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La nocivité de l’impôt sur les successions

Alors que les élections présidentielles approchent, la question de la fiscalité constitue l'un des sujets importants dont il faut débattre. Les différents candidats, de Mélenchon à Le Pen, en passant par Hamon, Macron et Fillon, ne remettent pas en cause, en tout cas les droits de succession et rien dans leurs programmes, ne laisse apparaître quelque assouplissement significatif dans ce domaine. Mous le savons, la fiscalité a été utilisée depuis Longtemps à des fins idéologiques, bien plus qu'au financement des fonctions régaliennes de l’État. Or la fiscalité a pour but de financer l'État et les pouvoirs publics. Mais elle a pour caractéristiques d'être prélevée de force et, de ce fait, constitue une violence faite à la personne. Pour cette raison, elle nécessite d'obtenir le consentement des personnes. Cet impératif de consentement a d'ailleurs toujours été à l'origine de la création d'assemblées, et plus largement du système parlementaire. Tel a été historiquement le rôle premier de ces dernières. La Grande Charte de 1214 en Angleterre avait cette origine : les féodaux devaient consentir à l'impôt décidé par le roi. Sous l'Ancien Régime, en France, la réunion des États généraux avait pour objectif premier l’établissement de la fiscalité et c'est parce que la royauté était en difficultés budgétaires que la décision fut prise de convoquer les États généraux en 1789. Il est évident que le système démocratique que nous subissons ne permet pas aux populations d'exprimer leur consentement, sauf à dire qu'en absence de révolte et de révolution aboutissant au renversement d'un régime qui, à défaut de bien gouverner sait bien se défendre, le dit consentement est obtenu. Et que dire des fiscalités locales dépendant de potentats locaux soucieux de préserver leur clientélisme

Qu’est qu’une fiscalité juste ?

Mais indépendamment de ce consentement ? la fiscalité doit être juste. Pour cela, elle doit, au préalable correspondre au juste État, c'est-à-dire à l'État conçu subsidiairement, celui chargé du bien commun national, bien supérieur, dans les tâches qu’il est seul à pouvoir effectuer à l'exclusion de toutes les parties constitutives de l'ensemble et qui sont sa raison d'être.

Cela limite par nature l'ampleur de la taxation fiscale. Le fonctionnement économique d'une nation, d'où découlent les moyens de sa puissance, repose sur sa capacité à produire des richesses réelles, à accumuler du capital productif, à développer l'esprit d'entreprise et d'invention ou à lui permettre de s'épanouir librement.

La Richesse nationale dépend de celle des familles, des personnes, ce qui suppose que celles-ci doivent disposer librement de leurs biens et bénéficier de la sécurité relative à leur propriété.

Néanmoins, dans l'interaction permanente liant les parties et le Tout, il est clair que les parties doivent une contribution au Tout sans lequel elles ne seraient pas.

Mais compte tenu de la définition subsidiaire - ou de suppléance - de l'État retenue, l'impôt ne doit porter que sur le subsidiaire, que sur ce que le Tout est seul capable d'assurer pour le plus grand bien des parties, la forme du Tout, identifié à la nation, étant l’État.

En ce sens, l'impôt ne doit avoir pour objectif que d'assurer le financement des pouvoirs publics exerçant leur fonction subsidiaire ou fonction de suppléance.

Dans la mesure où tout prélèvement par voie d'autorité a un effet perturbateur sur l'économie, un système fiscal efficient doit drainer les fonds souhaités en ayant une incidence aussi faible que possible sur les modes de production, d'accumulation et de consommation. Il en résulte que l'impôt se trouve dès lors dévoyé de sa raison d'être lorsqu'il est utilisé à des fins d'idéologie sociale et politique.

