Le Parisien nous annonçait, mercredi, qu’Emmanuel Macron parlerait à la télévision, jeudi soir. On avait même le menu, au cas où l’on aurait raté l’événement. Un menu sans surprise s’annonçait. Une sorte de réchauffé, de soupe à la grimace en cette quatrième semaine de confinement dont on ne voit pas le bout. Eh bien, non, mauvaise pioche ! L’allocution présidentielle, ce sera pour lundi prochain. Lundi de Pâques.
Et au lieu de ça, surprise ! Emmanuel Macron débarque, ce jeudi après-midi, toutes affaires cessantes, à Marseille pour rencontrer le professeur Raoult. On le voit, on le sent, on l’a compris, la guerre contre le coronavirus patauge. Cette semaine, de point quotidien en point quotidien du professeur Salomon, on a passé la barre terrible des 10.000 morts et l’on commence à se dire qu’au train où vont les choses, notre pays risque d’être le dernier pays d’Europe à sortir de cette crise sanitaire. Emmanuel Macron, lui aussi, l’a évidemment vu, senti, compris. Notre pays ne peut se permettre une guerre de position qui durerait trop longtemps : au plan sanitaire, moralement, économiquement, socialement. Politiquement non plus. Alors Emmanuel Macron tente des sorties. Des coups. Celui de Pantin, mardi, a été un fiasco. Les Français confinés, ceux qui sortent bien gentiment avec leur Ausweis tout bien rempli comme il faut, n’ont sans doute pas spécialement apprécié cette séquence de non-distanciation sociale. La pose prophétique d’un Macron, les yeux levés au ciel (en direction des balcons !), n’a pas eu l’effet salvateur qui était peut-être attendu par son équipe de communicants.
Cette sortie à Marseille, Marseille que le Président semble particulièrement apprécier (souvenons-nous de ses premières vacances présidentielles, en 2017), est d’une tout autre dimension. Le professeur Raoult, réseaux sociaux aidant, est devenu le sauveur potentiel. À raison ou à tort : qui sait ? Mais les milliers de personnes qui font la queue à Marseille y croient, ont confiance, d’autant que les résultats semblent très encourageants, si l’on en croit, notamment, les quelques politiques qui sont passés par le traitement du professeur Raoult.
La confiance pour Raoult. La défiance pour le gouvernement et, donc, pour Macron.
Dans cette guerre qui est aussi psychologique, comme toute guerre, les choses peuvent aller très vite et laisser des séquelles irréversibles au plan politique pour le pouvoir en place. On connaît ce mot de Foch : « Mon centre cède, ma droite recule, situation excellente, j’attaque. » Emmanuel Macron n’est ni Foch ni Clemenceau, mais en rendant visite au très controversé professeur Raoult, il attaque là où on ne l’attend pas, créant une surprise tactique, susceptible de redonner un peu d’espoir au moment où le moral des troupes commence à flancher. Emmanuel Macron a probablement lu le pari de Pascal et cette visite « disruptive », comme il est convenu de dire aujourd’hui, est finalement sans risque pour lui. Rien à perdre, tout à gagner, au point où en sont les choses. Emmanuel Macron a lu le pari de Pascal mais plus encore, sans doute, ce rapport, dont il est question au moment où ces lignes sont écrites, sur les résultats obtenus par le traitement Raoult sur plus de 1.000 personnes.
Par ailleurs, cette sortie médiatique pose une question qui mériterait à elle seule un papier : la santé des Français repose-t-elle sur la seule rencontre de deux hommes ?
Mais au-delà de la com’, évidemment, les Français attendent des résultats. Vite.