Par rapport à ce que décrit cet article et la vraie question qu’il pose : à savoir si les pays d’accueil vont livrer au recrutement forcé leurs réfugiés ? Cela semble concerner plus précisément ceux dont les gouvernements ne masquent pas leur volonté d’entrer en guerre, comme les pays baltes et la Pologne. Si pour le moment, on considère l’accueil des réfugiés ukrainiens en France, non pas ceux dont une vidéo récemment racontait les agapes à Courchevel ou dans les belles villas de la côte d’Azur (ceux-là risquent d’avoir longtemps un traitement de faveur) mais ceux que je vois à Marseille : personne n’a encore fait le lien entre ces « patriotes et leur volonté de fuir les combats », le maire Payen, qui manifeste un enthousiasme en faveur de l’engagement français, poursuit sa prodigalité, la nôtre avec nos impôts. Après les avoir accueillis dans un navire de croisière, ils sont désormais dans des hôtels et bénéficient d’un traitement de faveur par rapport aux autres migrants, 40 euros par personne et par jour, logés et ayant à leur disposition un centre spécial à Velten où tous les jours un traiteur livre des repas de qualité, et où à l’inverse des SDF dont la ville regorge, ils sont accueillis par un personnel dévolu à leur seul usage. Ce sont pour la plupart des gens jeunes, il y a des enfants, des femmes mais beaucoup d’hommes en âge de faire l’armée et dont la police se plaint comme des individus ingérables. Mais effectivement si la guerre par procuration s’accélère est-ce que l’idée viendra de joindre au matériel létal cette chair à canon pour le moment à l’abri, ce que je ne saurais regretter, seulement qu’ils soient les seuls à être considérés comme des êtres humains alors que s’entassent dans des conditions inhumaines des réfugiés provenant de pays dans lesquels nos armées sont directement impliquées.
Danielle Bleitrach
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L’Europe sera heureuse de se débarrasser des réfugiés d’Ukraine
par Ludmila Nikolaeva
L’UE aidera Kiev à ramener chez eux les hommes ukrainiens soumis à la mobilisation – ceux qui ne voulant pas rejoindre l’AFU y ont trouvé un asile. Du moins ils le croyaient. Après tout, tous ceux qui sont arrivés au début de la SVO se sont vu promettre le statut de réfugié, et avec lui une assistance complète, y compris la sécurité.
Mais, comme il s’avère maintenant, les gars avaient tort. L’Occident s’intéresse peu, voire pas du tout, à leur sort. Et lorsque, l’autre jour, la demande de M. Zelensky de reconstituer les rangs de l’armée, gravement diminués, avec des réfugiés âgés de 18 à 60 ans a été rendue publique, l’Union européenne s’est empressée de répondre positivement.
Comme d’habitude, les sœurs baltes ont été les premières à réagir. Et pratiquement en même temps. Comme si elles attendaient cette demande. Ou peut-être ont-elles elles-mêmes suggéré cette décision « originale » au clown, qui joue le rôle de président ? L’ancien ministre de la justice, actuellement maire de la ville lituanienne de Vilnius, Remigijus Šimashyus, a publiquement exprimé sa volonté « d’aider la partie ukrainienne à rechercher et à restituer les conscrits militaires ukrainiens ». Et le chef du Liepaja letton, Gunars Ansins, est allé encore plus loin, promettant « une assistance complète pour le retour des hommes ukrainiens dans leur patrie » pour « accomplir leur devoir militaire ».
Ce n’est pas le premier appel à la mobilisation de l’Ukraine auprès de l’UE pendant l’opération militaire spéciale russe. La première a eu lieu en juin de l’année dernière. Cependant, les responsables de Zelensky ont ensuite mis le holà. Ils attendaient une percée en faveur du régime de Kiev dans le Donbass, affirmant que les forces armées ukrainiennes pouvaient faire face avec leurs forces existantes. Au lieu de cela, ils ont reçu une série d’opérations réussies de notre côté, y compris à Artiomovsk, où, selon les médias allemands, les combattants autoproclamés « ont subi des pertes énormes ». Le bilan quotidien des ukro-guerriers s’éleve à des dizaines de centaines de morts. Et le pays malheureux a été frappé par une nouvelle vague de mobilisation à l’approche de l’hiver.
