Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Delphine Ernotte : pourquoi elle n’aurait pas dû s’en prendre à CNews

Capture écran Quotidien
Capture écran Quotidien
Il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler. Cette expression de la langue française signifie qu’il convient de bien réfléchir avant de s’exprimer. Delphine Ernotte-Cunci, la présidente de France Télévisions, pourrait la faire sienne.

Au lendemain de son audition devant l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) dans le cadre de l’affaire Legrand-Cohen, la patronne du service public télévisé a accordé un entretien au Monde. L'occasion, pour elle, de prendre du recul sur la situation, d’exprimer sa position, de prendre de l’ampleur ? Que nenni : Delphine Ernotte-Cunci a profité de cette interview pour… s’enfoncer.

Certaines de ses phrases comme « La question n’est pas de savoir s’ils ont des opinions, mais d’établir s’ils font bien leur travail » montrent très clairement que la présidente de France Télévisions fait fi du devoir de neutralité du service public, mais ce n’est pas le pire. Elle semble aussi penser que France Télévisions est une sorte d’entité supérieure qu’il est absolument interdit de critiquer, même lorsque ses journalistes ne restent pas dans le droit chemin. Pour preuve, dans cette polémique qui implique deux de ses employés, elle a refusé de prendre le problème à bras-le-corps et a préféré tenter de détourner l'attention en s'en prenant à la « galaxie médiatique de Vincent Bolloré » qui « veut la peau de l’audiovisuel public, réclame sa privatisation et l’exprime avec violence ».

Qui sème le vent récolte la tempête…

Elle semble considérer que c'est un crime de lèse-majesté que de s'interroger sur l’intérêt qu’il y a à avoir des médias publics, si ces derniers donnent dans le militantisme. Militantisme que la principale intéressée dénonce, par ailleurs, lorsqu’elle juge que CNews est « un média d’opinion » et « une chaîne d’extrême droite ». C’est à n’y rien comprendre. Delphine Ernotte-Cunci fait exactement ce qu’elle reproche aux autres.

La patronne de France Télévisions, empêtrée dans cette affaire Legrand-Cohen, pensait sans doute que l’attaque était la meilleure des défenses. Elle a appris à ses dépens que l’adage ne se vérifie pas toujours. En réalité, elle a cherché le bâton pour se faire battre. Suite à cette sortie, les réactions médiatiques et politiques ont été sanglantes.

Dans un communiqué de presse, la chaîne visée a déploré « des attaques qui ne font qu’illustrer la gêne que suscite chez ses concurrents le succès de CNews, première chaîne d’information de France » et a dénoncé le choix de Delphine Ernotte-Cunci « d’allumer de façon scandaleuse des contre-feux » pour « masquer les questions légitimes que pose l’affaire Cohen-Legrand sur l’impartialité du service public et la gestion financière de France Télévisions ». De son côté, Arnaud Lagardère, patron de Lagardère Radio SCA qui détient Europe 1, a pointé du doigt une « manœuvre grossière de victimisation ». La ficelle était trop grosse…

Les personnalités politiques de droite l’ont aussi remarqué. Pour Sarah Knafo, qui milite depuis des mois pour la privatisation du service public, la séquence a été du pain béni. Sur le plateau des Grandes Gueules de RMC, la députée européenne Reconquête a taclé ainsi la présidente de France Télévisions : « On aimerait plutôt qu'elle s'occupe de ses journalistes militants qui complotent avec le Parti socialiste dans des cafés du VIIe arrondissement, plutôt qu’elle vienne insulter des millions de Français qui regardent CNews. »

… et la privatisation ?

Même son de cloche, ou presque, pour Jordan Bardella. Le président du Rassemblement national a jugé qu’« en qualifiant CNews de "chaîne d'extrême droite", la présidente de France Télévisions Delphine Ernotte rompt de nouveau avec son devoir de neutralité ». Il a ensuite rappelé que « le « service public » a à sa tête des militants de gauche, payés avec l'argent du contribuable [...] à hauteur de 4 milliards d'euros par an ».

Laurent Wauquiez, président du groupe LR à l'Assemblée nationale, est lui aussi monté au créneau. Il a qualifié d'« inacceptable » l’intervention de Delphine Ernotte-Cunci, qui « cherche à dicter sa police de la pensée » alors que le service public « ne devrait être que la neutralité ». Un avis partagé par Éric Ciotti, président de l’Union des droites (UDR). Ce dernier a déclaré, sur X : « Le clergé médiatique prononce des anathèmes contre ceux qui ne récitent pas doctement les dogmes de la gauche. Contre ceux qui proposent une parole libre et la confrontation des idées, ils se comportent en inquisiteurs. »

Enfin, Kévin Pfeffer, député RN de la 6e circonscription de la Moselle, a réclamé le départ de la présidente de France Télévisions : « Ça suffit, maintenant. Dix ans que cette dame payée 400.000 euros par an avec nos impôts pourrit le service public. Il faut qu’elle parte ! »

Déjà à l’origine de plusieurs prises de parole controversées laissant entendre que France Télévisions était un outil de propagande, Delphine Ernotte-Cunci vient de marquer un but contre son camp en pleine lucarne. Les amateurs de ballon rond comme Pascal Praud doivent désormais attendre que l’Arcom siffle la fin du match. À l’heure où la France cherche par tous les moyens à faire des économies, cela ne serait peut-être pas un mal.

Sarah-Louise Guille

Écrire un commentaire

Optionnel