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Le cauchemar de l’OTAN

par Franck Marsal

La (désormais) envisageable victoire de la Russie en Ukraine et ses conséquences possibles.

La guerre en Ukraine se poursuit depuis 2 ans et demi. La perspective d’une victoire ukrainienne s’éloigne. La Russie progresse régulièrement, chaque jour, sur les différents fronts. L’offensive menée par l’Ukraine dans la région russe de Koursk s’est enlisée. Les forces russes ont circonscrit rapidement l’incursion. Elles ont bombardé méthodiquement les positions ukrainiennes pendant plusieurs semaines, neutralisant une quantité importante d’hommes et de matériel. Elles n’ont ni interrompu ni ralenti leur progression sur les fronts du Donbass. Enfin, elles ont envoyé ces derniers jours les parachutistes accompagnés de forces spéciales reprendre le territoire. Un cinquième environ du territoire sur lequel la plupart des analystes occidentaux misaient pour «pousser Poutine à une négociation favorable à l’Ukraine» a été perdu en quelques jours.

Toujours quelque chose en plus

Le mandat de président de Zelensky a expiré en mai mais il se maintient au pouvoir en prenant prétexte de la loi martiale. Ses réponses à la question, posée plusieurs fois, de savoir quel était l’objectif de cette offensive en Russie n’ont été qu’évasives. Un vague «plan de victoire» est évoqué, sans que l’on puisse en entendre le moindre détail. Face à un journaliste un peu pugnace, il a laissé entendre que l’offensive de Koursk avait permis de ralentir la progression russe dans le Donbass, alors que tout le monde constate l’inverse. Ses réponses en actes ont été de limoger une grande partie de son gouvernement pour «donner une nouvelle énergie» (ce qui ne conforte pas vraiment l’idée d’un plan de victoire bien établi) et de demander aux occidentaux toujours plus : après avoir obtenu les canons, les chars, même les avions F16 (dont le premier a été perdu avec son pilote quelques jours seulement après leur arrivée en Ukraine), il exige maintenant de recevoir un nombre beaucoup plus important de missiles occidentaux (ATACMS américaines, Storm Shadow britanniques ou SCALP français notamment) et le droit de les utiliser pour des frappes longues à l’intérieur du territoire russe. Concrètement, cela signifie qu’il réclame la possibilité d’ordonner aux équipes occidentales de spécialistes qui pilotent ces missiles sophistiqués de cibler Koursk, voire Moscou ou Saint-Pétersbourg. Zelensky s’est pour cela rendu à Washington, où il a eu une réunion avec Jo Biden et le nouveau Premier ministre britannique Keir Stammer. On ne sait à ce jour si les USA et la Grande-Bretagne ont donné leur accord ou non, mais de nombreux spécialistes estiment probable que cet accord sera donné.

Voici ce qu’en dit le colonel Daniel L. Davis. Le lieutenant – colonel Daniel L. Davis est un officier américain à la retraite qui a combattu en Irak et en Afghanistan. En 2012, de retour d’Afghanistan, le colonel Davis avait fait une première apparition médiatique dans un article du New York Times, intitulé «Dans la guerre afghane, un officier devient lanceur d’alerte» relatant l’analyse que le colonel avait produite sous le titre : «Vérités, mensonges en Afghanistan, comment les dirigeants militaires nous ont laissés tomber» et qui annonçait la défaite inévitable des USA dans ce pays. Voici ce qu’il a déclaré hier dans une interview : «Lorsque vous entendez des choses courantes, que ce soit de la part de Zelensky, de Keir Starmer, de Biden ou de n’importe quel dirigeant de OTAN, ils ne cessent de répéter que «tout va bien». Ils disent toujours que «tout ce dont nous avons besoin, c’est d’un tout petit peu plus : nous avons besoin de quelques missiles à longue portée supplémentaires, nous avons besoin de quelques chars supplémentaires, nous avons besoin d’un autre paquet de défense, d’un autre système de défense antiaérienne». Il y a toujours une chose de plus dont ils ont besoin. Pourtant, vous voyez que cela ne fait aucune différence sur le champ de bataille. Je peux vous donner des détails très graphiques et aller aussi loin que vous le souhaitez pour dire que rien de tout cela n’aura d’importance. Parce que les guerres ne sont pas gagnées par des éléments individuels, elles sont gagnées par un ensemble de capacités, et surtout par la main d’œuvre, une main d’œuvre entraînée. Lorsque vous entrez dans une grande guerre qui s’est transformée en une guerre d’attrition, c’est le camp qui a le plus d’éléments dans son panier d’indicateurs qui va l’emporter. L’histoire montre que le fait d’avoir les commandants tactiques les plus brillants ne fait aucune différence. Ce qui compte, c’est de savoir qui a le plus d’hommes et la plus grande capacité industrielle pour assurer la circulation des outils, des armes et des munitions. Si vous regardez cela, c’est uniquement du côté russe et le fait d’avoir une poignée d’autres choses à gauche et à droite de l’Ukraine, telle ou telle arme ou capacité, ne va tout simplement pas compter. Mais les gens continuent à dire que c’est le cas, parce que c’est de la propagande. Elle fait croire aux gens qu’il y a de l’espoir. Ils continuent donc à soutenir quelque chose qu’une analyse rationnelle et objective qualifierait de mauvaise affaire. Mettons fin à cela rapidement. Mettons fin aux souffrances du peuple ukrainien, à la progression des forces russes vers l’ouest et revenons à essayer d’établir une sorte de politique normale en Europe. C’est ce que nous devrions faire, mais la propagande nous en empêche».1