Lorsque l'impôt sombre dans un orgueil interventionniste, faisant en sorte que l'État se substitue aux hommes et veille à tout régenter, alors nous entrons dans un système totalitaire dont l'effet majeur est d'aboutir à l'asphyxie de la société, ce qui suffit à le rejeter. Une des causes de la ruine de Rome au IV siècle, réside dans sa fiscalité spoliatrice. En outre, cette emprise totalitaire de l'État aboutit à ne plus respecter le droit des personnes car les services d'un tel État finissent par s'immiscer dans la vie des personnes et des familles. Il se fait réformateur des mœurs, s'introduit dans la famille et la nie dans une certaine mesure : cela n'est pas fortuit car il s'agit d'une volonté conforme à l'esprit maçonnique qui veut détruire la famille, obstacle entre l'individu et l'État. Bien sûr, une telle institution naturelle consubstantielle à l'humanité ne peut être détruire immédiatement et il est nécessaire de procéder par étapes. Ce faisant, l'État maçonnique que subit la France depuis deux siècles défait ce qui est au-dessus de lui et antérieur à lui et sans lequel il n'existerait pas.

C'est ici qu'il est nécessaire de distinguer la fiscalité servant au fonctionnement de l'État et des pouvoirs publics, des questions de financement de l’assurance sociale de la nation, mais aussi de la fiscalité indirecte servant à assurer le fonctionnement de services publics comme l'entretien et le développement de la voirie qui ne constitue dans ce cas que la rémunération d'un service commercial rendu.

L’impôt sur les successions, illégitime et contre-productif

De tout cela, il apparaît qu'un impôt, l'impôt sur les successions (tout comme celui sur la fortune) est illégitime. Mais il est aussi contre-productif. C'est ce que nous devons analyser.

Le capital et le patrimoine acquis par une personne relèvent de sa propriété en tant qu'extension de sa personne, et il doit être libre d'en disposer. Ils relèvent du fruit de l'effort de celui qui lésa créés et ce dernier doit à ce titre en disposer selon sa volonté. À travers sa succession, l'être humain dispose de la possibilité de projeter l'œuvre de son existence dans l'avenir, selon ses souhaits, dans le flux de la continuité de la société qui est le fruit conjoint du passé, du présent et de l'avenir, à savoir les morts, les vivants et ceux à naître.

L'accumulation du patrimoine et plus largement du capital sur plusieurs générations est un fondement de la prospérité et du progrès dessoudâtes humaines : lorsque les sociétés sont nivelées à chaque génération, elles stagnent comme le montrent les sociétés primitives tribales régies de cette manière. Cela revient à dire qu'il est bénéfique pour les héritiers de les priver de leur héritage. Or c'est l'accumulation de capital qui favorise la prise de risques et l'innovation dans l'économie. On ne peut pas élever le niveau de vie en spoliant régulièrement les gens.

L'accumulation sert le bien commun de la communauté, garantissant l'accumulation de capital sur plusieurs années nécessaires pour lancer de grandes entreprises. C'est très souvent parce qu'il est assuré de la protection de son patrimoine dans la durée et au-delà de sa propre vie que l'être humain peut se lancer dans des œuvres de long terme, assuré qu'il est de transmettre aux générations futures les moyens d'une accumulation inter générationnelle dont il est déjà lui-même, d'une manière ou d'une autre, le bénéficiaire.

Les opposants à cette garantie de la propriété font valoir que la succession constitue, pour les héritiers, un revenu ou un bénéfice indu, qui échappe à la taxation commune. Cet argument ne tient pas lorsque le capital est imposé au titre de revenu ou encore d'impôt sur la fortune comme c'est le cas dans les présentes sociétés dites « démocratiques ».

En fait, c'est l'envie, la jalousie qui se trouvent à l'origine de la volonté de taxer les successions et les patrimoines. Les successions seraient réputées n'être pas méritées par leurs bénéficiaires. Dans une société où le désir d'égalité l'emporte, où l'envie devient le ressort inavoué - de l'action politique, tout se passe comme si la paix sociale était assurée en frappant les héritiers pour apaiser l'envie de ceux qui n'héritent pas.

Des arguments fallacieux

Quant à l'argument selon lequel les bénéficiaires des successions ne les méritent pas, faisant ainsi de l'État l'héritier naturel, il revient à légaliser le vol car l'État n'a aucun droit à s'emparer du bien des particuliers. Il nie la légitimité des souhaits du défunt de disposer de ses biens accumulés par son travail.

