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Baignade dans la Seine : cette France oubliée par Macron et Hidalgo

Capture d'écran
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Paris ne s'est pas fait en un jour, ni la baignabilité de la Seine pour les Jeux olympiques en quatre ans. Contrairement à ce que pourraient laisser croire les auto-congratulations d'un Emmanuel Macron et d'une Anne Hidalgo après la réussite de ces JO 2024. Pour assurer la prestation parfaite de cette grande dame - la Seine, pas Anne Hidalgo - depuis la parade de l'ouverture jusqu'aux compétitions de triathlon et aux ablutions d'Amélie Oudéa-Castéra et du maire de Paris, il a fallu bien des efforts en amont. En amont dans le temps, donc. Et, bien sûr, dans l'espace. Pour que l'eau fût parfaite - ou à peu près - entre pont de Sully et pont Mirabeau, il a fallu œuvrer bien en amont. En effet, la Seine est loin d'être un long fleuve tranquille.

Sans remonter aux grosses eaux gelées observées par l'empereur Julien (l'apostat des chrétiens) en 363 - notre première source littéraire sur Paris et la Seine, dans son livre le Misopogon - ni aux crues historiques, il suffit de rappeler celle de 2016 ou celle de 1910 pour prendre conscience que, sans aménagement, un simple orage la veille des JO sur le bassin amont de la Seine et de ses affluents aurait pu compromettre le spectacle. Or, c'est justement ce qui s'est produit le 20 juillet dernier : des orages et des pluies diluviennes se sont abattues sur la Haute-Marne. Cela n'a guère retenu l'attention des médias, malgré des dégâts considérables, ni affecté le début des JO. Mais il est intéressant de rappeler pourquoi et grâce à qui.

Il faut féliciter Didier Loiseau, ancien maire UMP de Langres, en Haute-Marne, d'avoir rappelé notre Président olympien aux réalités de la terre. Et de l'eau. Dans une tribune au Monde exemplaire, intitulée « Nous, habitants des territoires ruraux en amont de Paris, nous connaissons les sacrifices offerts pour rendre la Seine baignable », il « regrette que l’hommage du président de la République ait oublié les efforts menés depuis des décennies dans les bassins-versants du fleuve ». Oui, notre maître des horloges devenu ce « foudre de guère » dénoncé par Dominique Jamet, a du mal à regarder au-delà de lui, du périphérique parisien et de la banlieue, comme le montre ce tweet du 31 juillet de notre ego-Président épinglé par Didier Loiseau : « Nous y sommes. Par un investissement massif de l’État avec Paris et le Val-de-Marne, nous avons réussi en quatre ans l’impossible depuis cent ans, la Seine est baignable. Héritage fabuleux pour les Franciliens qui pourront y nager et pour la biodiversité. »

Le tribut de la France rurale

Didier Loiseau, ancien élu local - et, en cela, bien plus au fait de certaines réalités qu'une grande partie de nos députés hors-sol -, rappelle quelques vérités historiques et géographiques : « Ce n’est pas seulement Paris et le Val-de-Marne, mais les territoires champenois et bourguignons, où naissent et grossissent la Seine et ses principaux affluents, la Marne, l’Yonne et l’Aube. Alors, comment ne pas saluer à l’occasion de ces JO ces départements ruraux de la Haute-Marne, de l’Aube, de la Marne dont les sacrifices ont été décisifs ? » Et de rappeler quelques chiffres : « 5.000 hectares pour le lac du Der (retenant la Marne) », le plus vaste lac artificiel de France et d'Europe, « 2.500 hectares pour celui de la forêt d’Orient (retenant la Seine) »« 2.320 hectares pour le réservoir Aube, soit près de 10.000 hectares au total ». Et pour ramener Anne Hidalgo à un peu plus de modestie : « C’est exactement la surface de… Paris, continue-t-il, y compris les bois de Boulogne et de Vincennes ! » Mais voilà, derrière les chiffres de ces grands travaux qui ont domestiqué la Seine et ses affluents, Didier Loiseau rappelle que « ce sont des villages, des fermes, des entreprises, des cimetières qui ont été noyés »La petite église de Champeaubert, rescapée de ces grands travaux, est là pour témoigner de ces terres et ces villages engloutis.

La France périphérique, ce tiers exclu des JO et de la France selon Macron et Hidalgo

Didier Loiseau conclut sa réflexion par une mise en garde politique : à force de demander beaucoup à cette France rurale et périphérique sans même daigner lui accorder une miette de reconnaissance, la rupture et la révolte n'en seront que plus profondes. Car ces JO, depuis la cérémonie d'ouverture, ont été le reflet de deux France : une France cosmopolite et métropolisée, et la France des banlieues, pour lesquelles on a gracieusement multiplié équipements sportifs et urbains et billets. Pour la France de l'amont, priée de communier dans le woke et le sport de haut niveau international, et de se taire, rien. Et il se trouve que cette France, même quand elle s'exprime démocratiquement, les 9 et 30 juin derniers, même quand elle gagne, les deux autres ordres, ceux de Macron et d'Hidalgo, lui retirent sa victoire, l'interdisent de médaille. Décidément, ces Jeux, comme tous les autres, furent aussi politiques. En excluant ce nouveau tiers état condamné à s'invisibiliser, auraient-ils été prérévolutionnaires ?

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