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Aide au développement : Guillaume Bigot (RN) dénonce une « AFDgate »

Capture écran Assemblée nationale
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Après l’USAID aux États-Unis, c’est au tour de l’AFD (Agence française de développement, son équivalent en France ; environ 15 milliards d’euros de financements en 2024) de se retrouver dans la tourmente.

Polémiques en chaîne

Plusieurs personnalités dénoncent, aujourd’hui, certains de ses financements, considérés comme abusifs. Pour Sarah Knafo, député européen Reconquête, « il aura fallu que je révèle le scandale de l’aide au développement pour que le gouvernement découvre le sujet ». D’autres défendent au contraire son action, comme Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, qui a vu là « un peu de trumpisme, beaucoup de xénophobie », estimant que « notre APD [aide publique au développement] doit bien sûr être évaluée, elle l’est d’ailleurs, mais pas dans l’ignorance et la mauvaise foi ! » Cette intervention n’a pas manqué de faire réagir, à son tour, le député RN Guillaume Bigot qui lui a répondu, sur X : « J’aimerais beaucoup connaître l’avis de Pierre Moscovici, sur ce projet validé par l’AFD, de 300.000 € pour la "Plate-forme des ONG Françaises pour la Palestine", qui est un organe de propagande antisémite et pro-frériste. »

Le ministre en opération déminage

Sentant que l’ambiance commençait à se tendre sérieusement, le premier concerné, Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères et de l’Europe, a jugé utile, comme l'a expliqué France 24, de venir en opération déminage sur CNews et Europe 1, le 23 février, pour annoncer avoir signé, quelques jours plus tôt, « un décret qui instaure une commission d'évaluation de l'aide publique au développement ». Là encore, Guillaume Bigot est monté au créneau. Ironisant sur l’initiative du ministre, il a rappelé que « Clemenceau disait : "Quand on veut enterrer une décision, on crée une commission". Ne nous laissons pas endormir sur l'APDgate. » Toujours sur X, le député de Belfort, qui était à l’automne dernier le rapporteur pour avis de la mission « Aide publique au développement » au sein de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, s’est aussi réjoui que « le scandale de l'aide publique au développement (APD) éclate au grand jour ! Ça tombe bien, c'était l'objet de mon rapport pour la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, et c'est encore pire que ce que vous pensez. »

Guillaume Bigot monte au créneau sur BV

En attendant de plus amples développements, nous lui avons demandé de réagir sur les quatre exemples produits par Jean-Noël Barrot pour défendre l’APD. Le ministre avait en effet déclaré que « l’action de la France à l’international, c’est pour lutter contre la résurgence du terrorisme et de Daech. C’est pour ça qu’on soutient la Jordanie, car c’est depuis nos bases en Jordanie que nous luttons contre le terrorisme de Daech. L’aide publique au développement, c’est aussi utile pour limiter l’impact de l’immigration, notamment irrégulière. » Réponse de Guillaume Bigot : « Lorsqu'il y a une coopération en matière de renseignement, et ponctuellement militaire, ça peut évidemment avoir un effet contre Daech. Mais il faudrait déjà empêcher l'islamisme de se propager chez nous, avant d'en éviter la propagation en Jordanie. Commençons par interdire les Frères musulmans chez nous avant de financer les pays qui les interdisent. »

Chantage à la turque

Jean-Noël Barrot a aussi tenu à justifier l’aide de l’agence à la Turquie, qui, « après la guerre en Syrie en 2015, a accueilli trois millions de réfugiés. Pour éviter que tous ces millions de réfugiés arrivent en France, nous soutenons les pays d’accueil pour que toutes ces personnes ne se tournent pas vers la France. » Mais « on est complètement dans le registre du chantage, estime Guillaume Bigot, c'est-à-dire "financez-moi ou je fais un malheur" ». Or, ces migrants qui y résident, « la Turquie elle-même n'en veut plus chez elle. Elle est déstabilisée par l'afflux de migrants syriens. D'où la recherche, très prudente et très méfiante – et là, je ne serai pas en opposition avec M. Barrot – d'une forme de stabilisation de la Syrie pour pouvoir renvoyer chez eux les Syriens. » Mais pour le député RN, au bout du compte, « on voit bien que la solution, ce n’est pas de financer la Turquie, mais de faire en sorte que les Syriens règlent leur problème ».