Invoquer « l'égalité des chances » pour spolier les héritiers d'une succession, autrement dit en dissipant les patrimoines par l'impôt, ne changera rien aux inégalités existant dans la société dans la mesure où les milieux sociaux, les pratiques familiales, les niveaux culturels étant différents d'une famille à une autre, il subsistera toujours des êtres bénéficiant d'un quelconque avantage. De même, il est impossible d'empêcher que l'écheveau des relations humaines et sociales privilégient telle ou telle personne par rapport à telle autre et favorisent la vie de l'une par rapport à l'existence de l'autre. Mais, plus encore, lorsque l'on parle d'égalité, il faut remarquer que c'est dans un monde ou l'idée de taxer les patrimoines domine, que les inégalités de fortunes se font chaque jour plus grandes et que les plus grandes fortunes acquièrent dans le pouvoir d'État une puissance qui conduit à leur inféoder cet État, le transformant en oligarchie. Or, si parmi les fonctions de l'État figure celle de protéger la propriété, il a aussi pour rôle d'empêcher que des intérêts particuliers - notamment ceux constitués par des personnes très fortunées - n'imposent leur pouvoir.

L'État invoque aussi la « capacité contributive ». À l'origine cette notion avait pour objectif d'éviter que la pression fiscale soit telle qu'elle devienne insupportable. De nos jours, elle a été inversée et signifie aujourd'hui une ponction arbitraire des revenus et des fortunes des contribuables établi en fonction unique des besoins d'un État obèse.

Il est fréquent que l'on place devant l'œil des caméras les frasques de tel riche héritier. En fait, à bien observer, ce genre de dilapidâtes du patrimoine hérité est relativement rare et nombreux sont au contraire les héritiers qui s'efforcent de faire fructifier le patrimoine reçu pour le développer et, à leur tour, ils se font les créateurs de nouvelles richesses. Dans la plupart des cas, l'héritier concourt au développement de la richesse nationale et se montre un travailleur acharné. Ajoutons que les gaspilleurs d'héritage contribuent au fonctionnement de la société par les flux financiers que leurs frasques entraînent. Les héritiers qui gaspillent les fonds hérités ne sont pas légion et leur dévergondage masque le comportement de ceux qui entretiennent et font prospérer le patrimoine qu'ils ont reçu de leurs parents et aïeux. Il est stupide décrire que les héritages diminuent la motivation et l'esprit d'entreprise de leurs bénéficiaires. Le problème social provoqué par les inégalités de fortunes relève d'une autre question : celle du partage de la richesse produite, à savoir de la part du chiffre d'affaire consacré à la rémunération de la main d'oeuvre et celle réservée aux actionnaires, aux détenteurs de capital.

Impôt inefficace

L'impôt sur les successions influe directement sur les incitations à épargner. Un impôt de spoliation qui conduit à un transfert de fortune et qui réduit la valeur en capital d'un patrimoine est contraire au développement de la prospérité générale. Cela concerne bien sûr la prospérité matérielle mais aussi la prospérité culturelle et morale. Les incitations à l'épargne et à l'accumulation du capital en vue de créer de nouvelles richesses sont diminuées puisqu'il n'y a plus moyen alors de se projeter dans le futur.

Le sordide lié à cet impôt apparaît en plus lorsqu'il s'agit d'évaluer les biens meubles dans les moindres détails et d'aboutir à ce qu'un héritier soit contraint de vendre tel ou tel objet - voire tel bien immobilier - familial pour payer la succession alors qu'un tel objet a surtout une valeur sentimentale avant d'avoir un prix marchand. L'impôt successoral se réduit alors à une transaction financière et déshumanise l'héritage pour les personnes concernées.

Cela est encore plus dommageable lorsqu'il s'agit d'une entreprise qu'il fout liquider pour payer les droits de succession lorsqu'aucune dis-position n'a été prise pour éviter une telle issue.

Dans le cas de propriétaires de châteaux, souvent au sein des familles depuis nombre de générations, l'entretien d'une telle bâtisse coûte des fortunes et grever à chaque génération cette propriété d'une taxe revient à empêcher son entretien et à aboutir à cette extrémité qui consiste à le vendre au profit souvent d'étrangers qui ont l'avantage de ne pas être soumis à un tel impôt

L'héritage est une institution de transfert de savoir et de valeurs : la propriété est étroitement liée à la responsabilité que l'héritier se met en honneur d'assumer, tout d'abord par respect du testateur et ensuite parce qu'il veut continuer son œuvre.