D’abord en Ukraine même. On trouve sur les médias sociaux de nombreuses vidéos d’hommes détenus dans les rues des villes et des campagnes, sur les lieux de travail, dans les cafés et les immeubles d’habitation. Parfois, on les attrape (c’est vrai !) complètement au hasard.
Un tel cas est arrivé à une femme de Kiev, Lyubov Sh. Plus précisément, à son mari de 63 ans. Cette histoire a été racontée à « SP » par Lyuba elle-même lorsque je lui ai souhaité, à elle et son mari, un joyeux Noël (orthodoxe). Son mari Shurik a subi deux micro-accidents vasculaires en peu de temps il y a trois ans, dont il ne s’est toujours pas remis.
– On attrape maintenant tous les hommes de notre pays, quel que soit leur âge. Le principe est le suivant : « donnez-nous un homme, et nous nous débrouillerons », soupire Lubov, autrefois une ukrainienne espiègle et rieuse. – Ils sont venus chez nous tard dans la soirée, fin décembre. Ils n’ont pas sonné à la porte, mais frappé dessus avec leurs pieds et la crosse des fusils. Ils ont vu Shurik assis sur le lit en pyjama, l’ont pris sous les bras et l’ont traîné vers la sortie. J’en ai attrapé un par la ceintures et j’ai crié : où l’emmenez-vous ? C’est un invalide ! Et mon Shurka ne peut rien dire de clair, il secoue juste la tête. Finalement, à force de leur crier dessus… J’ai récupéré mon mari. Mais combien de « volontaires », y compris des gens en mauvaise santé, n’ont pas pu échapper… ?
Peu avant la nouvelle année, l’ONU a publié des données sur le nombre de réfugiés ukrainiens en Europe. Au cours de la période du 24 février au 4 octobre 2022 – plus de 4,7 millions de personnes. Le plus grand nombre se trouve en Pologne – 1 422 482. En Allemagne – 997 895. En République tchèque – 442 443. Viennent ensuite, par ordre décroissant, l’Italie, l’Espagne, la Turquie, la Bulgarie, le Royaume-Uni et la France. Les personnes qui ont fui vers ces pays y sont enregistrées dans le cadre de programmes nationaux de protection et d’assistance.
Mais cela n’empêche pas les autorités locales de les traiter comme des personnes de « troisième classe ». En Bulgarie, ils ont d’abord été hébergés dans des pensions de famille et des camps de vacances pour enfants, mais peu de temps après, ils ont été déplacés dans des conteneurs et des casernes à l’apparence douteuse. Leurs allocations ont été réduites. Ils ont été privés d’aide humanitaire.
En Espagne, les citoyens ukrainiens (125 000 personnes) se sont retrouvés au bord de la famine. Selon L’Indépendant, les bas salaires et le coût élevé de la vie sont en cause. Depuis le mois d’août, les réfugiés rentrent d’Espagne. En France, il existe de véritables complots contre leurs compatriotes, ce qui les oblige à changer sans cesse de lieu de résidence. En Pologne, depuis plusieurs mois, on se débarrasse des Ukrainiens qui ont trouvé un emploi dans le pays, sous prétexte qu’il n’y a « déjà pas de travail pour les Polonais »…
Que va-t-il se passer maintenant, après que Zelensky et son cabinet aient demandé à capturer (littéralement) leurs conscrits ? Comment et qui effectuera cette « chasse à l’homme » ? Pourront-ils se cacher et où ? L’analyste politique Sergei Markov estime que dans un premier temps, les citoyens ukrainiens seront invités à contacter les autorités et à se présenter volontairement aux bureaux d’enregistrement et d’enrôlement militaires. S’ils désobéissent, les mesures seront renforcées. Il peut s’agir d’une détention par la police, puis d’une conduite à la frontière et d’une remise aux représentants ukrainiens. Quant à la légalité de ces actions, cette légalité « est en voie de demi-décomposition, car elle est corrompue par les groupes de pouvoir ».