Le Mpox ? C’est le boulot de l’OMS

Le ministre a, par ailleurs, justifié le financement, par l’APD, d’un programme de lutte contre « l’épidémie de Mpox qui est apparue en Afrique. Notre action vise précisément à en limiter les impacts et éviter qu’elle puisse se propager puis nous concerner directement. » Mais Guillaume Bigot fait remarquer que « c'est le travail de l'OMS, qui a des programmes d'urgence qui s'occupent de ça. Donc, c'est déjà ce qu'on fait en finançant l'OMS. Et il y a des pays, comme la Chine, qui sont beaucoup plus riches que nous, qui ne sont pas endettés, des pays où l’on a délocalisé nos industries, qui nous taillent des croupières et à qui nous devons des déficits commerciaux gigantesques, et qui ne paient pourtant pas leur part. » Protégerions-nous un peu trop les autres au détriment des nôtres ? « Quand les épidémies nous touchent, nous n'avons même pas de masques et de médicaments. Commençons donc par reproduire des molécules anticancéreuses, antidouleurs et, pourquoi pas, anti-Mpox, par faire de la recherche là-dedans. Ce sera plus utile pour protéger les Français et l'humanité en cas d'épidémie. »

Financer les Comores, qui nous sont hostiles ?

Dans son intervention, Jean-Noël Barrot a, enfin, fait allusion à la submersion migratoire dont est victime Mayotte, rappelant que « cette immigration irrégulière est liée à la situation aux Comores. Avec l’aide publique au développement, nous finançons des moyens concrets pour que les autorités comoriennes puissent maîtriser les flux, qui sont très difficiles à maîtriser. » Pour l’élu de Belfort, « la première chose choquante dans ce propos, c'est que les Comores revendiquent toujours Mayotte, que c'est un pays qui a une attitude officiellement hostile ». D'ailleurs, « les Comores participent, avec la Chine et la Russie, au groupe de Bakou, qui lutte contre la présence française à Mayotte, comme en Nouvelle-Calédonie. Donc, nous finançons des gens qui nous sont hostiles. » Comment expliquer que l’immigration comorienne ait augmenté, ces dernières années ? « Le président de l’Union comorienne, Azali Assoumani, a levé absolument toutes les digues, provoquant en 2018 un afflux de migrants encore plus important que d'habitude vers Mayotte. » Et, depuis, « le Président Macron a doublé la mise en matière d'aide au développement. On voit bien là l'illustration parfaite de ce mécanisme du chantage. » Le résultat, « c'est qu'on a sans doute ralenti un peu le rythme des départs, mais un peu, seulement. Et le bilan des arrivées et des retours depuis le doublement de notre aide est largement négatif. Donc, où est l'efficacité ? »

Un moratoire

La commission proposée par le ministre serait-elle une fausse bonne idée ? « Effectivement, confirme Guillaume Bigot, comme Clemenceau, je sais que le meilleur moyen d'enterrer un problème, c'est de créer une commission, de faire un rapport et de le mettre dans un tiroir. C'est vers ça qu'on s'achemine. » Faut-il, alors, une mesure plus spectaculaire, à la Trump ? « Il faut un coup d’arrêt parce qu'on n'a plus d'argent et qu’on est obligé d'emprunter de plus en plus cher sur les marchés financiers. On n'a plus d'argent pour nos hôpitaux, pour nos collèges, pour nos routes… Et la pauvreté est croissante. » Bigot demande « un moratoire immédiat. Il ne concernerait pas l'aide humanitaire d'urgence, car ce serait catastrophique, ni ce qui est contractuel, mais tout le reste qu'il faut mettre pause, comme l'ont fait les États-Unis avec l'USAID. Ensuite, il faut tout examiner, projet par projet, pays par pays, à l'euro près. » Il ne souhaite pas fermer : « Je pense qu'il y a des gens de qualité, à l’AFD. Mais il y a, dans cette agence, un fonctionnement et, autour d’elle, un système qui ne vont pas. »

« L’AFDgate » ne fait que commencer…

Etienne Lombard
Voir le tweet sur le lien ci-dessus

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