Or cette crise ne sera malheureusement pas la seule du genre. Emmanuel Macron est tellement doué qu'il nous en a préparé quelques autres. Celle qui commence à pointer le bout de son nez en ce début 2023, c'est l'interdiction de louer des logements énergivores. Au commencement, il y a toujours une bonne intention (de la bonne idéologie) : économiser l'énergie, apporter du confort au locataire. Mais tout se gâte quand nos énarques oublient de regarder l'ensemble des conséquences d'une décision et négligent ses conditions d'application selon le contexte. Donc le décret n° 2021-19 du 11 janvier 2021 issu de la loi relative à l’énergie et au climat de 2019 interdit la location des logements énergivores : les G+ (plus de 450 KWH/m2/an) du diagnostic de performance énergétique dès ce 1er janvier 2023 ; les G (plus de 420 KWH) au 1er janvier 2025 ; les F en 2028 et les E en 2034.
Ce décret anodin est potentiellement explosif. En effet, ce sont des centaines de milliers de logements qui sont concernés. Le journal 20 minutes révèle une enquête de l'IPR (Institut Paris Région) chiffrant à 50 % des logements de toute la région Île-de-France la part des passoires thermiques : « En arrondissant, on a 27 % d’habitats classés E, 13 % de F et 11 % de G, selon la démographe Sandrine Beaufils citée par le journal. Et dans une région en tension comme l’Île-de-France, retirer dans deux ans 10 % du parc immobilier, ce n’est pas négligeable. »
C'est là le premier problème : l'accroissement de la pénurie de biens à louer et donc une nouvelle envolée des prix à prévoir. Crise du locatif donc, aggravée par l'envolée des taux des crédits qui ramène vers le locatif des particuliers qui auraient pu devenir propriétaires. Mais pour les propriétaires, ce sera aussi la catastrophe : ils auront le choix entre la vente d'un bien dévalorisé ou des travaux conséquents et onéreux. Le Monde a posé la question : que vont devenir ces logements ? Si l'on ajoute à cela le retournement du marché immobilier amorcé en 2022, déjà bien sensible en région parisienne, ces propriétaires seront les grands perdants. Sans compter l'incapacité des entreprises à assumer cette masse de travaux et l'envolée des prix de la rénovation énergétique. Et rappelons que cette crise organisée de toutes pièces par nos gouvernants va toucher des millions d'entre nous, puisque, toujours selon Sandrine Beaufils, il y a environ 560.000 logements classés G en Île-de-France. Je vous laisse ajouter les E, les F, et ceux de la France entière...
Les acteurs de terrain tirent la sonnette d'alarme depuis des mois, comme Olivier Princivalle, président de la FNAIM de Paris, cité par 20 minutes : « Il n’y a pas de facteurs positifs qui laissent penser que ce sera faisable ». Déjà, des copropriétés ont renoncé à allumer leur chauffage avec l'envolée des prix du gaz, comme à Toulouse, ou à Nice. Alors, si s'ajoute à une situation déjà tendue le coût de la rénovation énergétique des logements, les réunions de copropriétés vont vite devenir des foyers révolutionnaires. Et, face à la colère, les syndics auront de bonnes raisons, eux, de faire comme Macron : c'est pas nous, c'est lui. Sur ce sujet là aussi, il est urgent qu'il revoie sa copie.
Frédéric Sirgant