Un magistrat témoigne pour Le Salon Beige :
"Il est beaucoup question ces temps-ci de l’indépendance du Procureur de la République ou Parquet ou Ministère Public par rapport au Ministre de la Justice ou Garde des Sceaux.
En effet le Parlement a définitivement adopté le 16 juillet un projet de loi en ce sens, qui dit renforcer l’autonomie du Parquet. Le Ministère de la Justice déclare dans un communiqué :
« Lors de la campagne présidentielle, François Hollande s'était engagé, s'il était élu, à assurer aux décisions de Justice une « impartialité insoupçonnable ». C’est désormais chose faite, le Parlement a adopté la loi relative aux attributions du Garde des sceaux et des parquets en matière de politique pénale et d'action publique. Après deux lectures à l'Assemblée nationale et au Sénat, le projet de loi a été définitivement adopté le 16 juillet 2013. Christiane TAUBIRA, garde des Sceaux, ministre de la justice l’avait affirmé : « Ce texte vise à éradiquer et à déraciner la suspicion qui a trop longtemps pesé sur la Justice pour que les citoyens, notamment des plus vulnérables, retrouvent confiance dans l'institution judiciaire ».
Il ne faut pas se méprendre sur ce qui n’est qu’une illusion.
Le Procureur de la République et le Ministre de la Justice sont depuis toujours les doigts d’une même main que l’on ne sépare pas par un coup de communication politique. Une loi, quelle que soit l’intention de ses auteurs, ne supprime pas brusquement l’habitude des Parquets d’en référer au Ministre et d’attendre des instructions de lui ou de ses services. Il faut une véritable révolution culturelle.
Le texte voté prévoit simplement que le Procureur de la République ne pourra plus recevoir des instructions écrites du Ministre en matière de politique pénale. Il n’y a là rien de révolutionnaire, car de telles instructions sont très rares en pratique.
Le texte ne dit rien sur les instructions ou recommandations orales, qui sont monnaie courante et subsisteront. Chassez le naturel, il revient au galop.
Le Ministre de la Justice pourra continuer à donner des instructions par voie de circulaires en principe générales mais qui pourront aller dans les détails.
Les événements récents lors des manifestations antimariage gay ont démontré plus que suffisamment que le Procureur de la République n’avait guère d’indépendance vis-à-vis de son ministre de tutelle et de celui de l’Intérieur.
En tant que magistrat judiciaire il est garant des libertés individuelles et collectives, et doit veiller à leur respect par la police et la gendarmerie. À ce titre il lui incombe de contrôler les gardes à vue, qui sont des mesures de sûreté destinées seulement à garantir le bon déroulement d’enquêtes judiciaires.
Or nous avons assisté ces derniers mois à de nombreuses interpellations et gardes à vue injustifiées et seulement punitives décidées par des officiers de police judiciaire ou des magistrats du Parquet à l’encontre de manifestants de LMPT et des veilleurs. Nul doute que les ordres venaient d’en haut, de Paris Place Vendôme et Place Beauvau.
La police d’opinion est là.
Indépendance du Procureur de la République où es-tu ?"