Face à l’homme, que les caméras de sécurité ont filmé en train de monter dans l’escalator du centre commercial, Damien Guérot a empoigné un poteau, avec lequel il s’est mis en face de l’assaillant, en haut de l’escalier mécanique, pour le repousser. Silas Despreaux, lui aussi, s’est opposé à l’assaillant. Leur geste n’est pas sans évoquer celui d’un autre héros français, Henri d’Anselme, le « héros au sac à dos », qui faisait un pèlerinage solitaire à la découverte des cathédrales de France. Il s’est, lui aussi, opposé d’une manière qui pourrait paraître dérisoire mais qui, dans un cas comme dans l’autre, a suffi. Il y a, dans ces deux exemples, une leçon qui est loin d’être anodine : Henri, Silas et Damien n’étaient pas armés, ils ne se sont pas jetés sur l’agresseur et ils ne considèrent pas avoir fait preuve d’un extraordinaire courage (c’est peut-être à cela que l’on reconnaît un héros). Ces exemples nous prouvent qu’il suffit parfois de se dresser contre le mal pour le faire reculer.
Ils font honneur à la France
Le Premier ministre australien a chaleureusement félicité nos deux compatriotes. Il a proposé à Damien Guérot, dont le visa n’allait pas tarder à arriver à expiration, la nationalité australienne, « même si ce serait évidemment une perte pour la France ». Il a bien raison dans les deux cas : un héros comme ça, on a envie de lui donner le passeport de son propre pays – et, oui, ce serait une perte pour la France, qui a bien besoin d’exemples héroïques. On ne sait pas ce que décidera Damien Guérot, qui témoignait très simplement à la télévision australienne de ce qu’il avait fait. Il ajoutait, par ailleurs, un détail intéressant : dans les yeux de l’assaillant, il y avait du « vide », « comme s’il n’y avait personne à l’intérieur ». Il semble que l’on ne saurait mieux décrire les causes premières de la barbarie : quand il n’y a personne à l’intérieur, ce n’est pas qu’on ne croit plus en rien, c’est que l’on laisse la place à n’importe quoi, au chaos et l’animalité que la nature humaine porte en elle avec le poids du péché originel.
En attendant de savoir si nous nous montrerons dignes de tels exemples quand nous serons confrontés à la folie ou au terrorisme - ce qui, statistiquement, a de plus en plus de chances d’arriver -, rendons simplement hommage à ces héros ordinaires. Ils font honneur à la France, jadis célèbre dans le monde entier pour sa bravoure. Et n’oublions pas la façon dont l’Australie a traité la policière qui a abattu ce monstre : à Bordeaux, après la neutralisation du terroriste afghan qui a tué deux personnes sur fond de radicalité musulmane, la moitié des questions de la conférence de presse tournaient autour des raisons pour lesquelles les policiers avaient abattu le meurtrier. Deux salles, deux ambiances.
Arnaud Florac
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