Depuis hier soir, les accrochages aux alentours et dans la petite ville de Diabaly sont montés en puissance au point de se transformer en un affrontement majeur depuis bientôt 12 heures. Débordée, l’armée malienne a dû une fois de plus faire appel aux troupes françaises : ce sont d’abord les commandos du COS (1re RPIMa) qui sont intervenus en reconnaissance offensive, suivis d’une compagnie de marsouins, d’un escadron du 1er RHP, peut-être d’éléments de la Légion (REC), avec appui aérien massif. Les combats, très durs, parfois même au corps à corps, durent encore (1). Comme nous l’écrivions précédemment, c’est maison par maison qu’il faut déloger l’ennemi jihadiste terré dans Diabaly.
A 15 heures (heure de Paris), des journalistes sur place signalaient la montée en ligne d’éléments du 21e RIMa partis renforcer les forces spéciales au contact avec les islamistes à Diabaly. Un appui héliporté a été aussi signalé, sans pour autant savoir s’il s’agit d’hélicoptères maliens (Mi-24D) ou français (Gazelle).
Toute communication a été coupée depuis 10h00 ce matin avec la bourgade. Il pourrait s’agir d’une conséquence des frappes aériennes françaises. Ainsi, la ville de San, à l’est de Ségou et hors zone de combat, a connu toute la journée plusieurs coupures d’électricité. Dans le nord, il n’y aurait plus de courant à Gao.
Peu d’éléments ont filtré quant au déroulement des combats sur Diabaly. On évoque maintenant la présence de plus d’un millier de combattants islamistes sur le secteur de la bourgade malienne ; et des renforts pourraient arriver dans le courant de la nuit. Dans l’après-midi, de source militaire malienne et française, on apprenait que les forces françaises auraient affronté « des enfants-soldats, certains âgés de 12 ans » et que le islamistes utilisaient « les populations comme boucliers ». C’est possible, mais cela reste à vérifier puisqu’aucun observateur indépendant n’est en mesure de confirmer cette information.
Cette carte anglophone est très utile pour comprendre la position stratégique de Diabaly
Apparemment, ces derniers jours, ce sont les combattants arabes, de la nébuleuse que l’on désigne commodément sous le dénominatif d’AQMI, qui ont renforcé les Touaregs islamistes d’Ansar Dine ; des jihadistes encore plus aguerris et d’une résistance notable face au feu français, ce qui a étonné jusqu’à l’état-major à Paris. Si on ajoute que ces bandes armées sont familiarisées depuis longtemps avec le terrain sur lequel elles évoluent, sans oublier leur souplesse d’engagement, on peut mesurer le degré de difficulté que rencontrent en ce moment nos troupes à leur contact, sans hélicoptères d’assaut Tigre, ni drones, ni appui d’artillerie tactique de type mortiers de 120.
Les frappes aériennes n’ont pas cessé de la journée. Guidée par un Bréguet Atlantique-II (comme les troupes au sol), l’aviation française a détruit des « véhicules blindés », dans la nuit et ce matin, dans le « fuseau Ouest » (nord de Diabaly). Il s’agit pour l’essentiel de matériels récupérés par les combattants islamistes à Gao ou dans une autre ville de garnison capturée à partir d’avril dernier, parmi lesquels des BRDM-2 et des BTR-60PB. Plusieurs pick-up surmontés de lance-roquettes multiples de 122 et 107 mm bricolés par les ex-insurgés libyens figurent aussi au tableau de chasse des pilotes de Rafale et Mirage 2000D.
Plus en arrière de Diabaly, le bourg de Markala, juste au nord de Ségou, a été transformé en base logistique avancée pour les troupes au sol, avec un poste de secours (VAB sanitaire). Pour l’heure, on ne nous signale aucune perte du côté français.
Les hélicoptères Tigre sont à Bamako, ils devraient être opérationnels au plus tôt demain ou après-demain, comme les drones de surveillance Harfang. Devant la situation plus difficile que prévue, des renforts en troupes seraient attendus de métropole pour les prochains jours, si le ministère de la Défense leur déniche assez de transports aériens.
L’info sur place continue d’être verrouillée : l’accès aux abords de la ligne de front est toujours interdit à la presse internationale. Pour des raisons de sécurité, affirme-t-on sur place… En fait, Paris comme Bamako tentent de minimiser le fait que cette ligne de front est fluctuante et sans doute encore très perméable à d’éventuelles infiltrations de katiba jihadistes. Et sans doute cherchent-ils à contrôler l’information au maximum. De nombreux check-points ont été mis en place entre Ségou et Mopti-Sévaré, avec contrôle des véhicules et des personnes par l’armée malienne. A défaut de pouvoir se battre avec efficacité, les militaires maliens savent faire la police sur ordre de… Paris !
(1) Information démentie, ce soir, par le ministère de la Défense à Paris. Au lecteur de juger par lui-même la valeur de ce type de démenti tardif…