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Trois ans après Samuel Paty : l’Histoire se répète et rien ne change

Une minute de silence. Ce lundi 16 octobre 2023, à 14 heures, les élèves de France observent, avec leurs enseignants, un temps de silence en hommage à Dominique Bernard, professeur de lettres assassiné, vendredi 13 octobre à Arras, par un Tchétchène radicalisé. En déplacement dans les Yvelines, Élisabeth Borne promet alors que « jamais la barbarie ne l’emportera face aux savoirs ; jamais la République ne pliera face au terrorisme ». Des mots déjà prononcés trois ans plus tôt par Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l’Éducation nationale… Ce jour-là, le 16 octobre 2020, à 200 kilomètres d’Arras, Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie dans un collège de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), est décapité par un islamiste tchétchène pour avoir montré des caricatures de Charlie Hebdo à ses élèves.

Trois années séparent les assassinats de Samuel Paty et de Dominique Bernard. Assaillant tchétchène, barbarie islamiste, professeur tué… Les similitudes entre ces deux attaques ignobles sont malheureusement nombreuses. « Plus jamais ça. » Tel était le mot d’ordre du gouvernement en 2020. Mais trois ans plus tard, l’Histoire se répète. En 2023, l’assassinat de Dominique Bernard témoigne une nouvelle fois de la faillite de la lutte contre le terrorisme islamiste. Son assaillant, Mohammed Mogouchkov, arrivé en France avant ses 13 ans et récemment débouté du droit d’asile, bénéficiait d’une mesure de protection contre l’expulsion.

Expulsion des étrangers radicalisés

« Je n’ai pas la main qui tremble. » Devant les caméras, Gérald Darmanin assure faire preuve de fermeté dans la lutte contre l’islamisme. Sur les réseaux sociaux, le ministre de l’Intérieur se félicite même, graphique à l’appui, d’avoir expulsé « plus de 800 étrangers radicalisés depuis 2017 ». Si 800 étrangers en situation irrégulière ont bel et bien été expulsés depuis le début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, ces expulsions ne cessent de diminuer, année après année. « 636 expulsions entre 2017 et 2020, 200 depuis 2020 »fustige ainsi le maire de Cannes David Lisnard (LR).

Hasard du calendrier, Gérald Darmanin a décidé de lancer sa lutte contre les étrangers radicalisés en octobre 2020, trois jours avant la mort de Samuel Paty. À l’époque, le ministre de l’Intérieur promet de frapper fort. Sur 851 étrangers en situation irrégulière alors enregistrés au Fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), 661 avaient reçu l’ordre de quitter le territoire mais seuls 428 avaient été expulsés. Restaient donc 233 – 231, selon les calculs de Beauvau – étrangers en situation irrégulière radicalisés sur le sol français. « Ces 231 individus ont été expulsés », assure, aujourd’hui, le ministère auprès du Figaro. Malgré cette vague d'expulsions, trois ans plus tard, la situation reste inchangée. 1.411 fiches concernent actuellement des étrangers en situation irrégulière. 498 d’entre eux vivent toujours en France, dont environ 300 derrière les barreaux et 193 en liberté. Autrement dit, trois ans après l’assassinat de Samuel Paty par un étranger radicalisé, rien n’a été fait pour réduire la présence des clandestins islamistes sur le sol français.

Mesures de protection des étrangers

Aujourd’hui, Emmanuel Macron promet « un État impitoyable » contre les terroristes. Gérald Darmanin, de son côté, assure tout mettre en œuvre pour expulser au plus vite tous les étrangers radicalisés. Aux journalistes qui l’interrogent, il promet que l’adoption de la loi Immigration permettra de mettre fin aux mesures de protection (résidence depuis l’âge de 13 ans, mariage, vie de famille…) dont bénéficient certains étrangers – à l'instar de Mohammed Mogouchkov - pour rester en France sans titre de séjour. Mais pourquoi le gouvernement n’a-t-il alors pas lancé l’examen de ce texte plus tôt ? Peut-être parce qu'il ne cesse de changer d'avis sur la question. Ainsi, en décembre 2022, la majorité Renaissance rejetait une proposition de loi des Républicains qui entendait mettre fin à ces exceptions. Par ailleurs, même si le texte Asile et Immigration était adopté en l'état, l'assaillant de Dominique Bernard ne pourrait être visé par une mesure d'expulsion. Au mieux, il pourrait faire l'objet d'une OQTF moins contraignante (peut faire l'objet de recours et n'est pas définitive).

Malheureusement, le gouvernement ne patine pas seulement sur la question des étrangers radicalisés. C’est sur l’ensemble de la question migratoire qu'il semble faillir. En effet, si plus de 20 % des obligations de quitter le territoire français (OQTF) étaient exécutées au début du quinquennat de François Hollande, seules 6,9 % des mesures d’expulsions sont aujourd’hui effectives. Après chaque drame, le gouvernement a beau appeler à la fermeté, force est de constater que les mots semblent rarement suivis d’actions sur le long terme.

Clémence de Longraye

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