De fait, non seulement la situation ne s’améliore par pour l’OTAN et son proxy nationaliste ukrainien, mais elle se détériore désormais à vue d’œil. Les forces russes sont à portée d’artillerie de Pokrovsk, principal nœud logistique du Donbass. Elles progressent en direction de la ville de Chasiv Yar, dont une partie a été prise au printemps et qui surplombe les deux agglomérations principales du Donbass encore sous contrôle ukrainien : Slaviansk et Kramatorsk. Le système énergétique ukrainien est exsangue, alors que le rigoureux hiver slave approche. Les campagnes de mobilisations engagées en mars après la visite du sénateur états-uniens Lindsey Graham provoquent des rixes et des protestations dans l’ensemble de l’Ukraine. La côte de popularité de Zelensky est en berne et cela est sûrement l’explication du limogeage de ses principaux ministres.

La logistique est la clé

Écoutons encore le colonel Davis :

«La logistique est la chose la moins sexy que l’on puisse obtenir, mais sans elle, on ne peut pas gagner une guerre. C’est simple et clair. Je crois avoir entendu dire, je ne sais plus qui, que «les experts parlent de tactique, mais les généraux parlent de logistique». Parce qu’ils comprennent que c’est la capacité absolument indispensable sans laquelle les meilleures tactiques du monde, les meilleures armes du monde, les meilleurs dirigeants du monde ne peuvent pas fonctionner et ne peuvent pas gagner une guerre. Si vous n’avez pas de logistique, si vous n’avez pas de carburant, de pièces détachées, de réserves de munitions, de moyens d’acheminement vers et depuis le champ de bataille, de soutien médical, de fournitures médicales, d’allers-retours, etc. Les mécaniciens doivent pouvoir réparer les véhicules rapidement et disposer de pièces de rechange pour les réparer. Toutes ces choses sont absolument vitales. Il ne s’agit pas seulement des lignes de communication, mais aussi du transport, d’un camion qui apporte de la nourriture, des lubrifiants pour vos véhicules. Il s’agit de l’ensemble du système. Il s’agit du personnel et tout cela doit aller de pair pour permettre à cette partie de fonctionner. Donc, si vous avez beaucoup de véhicules blindés, beaucoup d’hommes dans une capacité industrielle qui peuvent construire des choses et un système qui peut soutenir le front, si vous avez des personnes formées au niveau de la mécanique … Vous avez les gars qui sont doués pour la paperasserie pour faire avancer les choses, puis vous avez les combattants pour ouvrir les lignes et tout ce genre de choses. Vous disposez d’une couverture aérienne pour les protéger dans le ciel, vous avez des capacités de défense aérienne pour les empêcher de les interdire, etc. Tout ce système est nécessaire pour mener une guerre et si l’un des camps l’a et que l’autre ne l’a pas, ce dernier n’a aucun moyen rationnel de continuer à exister, et encore moins de gagner. La Russie possède tous les éléments que j’ai mentionnés. L’Ukraine en possède certains, mais pas suffisamment dans les capacités clés. C’est pourquoi vous avez assisté au démantèlement méthodique de la partie ukrainienne depuis 2023, lorsqu’elle a tenté cette offensive à grande échelle désastreuse qui n’a jamais eu la moindre chance de réussir, en raison de plusieurs éléments clés qu’elle ne possédait pas fondamentalement. Il en va de même pour cette offensive où les Russes réduisent méthodiquement l’armée ukrainienne en poussière, en particulier dans l’est du pays. Et maintenant, ils en sont au point d’atteindre la dernière ligne de défense que l’Ukraine a construite depuis 2014 dans certaines catégories. Au-delà, il sera beaucoup plus difficile pour l’Ukraine de se défendre et beaucoup plus facile pour les forces russes fraîches de percer cette ligne et d’avancer dans le pays. Les choses pourraient donc s’accélérer dans le courant de l’année ou au début de l’année prochaine».

