La mémoire, la gestuelle et le style du « Grand Débat »...
Curieusement, le nouveau locataire de Matignon qui avait, le jour de sa nomination, parlé de « rupture » s'est, au contraire, coulé dans la plus pure continuité macroniste. Le style de son échange final avec des soignants faisait immédiatement penser au Macron posté au centre de la scène du grand débat post-gilets jaunes en 2019, entouré d'officiels, d'élus locaux, de responsables d'administration. D'ailleurs, Sébastien Lecornu a souhaité rappeler son rôle d'organisateur de cette opération de sauvetage de la Macronie (déjà !). Sur le fond, aussi, peu d'annonces concrètes, encore moins budgétaires, aucune rupture, mais la promesse de plus de proximité, d'une offre de soins pour tous à moins de 30 kilomètres. Avec l'inscription, dans le projet de loi de finances et le budget de la Sécurité sociale pour 2026, la création d'un réseau « France Santé » visant à installer des pôles de santé « à 30 minutes de chez vous » d'ici à 2027, soit « 5.000 maisons ». Sur le modèle de France Services, « quelque chose d'assez innovant », selon lui, qu'« on a réussi ». Cela ne mange pas de pain.
On voit bien le concept : une structure qui viendrait superviser toutes celles qui œuvrent à la création des maisons médicales, etc. On croyait qu'il fallait tailler dans ces machins administratifs type ARS ? Non, Lecornu en crée ! Mais Sébastien Lecornu se fait aussi l'apôtre, dans la même prise de parole, de la simplification administrative avec cette phrase appelée à devenir culte : « Il y a trop de cuisiniers dans la cuisine. » Lecornu semble bien être l'enfant politique de Macron et de Raffarin. Du grand bla-bla de proximité. Mais en attendant, on n'en saura pas plus sur ce que deviendront les cuisiniers indésirables... Rien sur l'AME (aide médicale de l'État) pour les étrangers non plus.
La méthode Lecornu ?
Faut-il voir dans cette première sortie du nouveau Premier ministre son discours de la méthode ? C'est ce qu'il a voulu montrer, en tout cas : son intérêt pour les sujets de proximité, hérité de son ancien mandat de président du conseil départemental de l'Eure, loin des déficits, du budget, de la dégradation de la note de la France. Et des négociations avec le PS pour obtenir un accord de non-censure. Un éclairage sur la méthode Lecornu nous est également donné par l'un de ses proches, dans Le Parisien. Citant « une de ses vieilles connaissances », le journal apporte un complément intéressant au portrait du nouveau Premier ministre : « Sébastien, c’est un roublard, quelqu’un qui ne dévoile jamais son jeu. Il peut mentir, même, mais toujours dans l’intérêt du deal qu’il cherche à obtenir. » Au moins, les Français sont prévenus - et les députés aussi - qui seraient tentés de « dealer » avec Lecornu.