L’affaiblissement de la puissance américaine, le délitement de l’Union européenne et le retour de la Russie sur la scène internationale redessinent la géopolitique du monde. Un nouveau paradigme dans lequel la France peine à trouver sa place.
Atlantico : Après avoir un temps cru à l’émergence d’une démocratie modèle en Ukraine, les chancelleries européennes et américaines semblent avoir été prises de court par la diplomatie de Moscou et les mouvements dans l’Est du pays. En quoi l’engagement de l’Occident a-t-il pu reposer sur un malentendu ?
Emmanuel Todd : Lorsque je repense à cette crise, je m’étonne de voir qu’elle ne s’inscrit pas dans la logique qui était en train de se dessiner en Europe jusqu’ici. Le début du XXIe siècle avait été marqué par un rapprochement des “Européens” et des Russes, avec l’établissement de positions communes assez fortes dans des moments de crise. On se souvient de la conférence de Troyes en 2003, où Chirac, Poutine et Schroeder avaient manifesté ensemble leurs refus de l’intervention américaine en Irak. Cet événement laissait l’impression d’un Vieux Continent évoluant globalement vers la paix tandis que l’Amérique de Georges W.
Bush, fidèle à la ligne Brzezinski, restait dans un esprit de confrontation à l’égard de Moscou en s’appuyant sur d’anciens satellites soviétiques, avec les Pays baltes et la Pologne comme partenaires anti-russes privilégiés. [...]
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