Des usagers sanctionnés pour une plante ou un visage mal cadré sur un pass Navigo… Derrière la lutte contre la fraude, la RATP et la SNCF laissent parfois place à des dérives qui ciblent en priorité ceux qui peuvent payer. Quitte à fermer les yeux sur les vrais resquilleurs.
Toujours les mêmes qui payent ? Début mai, Salomé, une Parisienne de 24 ans, s’est vu infliger une amende de 150 euros par la RATP pour transport d’un « objet dangereux ou incommodant ». La jeune femme, « très surprise d’apprendre que porter une plante coûte plus cher que de frauder le métro », a eu le malheur de tomber sur une contrôleuse très zélée. Une verbalisation « dégueulasse » de plus, souffle l’ancien agent Willy Laude, révoqué de la régie en septembre dernier après avoir dénoncé plusieurs dérives à la chaîne M6.
Désormais en attente de son procès aux prud’hommes, Willy Laude confirme au JDD que l’histoire de Salomé est loin d’être isolée. « Le nerf de la guerre, c’est l’argent, explique-t-il. Les contrôleurs ont des objectifs de verbalisation. Et certains ne font preuve d’aucun état d’âme pour les atteindre. » À la clé : une progression de carrière plus rapide et surtout, des primes qui pourraient aller jusqu’à 500 euros par mois pour les agents du réseau ferré (métro et RER). De quoi motiver les 400 à 600 agents de contrôle déployés chaque jour sur l’ensemble du réseau à verbaliser…
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Les agents qui verbalisent dans le métro ou le RER perçoivent, chaque mois, 10 % de la recette globale des amendes dressées par leur équipe et réglées sur place. Forcément, l’appât du gain entre en jeu lors des contrôles… « On cible ceux qui sont susceptibles de payer tout de suite, admet un agent sous couvert d’anonymat. Une personne bien habillée, qui a probablement une carte bleue sur elle : on va faire le maximum pour ne pas la lâcher, la faire sortir de ses gonds pour qu’elle paye. » Et ceux qui refusent catégoriquement ou se montrent agressifs ? « Malheureusement, quand vous avez beau essayer et qu’il n’y a rien, la plupart du temps, c’est “merci et au revoir” », poursuit notre source. Autrement dit, on se rabat sur un meilleur client.
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