C’est au cœur d’une des villes les plus pauvres de la région parisienne que cette équipe a mis en œuvre un système frauduleux pour rouler sur l’or. Deux hommes, âgés de 27 et 32 ans, ont été mis en examen mercredi par un juge d’instruction de Paris pour « escroquerie en bande organisée, blanchiment et association de malfaiteurs ». Ils sont soupçonnés d’avoir participé à la mise sur pied d’une vaste entreprise d’escroqueries aux comptes de formation (CPF) et à l’Assurance maladie. Ils auraient aussi mis en œuvre un ingénieux système de blanchiment. Le tout avec la complicité présumée de deux policiers et deux gendarmes. Ali a été écroué et son comparse a été remis en liberté sous contrôle judiciaire.
Dans le box de la salle d’audience, sweat-shirt vert, cheveux frisés et barbiche, Ali affiche un air fataliste. Déjà connu pour trafic de stups, il intéresse aujourd’hui la justice dans le cadre d’une affaire de gros sous. Officiellement, ce père de quatre enfants est technicien de maintenance à mi-temps dans un salon de coiffure. Mais ses activités vont apparemment bien au-delà des petites réparations dans une boutique.
Cet homme, au coeur de toute cette histoire, entre dans la ligne de mire des enquêteurs il y a un peu moins de deux ans. « En décembre 2022, c’est un renseignement sur un trafiquant de drogue notoire, centré autour d’une fratrie des Yvelines qui a poussé les forces de l’ordre à s’intéresser à lui », raconte une source proche du dossier. La police judiciaire de Versailles place les suspects, dont les attaches sont à Trappes, sous surveillance. Mais au lieu de découvrir une histoire de cocaïne et de cannabis, les forces de l’ordre mettent rapidement à jour une affaire d’escroquerie au CPF.
Pour mémoire, le CPF permet à chaque actif d’accumuler des droits à la formation, sous forme d’un crédit pouvant atteindre jusqu’à 5 000 euros par personne. Chaque demande pour l’utiliser doit être conforme aux critères d’éligibilité définis par l’État et la société formatrice certifiée, afin que le paiement soit effectué par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) directement à l’organisme. Les escroqueries qui touchent ce système sont plutôt l’apanage d’affairistes israéliens, leur permettant de brasser des millions d’euros volés aux entreprises et à l’État français. […]
Tracfin, la cellule de renseignement financier, a estimé le montant des transactions suspectes à 31 millions d’euros. Ali et son frère se seraient aussi investis dans des escroqueries à l’Assurance maladie. Ils fournissaient des justificatifs de fausses opérations chirurgicales. Ils auraient monté de fausses associations de quartiers en faveur des personnes handicapées, ce qui leur permettait de percevoir une aide financière destinée à l’achat de fauteuils roulants électriques, pouvant valoir la coquette somme de 10 000 euros. « Ce sont des gens de très haut niveau qui ont fait preuve d’une grande ingéniosité dans l’escroquerie », remarque le procureur lors de ses réquisitions. Selon nos informations, ces deux malfrats seraient en lien avec un caïd réfugié à Dubaï, aux Émirats arabes unis.[…]