Ce jugement est assez partagé par de nombreux experts militaires indépendants et même pro-occidentaux. On pourrait considérer que la récente décision de l’Allemagne de diviser par deux l’aide militaire à l’Ukraine dans son budget 2025 confirme cette analyse. Pourquoi dépenser encore des centaines de millions en armements sophistiqués qui vont finir brûlé en quelques semaines ? Et en effet, pour son «plan de victoire», Zelensky a besoin à nouveau de quelque chose en plus : davantage de missiles à longue portée et le droit de les utiliser en profondeur dans le territoire russe.

Au fait, quel sont les objectifs des belligérants ?

Beaucoup d’experts qui fourmillent sur les plateaux télés et de dirigeants politiques de l’OTAN ont avancé l’idée depuis quelques mois que l’Ukraine ne pourrait pas «gagner la guerre», qu’elle ne pourrait pas atteindre le but qu’elle s’est elle-même fixée dès le début du conflit : regagner par la force tous les territoires perdus, non seulement en 2022 lors de l’offensive russe, mais également en 2014, lorsque la Crimée et une partie du Donbass ont fait sécession. Il est reconnu aujourd’hui par la plupart des commentateurs que ce but est désormais irréaliste. On aurait peut-être pu y penser avant. Rappelons que rien n’indique, depuis 10 ans, que les habitants de la Crimée envisagent ou souhaitent retourner sous le contrôle de Kiev. Ils ont massivement participé à toutes les élections russes depuis 2014 et ont toujours massivement voté pour Vladimir Poutine et son parti. On peut toujours invoquer la fraude électorale, mais il faudrait quand même avoir des signes tangibles pour justifier qu’au moins une partie des Criméens souhaitent revenir à l’état d’avant 2014. De même, rien n’indique que les habitants des petites régions du Donbass contrôlées depuis 10 ans par les opposants au régime de Kiev, qui ont été bombardés par l’armée Ukrainienne depuis, souhaitent également voir revenir les nationalistes revanchards leur interdire de parler russe, de prier à l’église orthodoxe et détruire les monuments à la résistance anti-nazie. Les officiers ukrainiens eux-mêmes se plaignent d’ailleurs de l’aide et des renseignements que les populations du Donbass (en zone sous contrôle de Kiev) fournissent volontairement aux armées russes qui attaquent.

Pourtant la Crimée est depuis le début un objectif majeur de l’armée de Kiev : beaucoup de missiles sophistiqués ont été envoyé sur Sébastopol et les grandes villes de Crimée. Le pont de Kertch qui relie la Crimée à la ville russe de Krasnodar a été l’objet de multiples attaques. Des moyens considérables ont été déployés pour bâtir et mettre en œuvre des drones navals capables d’attaquer les ports de Crimée. Aller vers la Crimée était l’objectif central de la fameuse et désastreuse offensive ukrainienne de 2023. Mais cet objectif avait tout pour plaire à l’OTAN. La Crimée est considérée comme la tour de contrôle de la mer Noire. Une position clé sur la route du pétrole et du gaz de la mer Caspienne et de l’Asie centrale, un lien direct vers le second état visé par l’OTAN depuis 20 ans : la Géorgie. La victoire totale, y compris sur la Crimée n’était pas un objectif réaliste pour l’Ukraine, mais c’était un moyen habile pour l’Ukraine d’obtenir le soutien de l’OTAN.

Depuis quelques mois, Zelensky tourne autour du pot mais n’a pas reconnu explicitement que cet objectif était irréaliste. Il accepte désormais le principe de négociation de paix et accepte même que la Russie puisse être associée à ces négociations. Il a même déclaré que, si l’Ukraine devait renoncer, dans le cadre d’un accord, à certains territoires, il n’en prendrait pas la responsabilité et soumettrait la question par référendum. Côté OTAN précisément, on s’est engouffré officiellement dans cet objectif du retour aux frontières de 1991, la reconquête globale de la Crimée et du Donbass. Mais, mezza voce, un autre son de cloche a été donné, par exemple par Jens Stoltenberg, lorsqu’il a déclaré en substance que cette guerre était très rentable pour l’OTAN car elle permettait d’affaiblir l’adversaire russe, sans nécessiter de large déploiement de soldats occidentaux. L’affaiblissement de la Russie a été joué par Biden d’emblée par la stratégie des sanctions financières. Certains experts continuent de prédire que ces sanctions finiront par porter leurs fruits courant 2025, mais pour l’instant, ce sont les pays européens qui sont lourdement touchés et dans lesquels les gouvernements sortants perdent les élections les uns après les autres. Cet objectif a été partiellement atteint dans le sens où certains ont gagné beaucoup d’argent : les marchands de gaz liquéfiés états-uniens ont profité à fond de la destruction des gazoducs Nord Stream. Les marchands d’armes ont également gagné gros : on a remplacé du vieux matériel soviétique par du coûteux matériel occidental aux frais du contribuable occidental (qui n’a pas vu encore arriver la note, car beaucoup a été acheté à crédit). Divers capitalistes ont investi en Ukraine, dans l’achat des fameuses terres noires, ouvertes à la vente à l’étranger par Zelensky, ou dans les télécoms comme Xavier Niel. D’un autre côté, beaucoup ont perdu et comme d’habitude, c’est aux classes travailleuses qu’on présente la note : hausse du prix de l’énergie, pertes d’emplois, hausses d’impôts, baisse des droits sociaux et ce n’est qu’un début, car, si la guerre est perdue, l’addition sera beaucoup plus salée.

