Je poursuis dans le cadre de cet article, ce que j'ai nommé l'inventaire, c'est à dire l'état des lieux. Il s'agit donc dans le cas présent d'étudier la notion de «Système » dont j'estime qu'elle est très majoritairement mécomprise.
Le système n'est nullement limité à ce que l'on a coutume d'appeler l'umps. Ce n'est pas que je veuille préciser par là que ce système ne s'étend pas que sur le segment politique dont les bornes sont l'ump et le parti socialiste, englobant toutes les structures entre les deux, même si cela me semble vrai. C'est que le Système est bien autre et cela est beaucoup plus grave, qu'une simple adhésion à un modèle politico-économique donné.
Opposant radical, au même titre que le fut en son temps le baron, je n'hésite pas à prôner l'alliance objective avec des forces qui, à l'évidence, ne partage pas ma doxa. Si l'on croit par exemple que plus on va vers la gauche ou à droite, plus ce qu'on y trouve est mauvais, on accepte alors la structuration générale politique – son référentiel - du Système. C'est en effet lui qui pose que le monde politique est un segment, donc linéaire, l'extrême droite au sens topologique du terme étant la plus éloignée de l'extrême gauche topologique. Après tout, pourquoi avoir dans sa forme, attendu l'élection de François Hollande pour proclamer le slogan « Ce n'est pas mon président ? » Faisons donc plutôt nôtre la représentation de Jean-Pierre Faye (1) qui est celle du fer à cheval. Imaginons donc plutôt l'idée du cercle. Dans une telle représentation, en posant que la structure actuelle s'établit entre 0 degré et Pi, c'est à dire la demie partie supérieure du disque, fatalement les opposants les plus radicaux se situent à l'angle 3 Pi sur 2, l'extrême droite par valeur inférieure, l'extrême gauche supérieure, mais l'une et l'autre très proche.
Cette opposition radicale - s'il y a le baron, il y a aussi Franco Freda – me conduit encore à avoir des contacts, presque toujours téléphoniques, avec des militants de l'extrême gauche topologique. C'est ainsi que ces derniers mois, j'ai eu deux contacts avec deux militantes d'extrême gauche. Dans les deux cas, j'eus le même constat désespérant. Tant que la conversation était d'ordre politique, j'avais droit au même son de cloche. Anticapitalisme bon teint. Dès lors où la conversation portait sur un autre sujet, c'était avec des libérales que je conversais, imprégnées qu'elles étaient du Système. Attention, ces militantes sont cartées à l'extrême gauche, sont sincères dans leur engagement, votent à l'extrême gauche, distribuent des tracts et collent des affiches d'extrême gauche. Pourtant, elles n'en sont pas moins du Système, imprégnées qu'elles en sont. L'erreur bien sur serait de considérer que l'extrême gauche soit une émanation du Système (en quoi Action directe est du Système ?). Erreur que commet aussi la doxa communiste en postulant que toujours, l'extrême droite n'est que la partie la plus en pointe du Système, c'est à dire pour eux du Capital. Rappelons que pour invalider une proposition, il suffit de trouver un contre-exemple. Je l'ai et vous le donne. Drieu, dans la lettre explicitant son suicide, souhaitant bonne chance et succès à Staline. A moins de considérer que Staline est un représentant du Capital – il y en a et la pudeur nous invite à ne pas les juger – force est de constater que Drieu ne peut être assimilé à un agent du Capital. Simplement, parce que opposant radical, Drieu est plus proche de Staline, que de n'importe quel homme politique du monde demo-libéral.
