Le 1er octobre 1957, sous la présidence de René Coty, fut guillotiné Jacques Fesch, « blouson doré » coupable d'avoir tué un policier au cours d'un braquage. Bel exemple d'ouvrier de la vingt-cinquième heure, Fesch se convertit en prison et expia son crime sur l'échafaud, dans l'Espérance. L’Église l'a, depuis, béatifié.
En un demi-siècle, beaucoup de choses ont changé. Les truands d'hier hésitaient à tirer sur les forces de l'ordre. Pour la racaille d'aujourd'hui, ce n'est pas encore banal, mais ça tend à le devenir, comme on l'a vu lors des émeutes qui ont enflammé, à la mi-juillet, le quartier de La Villeneuve à Grenoble. Les policiers engagés dans la cité y ont essuyé des tirs d'armes de guerre. Or c'est un acte de grand banditisme qui est à l’origine de cette émeute de « solidarité » Karim Boudouda, un truand qui venait de participer au braquage d'un casino, avait été tué, dans la nuit du 15 au 16 juillet, alors qu'il faisait feu sur les policiers avec un pistolet-mitrailleur Uzi…
Nicolas Sarkozy lâché par son électorat lors des dernières régionales et inquiet d'une possible montée du Front national sur sa droite, a saisi cette occasion de renouer avec le discours sécuritaire qui lui avait si bien réussi en 2007 Le 30 juillet, à Grenoble, il a déclaré que « La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un policier, d'un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique. »
À défaut de pouvoir les menacer de la guillotine, le chef de l’État brandit ainsi au nez des assassins de policiers le nouveau châtiment suprême ils seront privés de carte d'identité et peut-être aussi de dessert ? Que signifie la déchéance de la nationalité française pour ce genre d'individus, qui, depuis la suppression de la prétendue double peine par Sarkozy ne risquent même pas d'être expulsés du territoire en sortant de prison ?
Cette mesure évoquée par le président de la République ne remédiera pas à la situation dans les « quartiers », dont Xavier Raufer et un policier de la BAC dressent dans les pages qui suivent le sombre tableau. Pourquoi, d'ailleurs, comme le remarque le vice-président du Front national Bruno Gollisch, n’envisager la déchéance de nationalité que pour les assassins de policiers ? Le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux souhaiterait plus logiquement y ajouter les individus qui se rendent coupables « d'excision, de traite d'êtres humains ou d'actes de délinquance grave ».
Par ailleurs - les médias ont moins insisté sur cette autre proposition du président de la République - Nicolas Sarkozy voudrait que « l'acquisition de la nationalité française par un mineur délinquant ne soit plus automatique au moment de sa majorité ». Le Monde a accusé le chef de l’État de remettre en cause le droit du sol et « l'un des principes fondateurs de la loi de 1998 sur la nationalité » le fait que les enfants d'immigrés nés en France deviennent automatiquement français à 18 ans.
Réviser le code de la nationalité dans l'intérêt des immigrés
À la bonne heure ! Il est plus que temps, en effet, que les règles d'acquisition de notre nationalité soient révisées, comme le demande depuis longtemps le Front national et comme le souhaitent également des voix de plus en plus nombreuses au sein de la droite classique. Quoi qu'en disent les sempiternelles associations gauchistes qui font profession d'antiracisme, il en va de l'intérêt des immigrés eux-mêmes. À l'heure actuelle, les enfants de l'immigration - ceux qui vont « au bled » en pleurant et s'y font cracher dessus parce que, là-bas, on n'aime pas les voyous, puis qui, rentrant en France, se réclament de l'Algérie ou du Maroc - ne se sentent de nulle part. Pour qu'ils cessent d'être des apatrides de fait nantis d'une nationalité de papier, il faut qu'ils choisissent cette nationalité et qu'elle ait de la valeur à leurs yeux. Or il n'est pas nécessaire d'avoir fait de grandes études pour savoir que ce qui est gratuit n'a pas de valeur. Il faut rendre toute sa valeur à la nationalité française, en cessant de l’octroyer automatiquement et en y attachant des droits particuliers. Nicolas Sarkozy tient un double langage lorsqu'il déplore l’échec de l'intégration d'un côté et fait de l'autre appliquer la préférence étrangère, sous le vocable de discrimination positive. Avant 1998, les enfants nés en France de parents étrangers devaient déposer une demande pour obtenir la nationalité française. Rien n'interdit d'en revenir à cette règle, en conditionnant l’octroi de la qualité de français à un comportement honnête et à l'appropriation par les demandeurs des éléments fondamentaux de notre civilisation.
Il n'y a là ni racisme, ni xénophobie, car les immigrés honnêtes, victimes à la fois des délinquants et de l'amalgame qui est fait par le reste de la population entre délinquance et immigration, souffrent parmi les premiers de la criminalité dans les quartiers. Pour accueillir ses hôtes le mieux possible, la France doit se donner les moyens d'éradiquer cette criminalité. C'est également un acte de justice à l’égard des plus pauvres des Français d'origine, qui n’ont pas les moyens de s'installer ailleurs et en viennent, par une assimilation inversée, à être déracinés dans leur propre pays, perdant ainsi la part du patrimoine collectif qui leur revient par héritage et qui constitue leur principale richesse.
Le remède ne sera sans doute pas suffisant pour éradiquer le mal mais ce peut être un début. Le chef de l’État a, pour la première fois, explicitement lié l'état des banlieues aux « cinquante années d'immigration insuffisamment régulée qui ont abouti à un échec de l'intégration ». C'est une évidence qu'il n'est pas politiquement correct de souligner. Les voyous qui tirent contre les policiers veulent avant tout protéger leurs trafics, mais les tirs sur les policiers ont aussi une signification symbolique, en ce qu'ils traduisent le rejet de la loi française, de l’État français et, au-delà, de l'héritage français. On en revient ainsi à la question de l'identité, sur laquelle le gouvernement n'a ni su, ni voulu engager un vrai débat.
Eric Letty monde&vie 28 août 2010 n°831