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Christian Rol, de retour de Russie : « La propagande atlantiste a définitivement englouti l’Europe de l’Ouest depuis la chute du Mur de Berlin » [Interview]

C’est un message aperçu sur les réseaux sociaux et signé Christian Rol (voir sa bibliographie sur Babelio ici) qui nous a mis la puce à l’oreille : ce dernier, de retour d’un séjour en Russie, à Moscou plus précisément – il n a pas pu aller dans le Donbass – racontait ce qu’il avait vu là bas mais surtout le fruit de ses échanges avec la population et ses amis sur place. Un récit bien différent de celui que l’on peut entendre dans la presse occidentale, et qu’il est nécessaire de présenter également ici aussi. Entretien.

Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Christian Rol :  Je suis écrivain, un écrivain dont on ne parle pas des livres, ou alors pour en dire du mal. J’ai été un peu journaliste mais pas trop puisque, à moins d’être relégué dans des feuilles confidentielles, on ne peut pas exercer ce métier décemment en France où le formatage et la soumission sont les conditions préalables au journalisme. Depuis plus de trente ans, de manière très dilettante, je suis partout en Europe où la tectonique de la géopolitique se produit. J’étais sur le Mur de Berlin, j’ai participé à la Révolution roumaine, j’étais sur le front en Croatie, sous les bombes de l’Otan en Serbie…

Breizh-info.com : Vous indiquez sur les réseaux sociaux rentrer de Moscou. Comment êtes vous parvenu à vous y rendre malgré les blocus en cours ?

Christian Rol : Je rentre en effet de Moscou où j’ai passé deux semaines environ. J’ai tout simplement demandé un visa qu’on m’a accordé et j’ai pris l’avion en passant par Belgrade. D’ailleurs, depuis que je suis rentré de Moscou, tout le monde se demande comment j’ai pu faire pour y aller. Je ne me suis pas posé cette question avant qu’on ne me le demande mais maintenant, je m’aperçois que j’ai probablement bénéficié des relations excellentes dont je dispose avec certaines personnes influentes en Russie.

Breizh-info.com : Avant de vous rendre sur place, quel regard portiez vous sur cette guerre fratricide, sur cette boucherie en plein coeur de l’Europe ?

Christian Rol : Le regard que je porte sur cette guerre est celui de quelqu’un qui avait tout vu dès 1999 lorsque j’étais à Belgrade bombardée par les avions français et US. A ce moment là, j’ai compris que les apprentis sorciers de la Mondialisation ne se contenteraient pas des Balkans et préparaient, sur le temps long, les prophéties de Brejinski et son “Grand Echiquier”.

J’ai tiré de cette expérience un roman il y a plus de dix ans où je prête à l’un de mes personnage la phrase de mémoire “Ils s’empareront de la pauvre riche Russie. Ils attiseront les nationalisme et les religions. Poutine ou un autre, ils en feront un fasciste, un fou sanguinaire aux yeux du monde. Vous verrez, ils le niqueront comme Sadham ou Milosevic. Pas de front bien sûr, mais à l’usure… Question de temps.” (French Cancans, edition Scali)

En ce qui me concerne, je pense, contrairement aux Slaves, que ces milliers de morts des deux côtés ne sont pas une fatalité mais une catastrophe, une hémorragie voulue, planifiée et exploitée par les Américains et leurs “bailleurs de fond” qui pensent qu’ils vont pouvoir faire un strike jusqu’à la Chine. Un strike qui durera des décennies mais dont ils sont convaincus que c’est leur mission biblique et leur vocation puisque, manifestement, le meurtre de masse, même indirectement, est leur vocation.

Breizh-info.com : De retour de votre séjour, quelle est la situation à Moscou ? Vous êtes vous senti dans un pays en guerre ?