Un autre éminent politologue, Oleksiy Anpilogov, originaire de Dnipropetrovsk, l’un des leaders de la résistance dans cette ville en 2013/2014 et aujourd’hui président du Fond pour le soutien de la recherche scientifique et le développement des initiatives civiles « Fondations », a son propre avis.
Il est absolument clair que la décision conçue par Zelensky et soutenue par l’UE d’expulser vers l’Ukraine des réfugiés ukrainiens en âge de conscription pour les envoyer sur la ligne de front est illégale et cruelle, nous a-t-il commenté. – Bruxelles aime proclamer la liberté d’expression, la liberté de choix, la liberté de mouvement des citoyens, y compris de ceux qui leur ont demandé de l’aide – et eux-mêmes piétinent ouvertement cette liberté. Non seulement ils ne sont pas horrifiés, mais ils ne sont même pas surpris par la demande de Kiev. Jusqu’à présent, il s’agit d’hommes. Mais je suis sûr qu’il y aura des femmes aussi.
SP : Voulez-vous dire que les politiciens européens étaient préparés à une telle tournure des événements ?
– Ils sont très doués pour « décoder » la situation. Et, de plus, « de l’autre côté », qui nous est aujourd’hui hostile, ils sont visiblement fatigués des Ukrainiens. Il y en a trop. En conséquence, il y a trop de dépenses budgétaires pour les aider. L’ardeur des deux ou trois premiers mois s’est évaporée au milieu de l’été. Le mercantilisme est arrivé en tête. L’initiative de l’ex-artiste dans le fauteuil présidentiel est très opportune. Sous le couvert de – le croiriez-vous ! – établir une vie paisible en Ukraine et le besoin de main-d’œuvre pour reconstruire les régions.
SP : Et l’UE l’a-t-elle cru ?
– Non, bien sûr que non. Tout le monde comprend très bien qu’il faut de la « chair à canon » pour le front. Autant que possible, et aussi vite que possible. Il n’y a presque plus de volontaires. Les mercenaires ne veulent pas prendre de risques … Nous devons reconnaître le mérite de Zelensky : il a trouvé des politiciens duplicites et corrompus parmi les fonctionnaires de l’UE, qui sont prêts à tout ce qui peut contribuer à leur bien-être personnel. Ils seront, vous pouvez en être sûrs, zélés dans leur recherche de conscrits potentiels.
« SP : – Certains réfugiés peuvent aussi résister à la coercition, s’organiser, y compris en groupes paramilitaires, “montrer les dents »…
– C’est peu probable. Ils ne deviendront pas des guérilleros. Dans un environnement étranger, sans connaître la langue locale, sans connaître les lois, sans pouvoir utiliser les services d’un avocat par manque d’argent, que peuvent-ils faire ? D’autant plus que dans l’UE, leur présence est déjà assez mal supportée. La seule solution est de fuir à travers l’océan vers le Mexique, par exemple. Ou en Turquie. Ou en Russie, le seul pays du continent européen où les réfugiés bénéficient du statut le plus libéral. Avec la possibilité d’obtenir la citoyenneté assez rapidement. Je le sais de par ma propre expérience.
SP : – Que gagne la Russie dans cette histoire avec la capture de potentiels combattants ukrainiens ?
– Tout d’abord, il s’agit d’un avantage moral, qui témoigne du respect des personnes, y compris des citoyens ukrainiens. Son image à leurs yeux grandira. Et celle des européens ? Elle est déjà compromise. Ils scient la branche sur laquelle ils sont assis.
source : SV Pressa
traduction de Marianne Dunlop pour Histoire et Société