Extraits de l’interview de Bertrand Vergely pour Atlantico :
Depuis 2012, date où a commencé la campagne du mariage pour tous, tout a été fait pour cliver la société française en la coupant en deux, afin qu’il y ait d’un côté, l’empire du Bien, à savoir les pro-mariage pour tous et les pro-PMA et d’un autre côté l’empire du mal, les réacs avec qui il est hors de question de discuter tant ils sont nauséabonds. Qu’est-ce qui arrange les pro-mariage-pour-tous et les pro-PMA ? Que les anti-mariage pour-tous et les anti-PMA soient bêtes, primaires, homophobes, bourrés de clichés et ringards, en un mot typiquement réacs. Quand le réac est bien comme il faut, bien conforme au réac moyen, le pulvériser se fait tout seul. Un peu d’histoire pour rappeler que le modèle père-mère-enfant est une construction bourgeoise récente, le rappel des humiliations subies par les homosexuels et la répression des femmes voulant avorter et le tour est joué. Le réac est mis KO. Il est évident que s’il est contre le mariage-pour-tous et contre la PMA cela vient de ce qu’il est homophobe et misogyne. Aussi la discussion se conclut-elle par cette injonction : Qu’il se taise !
Maintenant, imaginons un second scénario. Imaginons que le réac soudain est moins bête qu’il n’y paraît, qu’il a des arguments, que les propos qu’il tient contre le mariage-pour-tous et la PMA ainsi que contre l’avortement ne sont ni homophobes ni misogynes mais soulèvent de vraies questions à propos de réelles contradictions, imaginons qu’il fasse une campagne à Paris avec des affiches posant la question de sa voir ce qu’est le progrès, si celui-ci peut exister sans respect de la paternité et de la maternité. Pour les pro-mariage-pour-tous et les pro-PMA, ce n’est pas seulement ennuyeux, c’est très ennuyeux. Il va falloir discuter. Or, on ne veut pas discuter, parce que pour discuter il faut avoir des arguments et on ne les a pas (…) Un réac crétin, ça passe. Un réac intelligent qui pose les bonnes questions, c’est embarrassant. On fait alors comme le progressisme a toujours fait : on censure (…)
Pour revenir à la gauche et à la démocratie : le progressisme adore la formule de Voltaire : « Monsieur, je ne suis pas d’accord avec vos idées, mais je me battrai pour que vous puissiez les exprimer ». Un seul problème : on n’a jamais vu les progressistes se battre pour que les réacs puissent s’exprimer. Tout comme on n’a jamais vu Voltaire se battre pour défendre les curés ou les fanatiques. La gauche est comme tout le monde : elle est hypocrite. Quand la liberté d’expression va dans son sens, elle défend la liberté d’expression. Quand elle ne va pas dans son sens, elle s’indigne en réclamant interdiction et censure (…)
La Révolution Française qui a proclamé les Droits de l’homme a été la première à les bafouer en décrétant la Terreur et en massacrant les Vendéens. Depuis, tous les régimes révolutionnaires qui s’en sont inspirées ont été des dictatures. Il importe de se poser la question : comment des mouvements politiques animés par les idées du Bien, de l’homme et de la justice peuvent-ils donner naissance à de telles contradictions. ? Il est évident que les idées du Bien, de la justice et de l’homme sont directement responsables de cette ahurissante contradiction. Quand on poursuit de tels idéaux, on est tellement persuadé d’être bon que pour parvenir au Bien on n’hésite pas à déculpabiliser le mal, à le pratiquer et à ne plus le voir une fois qu’on l’a fait. C’est ainsi : l’idéalisme du bien conduit au cynisme du mal. Il faut ajouter toutefois un deuxième élément.
Si le Bien est responsable de nos aveuglements, le politique l’est également. Pour vraiment changer l’homme et faire évoluer les mentalités, il faut changer le cœur de l’homme. Pour changer le cœur de l’homme, il n’y a qu’un moyen : rentrer dans un monastère, prier jeûner, méditer (…) Depuis le XVIème siècle, en Europe, tout ce qui s’est fait s’est fait contre le monarchisme, la vie monastique, la vie mystique et le changement intérieur. Pour changer l’homme, il a été décidé de passer par l’extérieur à travers l’économie, la politique et la culture parce que l’on a cru au confort, au pouvoir et au conditionnement des esprits par l’éducation pour y parvenir. Résultat : on assiste à ce à quoi nous assistons. Quand on veut changer le cœur des hommes sans passer par le cœur des hommes, comme c’est impossible, la seule façon d’y parvenir reste de passer en force. Ce que l’on fait. Témoin la gauche qui rêve encore de pouvoir changer le cœur de l’homme grâce au pouvoir politique et au conditionnement culturel (…)
Notre monde est mené par le désir de faire la révolution qui changera l’homme dans le plaisir. Ce rêve totalement démagogique qui fait plaisir à la foule, pense pouvoir libérer l’homme sans aucune expérience intérieure, aucune morale, aucune vie mystique. C’est cela que l’on cherche à masquer.
Les marxistes ont toujours dit que l’on parlait de religion et de morale pour ne pas parler de politique et d’économie. On a parle d’économie et de politique pour ne jais parler d’aventure intérieure et on interdit de parler de paternité et de maternité pour les mêmes raisons.