Le litige empoisonne les relations franco-algériennes de longue date. Chaque année, la dette de l’Algérie vis-à-vis des hôpitaux publics français s’alourdit. Les factures laissées par ces patients étrangers pris en charge par l’AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), les Hospices civils de Lyon ou les Hôpitaux de Marseille ne sont pas payées. Elles s’accumulent au point d’atteindre 44,9 millions d’euros en 2023 pour la seule AP-HP, selon une source proche du dossier – l’AP-HP, qui accuse un déficit de 460 millions en 2024, se refusant à donner cette information à l’Opinion.
Le dossier, peu connu, prend un relief particulier dans la crise actuelle entre Paris et Alger. Plusieurs explications à cette ardoise conséquente. « Des patients algériens, titulaires d’un visa touristique, se présentent régulièrement dans nos hôpitaux, parfois pour des pathologies lourdes qui ne sont pas prises en charge par l’assurance exigée pour l’obtention de leur visa, celles-ci étant préexistantes à leur venue en France. Pour des raisons déontologiques, voire humanitaires, ces patients sont toutefois soignés en France en dépit du risque d’impayés », relevait en 2017 un rapport du Sénat. « Même si l’on sait qu’il existe des filières, des intermédiaires, comment renvoyer des parents qui demandent que leur enfant soit admis en oncologie pédiatrique ? », interroge un ancien haut fonctionnaire de l’AP-HP.
Autre source non négligeable de créances, la venue de personnalités, détentrices de passeports diplomatiques, qui prennent rendez-vous auprès de grands patrons de services hospitaliers français. Une facture de 30 000 euros avait ainsi été laissée à Lille par un membre du consulat avant que la diplomatie française fasse savoir à ses homologues algériens que, sans paiement, l’affaire pourrait s’ébruiter. […]
Tous les hôpitaux sont concernés. Paris, Lyon et Marseille mais aussi Lille, réputé en cardiologie, ou Toulouse, en neurologie. Nos comptables publics savent très bien que les réclamations sont sans effet », assure un cadre de l’Inspection des affaires sanitaires et sociales. […]
Les administrations rechignent à fournir des chiffres actualisés. En 2016, le passif algérien – d’un montant d’environ 20 millions d’euros pour la seule AP-HP – est en partie apuré à la faveur d’un compromis franco-algérien. […]