En proposant aux pays de l'UE un "dialogue stratégique" sur l'emploi de la force nucléaire française, et en envisageant d'étendre notre notion d'intérêts vitaux à nos voisins, Emmanuel Macron se comporte en petit fourrier de Washington.
Si l'idée de la constitution un jour d'une défense européenne crédible, construite à partir des armées nationales de chaque Etat, dans une vision de puissance civilisationnelle de notre continent, ne peut qu'être encouragée, elle ne peut se concevoir que dans la liberté, la volonté et l'indépendance européennes.
Tant que l'Union européenne ne sera pas autre chose que l'appendice politique, économique et militaire des États-Unis, toute extension de notre doctrine de frappe atomique serait un pas franchi vers l'acceptation du vieux rêve américain des années 50 et 60 de "force multilatérale" à peine mis au goût du jour par les nouvelles données géopolitiques.
Le "tout nucléaire" français voulu par Charles De Gaulle par son coût faramineux, son développement quasi monopolistique et l'affaiblissement dramatique de nos forces conventionnelles qu'il entraîna, fut une erreur de plus du fondateur de la Cinquième République.
Mais brader aujourd'hui au seul profit de l'Europe américaine et de l'OTAN washingtonienne le peu de positions internationales que conserve encore la France — notre arme atomique et notre siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU — serait un crime contre la Nation et l'ambition identitaire européenne.