Notons que cette proposition est une « vieille lune » de la gauche. Mais pas que. Ainsi, le 14 février 2018, Jean-Christophe Lagarde, qui était alors député UDI de Seine-Saint-Denis, avait déposé une proposition de loi qui visait à accorder le droit de vote et d’éligibilité aux citoyens européens résidant en France pour toutes les élections, à l’exception du mandat de président de la République. L’affaire n’avait pas prospéré, comme on dit, mais qu’un député de la nation ait osé déposer une telle proposition de loi balayant le principe fondamental de la souveraineté du peuple français en dit long sur le travail de sape mené par certains élus pour détruire les fondations de notre République (au sens romain de la chose publique).
La proposition de Sacha Houlié est du même tonneau. Elle est moins révolutionnaire, plus « classique », plus processionnelle que celle de Lagarde, mais elle relève de la même idéologie : au fond, il n’y a d’avenir que pour la citoyenneté mondiale, la citoyenneté européenne étant une étape intermédiaire, la citoyenneté française avec son corpus de droits et de devoirs étant désuète. « Désuète », c’est d’ailleurs l’adjectif employé par Houlié pour qualifier la distinction qui existe aujourd’hui entre les ressortissants des États membres de l’Union européenne, qui ont le droit de vote aux élections municipales, et ceux des États tiers, qui n’ont pas ce droit. Il est évident que si cette proposition de loi était votée, ce ne serait qu’une étape. Avec les mêmes arguments (vie locale, « vivre ensemble », contribution aux impôts et taxes, bons sentiments...), viendrait ensuite la proposition de loi visant à accorder le droit de vote et donner l’éligibilité aux étrangers pour les élections départementales, puis régionales, et ce, avec la même efficacité redoutable que la roue à cliquet utilisée depuis deux décennies pour les lois sociétales. Et si les étrangers résidant sur le territoire national ont un jour les mêmes droits que les citoyens français, alors il n’y aura plus que des citoyens tout court, c’est-à-dire, à terme, des citoyens du monde.
Notre Constitution pose comme principe que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum ». Le peuple, c’est le peuple français, pas un conglomérat de « résidants ». Il est curieux, du reste, de voir comment la Macronie, qu’elle soit « de gauche » (comme Houlié), de « droite » ou d’ailleurs, s’attache à détricoter à la fois notre souveraineté et notre citoyenneté qui sont consubstantielles. Une souveraineté qui ne se conçoit plus qu’à travers l’Union européenne pour Emmanuel Macron. Une citoyenneté qu’il faudrait redéfinir « avec des devoirs qui passent avant les droits », pour un Gabriel Attal. Une citoyenneté conçue comme un simple « outil pédagogique », pour un Sacha Houlié.
Georges Michel