Au terme des 6 premiers mois de sa présidence, inaugurée en janvier, Donald Trump est donc effectivement parvenu à remett durablement en cause l’ordre commercial mondial. Le système, jusqu’ici, se voulait multilatéral, orienté vers le libre-échange, dans l’esprit de la charte de l’Atlantique de 1941, des accords du GATT de 1947 et depuis la naissance de l’OMC en 1995.
En inversant la norme, en introduisant un système inégal, discrétionnaire et dissymétrique, en tendant à multiplier par 3, dans le meilleur des cas, la taxation des importations, y compris en provenance de ses alliés, le président des États-Unis a durablement bouleversé l’édifice.
Son propos du 2 avril, présenté pompeusement comme un « discours de libération », s’est ainsi concrétisé dans les dispositions imposées aux Européens le 27 juillet puis dans les taux décrétés le 31, à l’encontre des marchandises en provenance des alliés asiatiques du monde libre : Japon et Corée du Sud 15 %, Philippines et Thaïlande 19 %. De tels pourcentages, fixés de manière unilatérale, se veulent généreusement inférieurs à ceux subis par des pays sanctionnés, parmi lesquels : l’Inde à 25 % en attente d’une punition parce qu’elle achète du pétrole russe, la Syrie suspecte d’islamo-terrorisme taxée à 41 %, la Suisse on ne sait trop pourquoi 39 %, le Brésil 50 % en raison des poursuites contre son ancien président, et même le Canada puni car accusé de complaisance dans la circulation de drogues et dont les marchandises payeront 35 % de droits.
Ce bric à brac renie à la fois le libre-échange et le multilatéralisme. Or, il avait été annoncé par le candidat républicain dès sa campagne présidentielle de 2024. Il pourrait doncsembler que ses promesses sont tenues, que la messe est dite et que la démocratie américaine exécute ainsi la volonté populaire.
Ressenti à l’étranger comme un coup de massue, et en Europe comme une humiliation, ce nouveau cours de la politique étrangère des États-Unis semble largement motivé par la volonté de faire payer, en dernier ressort au consommateur américain, l’énorme déficit budgétaire, la dette colossale et le déséquilibre structurel du commerce extérieur.
Ces taxes « rendront les États-Unis grands et riches à nouveau », prétendait Donald Trump, pour les justifier, sur sa plateforme Truth Social.
Depuis les années 1930, les droits de douane de la première puissance économique du monde étaient tombés en moyenne à 2,5 %. Il ne semble pas que cette période, révolue désormais, ait été marquée par la faiblesse et la pauvreté des Américains. Les droits de douane vont passer globalement à quelque 17 % et la plupart des économistes prévoient, en fait, que leurs effets économiques seront négatifs pour l’Amérique elle-même.
Or, leurs bases juridiques et politiques sont loin d’être acquises. Dès le 31 juillet, la Cour d’appel fédérale de Washington entreprenait d’examiner immédiatement dans quelle mesure le chef du pouvoir exécutif avait outrepassé ses pouvoirs constitutionnels en imposant ces droits de douane aux pays sans l’approbation du Congrès. [cf. L’Insolent du 15 avril « Bombe à fragmentation » https://www.insolent.fr/2025/04/bombe-à-fragmentation.html]
Non, la messe n’est pas dite et, s’il était encore de ce monde le colonel de La Rocque aurait conclu par sa formule favorite : « il va y avoir du sport ».
JG Malliarakis
https://www.insolent.fr/2025/08/%C3%A7a-se-passe-en-ao%C3%BBt-2.html