Le Président Emmanuel Macron commémorait, dimanche, devant les caméras, les dix ans des attentats perpétrés par Mohammed Merah à Toulouse. Pourtant, paradoxalement, les thèmes du terrorisme, de la sécurité ou de l’immigration ont disparu de sa campagne.
La gauche a longtemps fait grief à la droite de surexploiter ces sujets. Et pourtant, quand on interroge nos compatriotes sur leurs premières préoccupations, celles qui influenceront leur vote, ils affichent le trio immigration-sécurité-terrorisme juste après le pouvoir d’achat et la santé. Ces trois thématiques fortes ont été le moteur du Front puis du Rassemblement national de Marine Le Pen. Elles ont été reprises avec un élan inédit par Éric Zemmour. Les responsables LR en ont fait le marqueur le plus visible de leurs primaires, la gauche l’a assez reproché aux concurrents de Valérie Pécresse. Nicolas Dupont-Aignan en a fait un axe central. Ces trois thèmes sont le trait d’union programmatique de la droite. Mais voilà, entre une droite volontiers sécuritaire et une gauche qui écarte le sujet du revers de la main, Emmanuel Macron a trouvé sa petite musique - et c’est une musique… silencieuse. Pas un mot sur l’immigration, la sécurité et le terrorisme islamiste dans sa Lettre aux Français publiée le 3 mars dernier pour annoncer sa candidature. Presque rien dans ses déclarations. Le président de la République a attendu la toute fin de la longue présentation de son programme – plus de 4 heures ! -, ce 17 mars, pour aborder ces sujets pourtant majeurs pour la France et les Français en quelques mots seulement : il propose la création de brigades de gendarmerie, le renforcement de la sécurité intérieure, il veut « que le refus d'asile oblige les immigrés à quitter le territoire français » et que les titres de séjour de longue durée soient conditionnés à un examen de français et à un emploi. Autant de mesures reprises aux programmes de ses opposants qui laisseront une partie des Français sceptiques.
Pourquoi avoir attendu si longtemps pour lancer ces propositions que le Président Macron aurait pu assumer avant le candidat Macron ? Parce que ce sont des marqueurs de droite et que Macron a besoin de séduire aussi sur sa gauche, il n’y a pas renoncé. Ensuite et surtout, sur cette question de la sécurité et de l’immigration, le bilan d’Emmanuel Macron est tout simplement désastreux. Selon l’Observatoire de l’immigration qui se base sur les chiffres du ministère de l’Intérieur – les derniers chiffres sont encore des estimations -, le mandat d’Emmanuel Macron a toutes les chances de battre le record historique du nombre de premiers titres de séjour octroyés en France métropolitaine, avec 255.000 entrées par an. Si ces chiffres se confirment, Macron aura fait pire que Hollande, qui lui-même avait fait pire que Sarkozy, alors même que les chiffres d’entrées de l’année 2020 ont été très bas à cause du Covid. Quant à la sécurité, selon un sondage Fiducial Odoxa pour Le Figaro, 62 % des Français jugent mauvais le bilan sécuritaire de Macron et trois Français sur quatre sont mécontents de lui sur la lutte contre la délinquance.
Résultat : le candidat Macron fourre ces sujets sous le tapis, un peu à l’image de la gauche. Le thème est absent des discours de Jean-Luc Mélenchon, de Yannick Jadot, d’Anne Hidalgo, de Fabien Roussel ou de Philippe Poutou. Si Emmanuel Macron a attendu le dernier moment pour se présenter, s’il a évité tout débat avec ses opposants, s’il a cherché à contrôler les questions que lui posaient les Français à Poissy, c’est notamment pour échapper à ce bilan. L’Ukraine est venue couvrir d’un voile dramatique ces thèmes majeurs qui n’ont pourtant pas disparu. Ils risquent de revenir avec d’autant plus de violence dans les années à venir.
Marc Baudriller