La notion de « Système » ne doit pas être limité au Système ou à ses opposants. Par exemple, on sait que les catholiques en France votent à hauteur de 80% à droite. On sait aussi que pour beaucoup d'entre eux, ils apprécient Nicolas Sarkozy et par exemple, sa dénonciation de 68, et particulièrement du «jouir sans entraves». On sait aussi que les sociologues des religions considèrent, études à l'appui, que seulement 3% des catholiques sont … catholiques. Les catholiques, à commencer par ceux qui vont à la messe tous les dimanches, ne se confessent plus, malgré les appels répétés du Vatican. Bien sur, la confession n'est pas drôle et ce n'est pas jouissant. C'est donc jouir que de ne pas aller se confesser. On sait aussi l'opposition du Vatican aux pratiques de contraception. Très jouissif que d'utiliser ces moyens. Et on sait très bien que la majorité des catholiques les utilisent: là encore, jouir. En revanche, dans les familles authentiquement catholiques, il y a six, huit, dix enfants. Même constat au sujet des exigences du Carême, seule période – courte – où l'on doit se contenir – c'est à dire ne pas jouir – en s'imposant des contraintes alimentaires. A l'évidence, c'est à dire à la lecture des analyses chiffrées, la quasi des catholiques, préfèrent à l'évidence, jouir. Pourtant ces catholiques jouisseurs se réclament du Catholicisme et de la condamnation du « jouir sans entraves ». Et en plus, ils sont sincères...
Ces catholiques, que l'on pourrait croire épargnés parce que catholiques, le Système étant dans son fondement majeur, viscéralement anticatholique, sont eux aussi atteints par le Système. Pas différemment des deux militantes d'extrême gauche qui sont représentatives de l'ensemble. A l'image de la demeure rongée par les termites, si l'ensemble de prime abord semble préservé, tout l'intérieur est atteint. Et bien évidemment, ce n'est pas l'apparence saine qu'il faut retenir, mais bien l'intérieur contaminé. D'où la tragédie que connaît le Vatican: se trouver à la tête de catholiques européens non catholiques, se réclamant, et de bonne foi, du Catholicisme. Voilà qui explique que l'Eglise ait fait une croix sur l'Europe. Voilà aussi le pourquoi des tentatives multiples de Benoît XVI pour ramener dans l'Eglise, traditionalistes et intégristes qui, s'ils sont certes des enfants terribles, n'en sont pas moins eux, authentiquement catholiques.
On comprend dès lors qu'il ne s'agit pas tant de politique lorsqu'on évoque la notion de Système, que d'une mue psychologique qui touche les Français en particulier et les Européens plus généralement. Et c'est beaucoup plus grave et bien sur pernicieux. Après tout, n'était-ce pas jouir, Monsieur Nicolas Sarkozy, que de s'augmenter de 140%, ce à peine avoir été élu ? Le dénonciateur du « jouir sans entraves » est un … jouisseur. N'allez pas croire que l'ancien président ait menti sur le sujet: il est totalement convaincu, sincère qu'il est, d'être totalement opposé à la pensée de 1968. Et bien sur, il se trompe. Etre sincère ne signifie pas nécessairement être dans le vrai.
Ce que je viens de faire pour les militants d'extrême gauche - pas tous, Dieu merci ! - pour les catholiques - pas tous, Dieu merci ! - peut être extrapolé à la plupart des autres catégories, à commencer par celles dont on pourrait croire qu'elles sont d'opposition au Système. A titre d'exemple, quel est le pourcentage d'écologistes authentiques ? Infinitésimal. S'il faut être courageux pour porter un gros badge représentant une croix gammée lorsqu'on est dans la rue – imaginez la haine dont on est alors l'objet – je sais très bien par expérience que la majorité d'entre eux sont eux aussi termités. Là encore, ils sont, tout comme les catholiques, tout comme les militants d'extrême gauche, sincères et croient être véritablement nationaux-socialistes.
N'ont survécu au Système, que ceux que le baron qualifiée de « personnalité différenciée ». Ainsi par exemple pour évoquer la littérature et le théâtre, le personnage principal du « meilleur de mondes » ou de « Rhinocéros ».
Serons étudiés dans l'article suivant qui poursuivra la série «devoir d'inventaire», le fait que Marx soit passé à côté de l'essentiel (on verra que vivant à son époque, il ne pouvait savoir. Il n'a donc pas compris le capitalisme.) et le pourquoi de la réussite du Système, sa clef de voûte n'ayant pas encore été nommée et analysée. Cette clef sera communiquée.
Alain Rebours http://www.voxnr.com/