Aussitôt informés de ce scoop, les dirigeants de nombreux partis, chefs d'entreprises et cadres de pôle emploi se mobilisent. Des responsables appellent la rédaction du Spiegel. La question qui turlupine les uns et les autres est posée sans détour : "Quel genre de cigarettes fument vos journalistes ? Sous l'effet de quel produit stupéfiant écrivent-ils leurs articles ?" Un tel titre pouvait également provenir d'un abus d'alcool bien compréhensible en ces temps difficiles. La construction de centrales à charbon Outre-Rhin a pu plonger le personnel dans la déprime. Le directeur dément avec force ces accusations de dérives hallucinatoires. Bien-sûr le produit intérieur brut de l'Allemagne dépasse de 40% celui de la France mais un soubresaut est en train de la faire passer de bonnet d'âne à bonnet de nuit. Son avancement dans le peloton de queue est époustouflant. La remontée indéniable. Au téléphone, le patron de presse exulte. Le pillage des boutiques l'a fortement impressionné. Faut-il que les Français aient le porte-monnaie plein à craquer pour se ruer avec une telle ferveur vers les produits de luxe !
L'estocade qui fera taire les plus sceptiques arrive avec ce dernier argument de poids : c'est Emmanuel Macron qui a fait nommer Ursula Van der Leyen à la tête de la Commission européenne. Le héros qui a su débarrasser l'Allemagne d'Ursula méritait d'être honoré à la une du magazine. En page intérieures, les lecteurs trouveront un Macron à découper selon les pointillés et à fixer au plafond au bout d'une ficelle. La macronomania a atteint un point de non-retour dans les bureaux de Der Spiegel. Mots croisés, rubrique tricot, annonces immobilières, le président français est omniprésent.
Pour les services de dégonflage de grosses tête, la stratégie est grossière. Convaincu par les Allemands d'être le Messie et Bernadette Soubirous réunis, le président français va redoubler d'initiatives malheureuses. Partir en croisade pour convaincre Ursula que les centrales à charbon sont un bol d'air frais pour la planète, équiper l'Elysée de Mercédès et autres décisions bénéfiques à l'Allemagne. Tout flatteur vit aux dépends de celui qui l'écoute. Der Spiegel connaît ses classiques.
Jany Leroy
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