Les États-Unis sont devenus le premier fournisseur de gaz de la France en 2022, année du début de la guerre en Ukraine, devant la Norvège et la Russie, selon BFM Business, qui s'appuie sur les chiffres clés de l'énergie publiés fin septembre par le ministère de la Transition énergétique.
Les États-Unis étaient au 9e rang en 2018, la Russie reculant du 6e au 10e rang.
En voulant s’imposer à tout prix une baisse de 55 % de ses émissions à l’horizon 2030, l'Europe se veut championne de la vertu climatique. Hélas, la vertu a toujours un prix exorbitant en termes socio-économiques.
Pour la France, ce coût a été chiffré dans le fameux rapport Pisani-Ferry : accéder au graal des 55 % se fera au prix d’un accroissement stratosphérique de la dette (+25 % anticipés en 2040), de la fiscalité (retour de l’ISF en ponctionnant 10 % du patrimoine des plus aisés) et du déficit de la balance commerciale. Ces investissements en majorité non productifs (équipements principalement produits dans le Sud-Est asiatique) induiraient pour au moins deux décennies davantage de pauvreté, « un passage au purgatoire nécessaire pour accéder à une croissance verte n’émergeant qu’après 2040 », selon France Stratégie.
Le climat est secondaire
D’autant que dans cette démarche, le climat est finalement secondaire. Les émissions de GES [gaz à effet de serre, NDLR] et le réchauffement climatique étant des phénomènes globaux totalement indépendants du lieu d’émission, des approches nationales voire régionales resteront peu efficaces si elles ne s’intègrent pas dans une politique mondiale de décarbonation : « L’effort climatique français n’aura qu’une incidence marginale sur les émissions mondiales et, donc, sur le réchauffement », poursuit le rapport. Marginale signifie nulle, pour un pays comme la France possédant déjà l’un des mix les plus décarbonés du monde ! Comme toujours, les Français les plus modestes seront les « dindons de la farce » : on ne leur demande rien de plus que de se suicider sur l’autel de la vertu. Pas certain qu’ils l’entendent de cette oreille et ne se retrouvent pas sur les ronds-points pour lancer un nouveau mouvement des gilets jaunes. N’oublions jamais que c’est une taxe écologique sur les carburants qui lança les hostilités.
Mais le plus cocasse est que, parallèlement à cette marche forcée vers une vertu vide de sens, l’Europe pactise aujourd’hui… avec le diable. Depuis quinze ans, le Vieux Continent a toujours diabolisé ses ressources potentielles en gaz de schiste, considérant la méthode d’extraction (la fracturation hydraulique) comme infréquentable. Qui se souvient encore de François Hollande déclarant fièrement : « Tant que je suis Président, il n’y aura pas d’exploration de gaz de schiste en France. » Exploration et non exploitation : nous n’étions même pas autorisés à regarder !
Beaucoup plus pragmatiques mais sans doute moins vertueux, les Américains ont adopté la stratégie inverse. Grâce au développement massif de ses gigantesques réserves, le pays de l’Oncle Sam est aujourd’hui autonome en gaz naturel. Ce combustible bon marché a permis aux États-Unis de remplacer, en moins de dix ans, une grande partie de leur génération électrique charbonnière (-56 %) par de la génération gazière : ils ont réduit leurs émissions de 16 % (soit 1,6 % par an, contre 1 % pour les Européens).
Le gaz naturel comme variable d'ajustement
Mais l’histoire ne s’arrête pas là : importateurs majeurs de gaz naturel au début du siècle, les États-Unis exportent, aujourd’hui, 100 milliards de mètres cubes de gaz de schiste sous forme de gaz naturel liquéfié. Ce « Lucifer des temps modernes » que Ségolène Royal, alors ministre de l’Environnement, cherchait à interdire d’accoster à Dunkerque est aujourd’hui devenu… la première source d’importation gazière en France, mais aussi dans la plupart des pays européens. Pour se libérer des importations russes devenues infréquentables depuis le déclenchement du conflit russo-ukrainien, l’Europe a dû se résoudre à pactiser avec le diable. Un diable produit aux États-Unis à 5$/MBtu et revendu en Europe six fois plus cher. L’Europe est donc pigeonnée de tous les côtés : dépendance gazière atteignant 90 %, gaz et électricité au prix fort et consommation massive de gaz de schiste.
Face à cette situation rocambolesque, le Vieux Continent aurait intérêt à rapidement sécuriser son approvisionnement gazier en regardant, notamment, vers l’Est méditerranéen, mais aussi en accélérant la construction de nouveaux terminaux de regazéification. Elle pourrait aussi relancer sa production nationale. Ainsi, après les Pays-Bas et l’Allemagne, qui ont décidé de relancer au nord de la Frise un projet gazier gelé par les écologistes depuis plus de dix ans, c’est au tour des Britanniques de relancer l’exploitation gazière en mer du Nord. La France pourrait au moins évaluer son potentiel gaz de schiste, reconnu comme l’un des plus importants d’Europe.
N’en déplaise aux écologistes les plus rigoristes, le gaz naturel sera l’inévitable variable d’ajustement du mix énergétique européen au cours des deux prochaines décennies. En 2040, il devrait encore compter pour 25 % de la consommation.
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