Dès lors que la Russie s’est retirée de la banlieue de Kiev dès le mois de mars 2022, les occidentaux ont vu l’opportunité de jouer un bon coup et se sont engagés pour la «victoire de l’Ukraine», pour un «soutien militaire», à grand renfort de propagande. Ce faisant, l’OTAN et l’Ukraine ont constamment fait monter les enchères : rejet des négociations pourtant bien avancées dès mars 2022, préparation et lancement de la «grande contre-offensive», livraison constante de matériel militaire et soutien financier au gouvernement maintenu en survie artificielle par les prêts et les subventions de plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Côté russe, l’objectif annoncé comme premier est la sécurité de la Russie, avec la neutralité de l’Ukraine, la limitation de ses armements, la sécurité des populations pro-russes, ce que les Russes appellent la «dénazification» de l’Ukraine, c’est à dire le frein du nationalisme ukrainien glorifiant les collaborateurs d’Hitler et promouvant le révisionnisme historique et la russophobie. Ce sont là des objectifs politiques et militaires clairs et on peut considérer que, dans l’hypothèse d’une victoire militaire, cela est réaliste. Cela ne suppose pas nécessairement une occupation de l’Ukraine supplémentaire par rapport aux régions déjà annexées par la Russie. Si on peut penser que les Criméens ou les habitants du Donbass n’ont pas envie de retourner sous la domination de Kiev, il est tout aussi raisonnable de considérer que la très large partie de la population ukrainienne, même parlant russe, n’a pas envie de devenir une partie de la Russie.

Dans l’état actuel des institutions ukrainiennes, la Russie n’aura donc probablement pas à aller jusqu’à Kiev. La percée complète du front et la désorganisation de l’armée pourrait suffire à entraîner l’effondrement du gouvernement de Kiev. Cela ouvrirait la voie à une refonte complète des institutions de ce pays et à l’arrivée d’une nouvelle génération de dirigeants certainement pas favorables à l’OTAN et à l’occident qui auront largement contribué à pousser leur pays dans le ravin.

L’atteinte de cet objectif serait un tsunami politique et financier pour l’OTAN, l’UE et les grands pays occidentaux qui dirigent ou dépendent de ces institutions. Elle discréditerait, dans l’environnement proche tous les politiciens qui se sont engagés dans la voie dictée par l’OTAN et l’UE de l’opposition à la Russie. Cela aurait des conséquences immédiates en Géorgie, en Moldavie, Arménie, dans les Balkans ainsi que dans les républiques baltes.

Le montant du coût de la guerre et des pertes de la défaite (actifs ruinés, prêts non remboursés) se chiffrerait en centaines de milliards d’euros. Convaincre les opinions publiques de payer ce solde de tous comptes sera une tâche difficile pour les politiciens de l’UE, dont la position est déjà très affaiblie par des décennies de propagande mensongère et qui ont tellement promis la victoire facile.

Il n’y aura alors aucun moyen d’éviter une négociation globale avec la Russie sur l’organisation économique et sécuritaire de l’Europe, dans des conditions qui ne seront plus dominées par les bourgeoisies occidentales. C’est certainement la crainte d’une telle issue qui donne à Zelensky ce pouvoir magique de toujours se retourner vers les USA et l’OTAN pour obtenir «quelque chose en plus» pour poursuivre la guerre et retarder l’échéance. Chaque étape pourtant envenime la situation, faisant davantage de morts et de dégâts et approchant d’une guerre mondiale à grande échelle, potentiellement nucléaire.

On pourrait penser qu’un tel risque suffirait à dissuader d’aller plus avant dans cette politique catastrophique. On peut malheureusement craindre que ce ne soit pas le cas, et que certains Dr Folamour, non seulement ne craignent pas d’entraîner le monde dans une guerre mondiale, mais s’y préparent activement à partir des bases de l’OTAN dans l’ensemble de l’Europe orientale.

source : Histoire et Société

  1. interview complète – en anglais : https://m.youtube.com/watch?v=rrTul_EeLGU&t=494s, transcription par mes soins et traduction par deepl

https://reseauinternational.net/le-cauchemar-de-lotan/

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