Au cours de l'émission C dans l'Air de ce 11 mai, c'est un constat terrible qu'a résumé l'inévitable Alain Bauer. Il répondait de façon schématique, à la question "la France était-elle prête" au déconfinement ? "Non ! Les Français, oui !, la France, non !!!"Venant d'un pareil personnage, comment ne pas constater le cruel décalage, et même l'opposition, entre le pays réel et le pays légal ?
Plus d'un siècle après les fameux 55 jours de Pékin, qui se terminèrent d'ailleurs, – au cinéma en tout cas, – par l'alliance sino-américaine contre les méchants Européens, les 55 jours de Paris, qui auront été aussi les 55 jours de Dunkerque et de Perpignan, de Brest et de Strasbourg, ont, en effet, d'ores et déjà coûté très cher.
Deux mois d'inactivité pour une partie de la France productive, deux mois de galère pour beaucoup, plus 26 000 morts dont 13 000 en provenance des maisons de retraite, plus peut-être 150 milliards d'euros que l'État devrait débourser pour compenser les pertes imposées aux entreprises et qui seront empruntées aux épargnants cela fait beaucoup. C'était sans doute en partie nécessaire, mais si nous osions faire de véritables comparaisons ce n'est peut-être pas seulement du côté de l'Allemagne ou de la Suède mais aussi avec des pays aux statuts plus modestes qu'il faut regarder, et le faire avec un peu moins de condescendance.
En Europe ce sont des pays couramment foulés au pied par nos technocrates, décriés par nos idéologues et autres socialistes qui semblent bel et bien s'en être, jusqu'ici mieux tirés. Ainsi l'Autriche ou la Grèce, ce dernier pays étant couramment décrit comme sous-administré au système d'hospitalisation publique dévasté par les coupes budgétaires qui lui ont été effectivement, et parfois injustement, imposées, etc. Notons aussi que les Pays Baltes, eux aussi réformés par les thérapies de choc tant décriées des années 1990, mais où la cohésion nationale n'est pas un vain mot semblent en mesure de nous donner des leçons.
Or... par des mesures raisonnables, sans grandiloquence inutile... son hôpital phare étant financé par une fondation privée... par la responsabilisation des citoyens... par l'appel à un véritable expert sanitaire indépendant des gros intérêts... et sous la direction d'un intelligent premier ministre conservateur... c'est le pays de l'Union européenne qui compte le moins de morts par millions d'habitants.[1]
Ajoutons au besoin, pour déplaire un peu plus au conformisme politiquement correct, que, dans ce pays aux traditions d'accueil profondes, à l'influence chrétienne millénaire, la gestion des frontières n'y est pas prise à la légère. Pressions quotidiennes de la Turquie obligent. Les Grecs peuvent dire, de ce point de vue, paradoxalement merci à l'islamiste Erdogan, à son entourage mafieux et à ses soutiens internationaux. Malheur au peuple qui ne se connaît pas d'ennemi.
Mais, nous subissons en France le discours inverse.
Bien entendu, d'abord, nous sommes toujours les meilleurs. On est les champions. Le 10 avril Éric Zemmour soulignait clairement ce travers séculaire du nombrilisme jacobin, quelques jours avant l'intervention d'Éric Ciotti du 28 avril. [2]
Le vilain polémiste Zemmour rappelle en effet : "En juin 1940, on pensait avoir la meilleure armée du monde. Aujourd’hui, on pensait avoir le meilleur système de santé du monde. On voit le résultat"[3]
Beaucoup plus grave. Si de nombreuses carences viennent précisément des héritages socialistes et technocratiques, notamment de l'étatisation généralisée de la médecine par le plan Juppé et la réforme constitutionnelle de 1996-1997, eh bien on prétend soigner le mal par le mal, et nous rajouter une couche supplémentaire d'étatisme.
Le secteur privé a-t-il fait preuve de plus d'inventivité et d'efficacité que notre haute et géniale administration dans la simple question des masques ? Ceci est dénoncé par de bons esprits comme une grave atteinte du méchant capitalisme à notre sacro-saint service public. Il est vrai que le dit prétendu service public rémunère et subvention à cet effet de nombreux rentiers de l'audiovisuel étatique chargés par Sibeth Ndiaye de nous apprendre à séparer les fameuses "fake news" (en français des bobards) par les vérités du gouvernement.
Un des discours les plus stupides, couramment entendu, consiste à faire l'éloge du prétendu merveilleux NHS anglais... totalement étatisé depuis l'après-guerre... au gré de la gratuité duquel il faut une ordonnance d'un généraliste pour consulter un spécialiste... et où il faut aussi attendre des mois pour obtenir un rendez-vous chez un généraliste. Nous allons bientôt y atteindre dans de nombreuses zones rurales, nous y sommes déjà dans certaines spécialités. Faites vous-mêmes, au besoin, l'expérience.
Imaginer de renforcer durablement l'étatisme, dans un pays où la dépense publique absorbe déjà 57 % de la richesse produite par la nation, c'est tout simplement une folie.
JG Malliarakis
Apostilles
[1] Ce [nouveau... ] "Miracle grec" n'a guère été souligné que par le quotidien Présent N° 9597 daté du 17 avril, article de Françoise Monestier
[2] que nous évoquions dans L'Insolent daté du 11 mai "Un juin 1940 sanitaire"
[3] cf. Vidéo
https://www.insolent.fr/2020/05/folies-et-contradictions-de-letatisme.html