclarer au Conseil de l’Europe qu’à cause de ses opinions politiques opposées à celles défendues par George Soros à travers sa myriade d’ONG et de lobbies. Est-ce pour ce type de comportement que George Soros et ses ONG ont été expulsés de Hongrie et d’Israël et que certains gouvernants, comme l’ex-Premier ministre slovaque, Robert Fico, ou l’ex-Premier ministre slovène, Miro Cerar, se sont publiquement opposés au milliardaire, juste avant de tomber?» C’est en tout cas aussi, constate Bruno Gollnisch, pour la grande latitude laissée par les instances européistes, souvent par complicité-proximité idéologique, à des officines foncièrement anti européennes (au sens noble du terme), comme celles que promeut et finance un George Soros que cette Europe bruxelloise est rejetée par les Européens.
https://gollnisch.com/2019/01/03/roumanie-et-monomanie-euromondialiste/