Dans Minute :
"L'’élection présidentielle a donc eu lieu au Mali à la date fixée par François Hollande. Et tout s’est très très très bien déroulé, dixit Jean-Marc Ayrault, qui, depuis la Malaisie, s’est « félicité que les élections au Mali se soient passées dans de bonnes conditions » et que « le processus démocratique ait été respecté ». « Pour la France, a enchaîné le premier ministre, c’est un grand succès. Pour l’image de la France dans le monde aussi, c’est un plus considérable, qui a été perçu dans le monde entier. »
La preuve, est-on tenté d’ajouter, c’est le candidat choisi par le pouvoir en place et par la France, Ibrahim Boubakar Keita, qui a gagné… Le succès de ce scrutin a été tel qu’on note étrangement de fortes disparités dans les taux de participation : très forte mobilisation dans la région de Bamako, la capitale, qui est « sous contrôle », et participation quasi inexistante à Kidal, au nord-est du pays, de l’ordre de 12 %. Dans ce bastion touareg, entre les morts, les exilés et les habitants terrés chez eux par peur des représailles que mènent les partisans du régime, il ne restait pas grand monde pour aller aux urnes.
A la terreur des jihadistes, qui se sont retirés pour mieux revenir quand la France sera partie, a succédé en effet une terreur « loyaliste » qui n’a rien à lui envier. Au jour de l’élection, le 28 juillet, il restait au moins 200 000 réfugiés maliens dans les pays limitrophes ! Et près de 400 000 Maliens « déplacés » à l’intérieur du pays, qui n’ont pas pu voter non plus.
La palme du « foutage de gueule » revient à Tiéman Coulibaly, ministre malien des Affaires étrangères, qui, tranquillou, avait assuré : « Les élections seront crédibles et transparentes dans les conditions qui sont les nôtres » ! Quand un ministre africain s’essaye à la langue de bois, c’est juste magique ! En France, où résident 200 000 Maliens – une paille… –, ceux qui ont pu voter ont eu beaucoup de chance. Les cartes d’électeurs n’étaient pas arrivées – au Mali non plus… –, les listes d’inscrits confondaient nom et prénom – et n’étaient pas classées par ordre alphabétique ! –, les urnes avaient été oubliées, le bureau de vote avait changé de place, etc.
Pour l’anecdote, l’AFP rapporte le cas caricatural d’un Malien rencontré en banlieue parisienne et qui venait de voir le nom de sa tante sur une liste électorale : « Comment ça se fait, elle vit au Mali ! Et moi qui suis ici, je ne peux pas voter ! » Comme disait Ibrahim Boubakar Keita à deux jours du scrutin : « J’ai rarement senti une telle fusion avec le peuple du Mali, une telle communion. » Comme il se prend pour De Gaulle, on souhaite bien du plaisir aux Maliens…"