Christian Rol : Moscou est une ville occidentale. C’est le Paris des Trente Glorieuses, une ville absolument fascinante et tranquille sans flics ni soldats. C’est incroyable ! Il règne une opulence, une sérénité et, je dois le dire, une forme d’indifférence qui contrastent avec les enjeux historiques et la guerre mondialisée. Un ami qui vit là-bas et a connu le front dans le Donbass m’a confirmé cette impression en me confiant que l’éloignement des affrontements et une forme d’individualisme très post-moderne éloignent les moscovites de cette tragédie à laquelle, néanmoins, ils seront confrontés tôt ou tard .

Breizh-info.com : Vous avez envisagé par ailleurs de vous rendre dans le Donbass. Pourquoi n’y êtes vous pas parvenu ? Pour quelles raisons vouliez vous vous rendre là bas ?

Christian Rol : Je devais effectivement me rendre dans le Donbass mais, lorsque j’étais à Moscou, les nouvelles (non officielles) provenant de Donesk étaient très alarmistes. La dureté des combats était à son paroxysme (d’après ce qu’on m’en a dit) et l’armée ne voulait pas risquer d’infiltrer par imprudence un “agent ennemi”, c’est-à-dire moi, potentiellement. J’ai fait jouer tout mon réseau mais en vain. Si j’étais resté quinze jours de plus on me faisait passer dans le Donbass mais je n’avais plus d’argent à consacrer à cette mission que je m’étais fixée. J’y retourne fin avril, si tout va bien, parce que je veux écrire un livre sur les volontaire français et étrangers qui se battent depuis des années aux côtés des pro-russes là-bas. J’ai d’excellents amis qui combattent et ce sont de vrais personnages de roman que je veux immortaliser.

Breizh-info.com : Quel regard portez vous sur le traitement occidental de cette guerre en Ukraine ?

Christian Rol : Le traitement médiatique de cette guerre est tristement le même que lors des guerres contre l’Irak, la Serbie, la Libye ou la Syrie (où j’étais il y a quelques année). La propagande atlantiste a définitivement englouti l’Europe de l’Ouest depuis la chute du Mur de Berlin et le retour de la France dans l’OTAN par Sarkozy a été le clou dans le cercueil.

L’opinion publique marche encore à ces conneries, ou alors elle s’en fout puisque la plupart des gens ne savent pas situer Marioupol sur une carte. Je crois c’est cette ignorance et le soft-power américain ont eu raison de la boutique France. Et puis, Macron comme Zelinski, Ursula et les autres ont été placés là où ils sont pour faire le sale boulot. Quand j’étais là-bas, des amis m’ont montré, photos à l’appui, que les bombes qui tombent sur Donesk sont bel et bien françaises…

Breizh-info.com : N’y a-t-il pas malgré cette propagande occidentale, une sorte de fantasme, notamment chez une partie des dissidents en Occident, au sujet de la Russie ?

Christian Rol :  Si vous me parlez d’un fantasme consistant à envisager la Russie comme un sanctuaire pour des gens comme nous, je vous réponds que ce n’est pas un fantasme. Il demeure dans le monde russe (et ukrainien d’ailleurs) un culte de la force tranquille, un respect des traditions et de valeurs qui n’ont plus cours ici. Mais, après seulement dix jours, je suis bien incapable de vous dire si la Russie est un pays de Cocagne. Tout ce que je sais est que mes amis français qui ont choisi de s’y installer depuis des années ne reviendront jamais en France. D’abord, parce qu’ils ne le peuvent pas (à moins d’avoir de sérieux ennuis), ensuite par ce que la Russie, malgré quelques concessions à la modernité, est l’antithèse de l’Occident. Quant à moi, le froid polaire qui y règne, m’interdit une telle éventualité, hélas !

Pour ne pas conclure, je suis le contraire d’un plumitif fasciné par la guerre. J’ai vu celle-ci des deux côtés dans l’ex-Yougoslavie, et je crains que celle-ci ne s’étende à l’Ouest comme me le prédisent mes amis en Russie. La responsabilité en revient à ces américains psychopathes qui intriguent dans l’Etat Profond et aux dirigeants européens qui, non contents de vendre leurs pays à la découpe, trahissent leurs peuples et l’Histoire.

Propos recueillis par YV

Crédit photo : DR

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