Le volume des recettes fiscales liées à l'impôt sur les successions est de l'ordre de 5 à 6 pour cent de l'ensemble des recettes fiscales. C'est donc marginal. Les successions n'ont donc guère d'impact sur les finances publiques. En Suisse, l'impôt sur les successions et les donations représente 1 milliard de francs soit 1,5 % de la totalité des recettes fiscales cantonales.

La propriété, base de propriété, base de la richesse économique nationale

Trois théories sont habituellement énoncées pour justifier l'impôt sur les successions :

- la théorie de la redistribution selon cette conception, la raison d'être de l'impôt sur les successions découlerait de son effet redistributif des plus riches aux moins riches.

- le droit partagé de l'État à l'héritage selon cette théorie, l'État hériterait aussi car les collectivités publiques assumeraient de plus en plus de tâches pour l'individu, lesquelles étaient assumées par les liens familiaux et non par l'État.

- la théorie de la capacité contributive : cette conception s'applique aux bénéficiaires qui sont enrichis par l'héritage. Leur capacité contributive plus élevée justifierait leur imposition si la fortune découlant d'une activité lucrative est imposée, cela devrait être encore davantage le cas pour une fortune obtenue sans peine, sinon «par hasard».

Aucune n'est satisfaisante. Nous savons que le rôle de l'impôt n'est pas de jouer au justicier. La seconde théorie se rattache à la précédente. Et les tâches sociales sont financées par les taxes et prélèvements de sécurité sociale. La théorie de la capacité contributive aurait quelque intérêt mais elle signifie une double imposition, les biens du défunt ayant déjà été imposées au cours de sa vie, soit par les taxes du type TVA, impôts fonciers etc.

En Allemagne, pour empêcher l’émigration des héritiers, il existe un impôt sur l’émigration qui essaie d'imposer les successions des ressortissants jusqu'à 5 ans après leur départ. Ainsi, un impôt amène un autre impôt et très vite à des restrictions sur la liberté de mouvement des personnes. L'héritage intégral et bien ordonné est une condition de la stabilité et de la paix sociales. Une économie prospère exige une constance de relations car elle ne peut avoir de succès qu'en opérant sur de longues périodes. L'absence de continuité mène à des dommages imprévisibles. L’économie a besoin d'un cadre excluant le recours à la violence. Cela requiert un système de garantie de la propriété.

Lorsque la jalousie, l'envie, la convoitise des biens d'autrui l'emportent sur toute autre considération, nous glissons inévitablement vers une société de spoliation mais aussi vers une société égalitaire, dû moins pour ceux qui ne peuvent ou ne savent pas échapper aux législations qui en sont inspirées. Or, du point de vue économique, les sociétés égalitaires sont des sociétés qui stagnent. Le modèle sociétal égalitaire est celui des sociétés primitives qui ne peuvent connaître aucun progrès économique car il n'y a pas de possibilité d'accumuler quelque capital qui permettra à ses détenteurs d'assurer la création d'activités économiques importantes, d'activités entrepreneuriales. Cela, d'autant plus que celui qui réussirait quelque affaire se verrait aussitôt privé du fruit de son travail, il est donc économiquement improductif, destructeur de développer une telle fiscalité de spoliation. C’est contraire à l'intérêt bien compris d'une nation.

Mais cet impôt relève d'un postulat celui selon lequel l’État est propriétaire de tous les biens et ne les accorde à ses ressortissants qu'à titre d'usufruit. C'est l'inversion et la perversion de l'ordre naturel. Pour conclure présentement, l'impôt sur les successions est la négation du droit de propriété, faisant en sorte que ce qui est réputé vous appartenir de votre vivant appartient en fait à l’État, votre mort étant le révélateur de cette réalité. Certes, si la propriété appelle des droits, elle fait naître des devoirs et la puissance publique ne peut pas ignorer le comportement de propriétaires qui détruiraient ou aliéneraient irrémédiablement des patrimoines d'importance nationale.

Mais avec la spoliation des patrimoines, il se produit une rupture de transmission dans la chaîne des générations. Ainsi, l'impôt sur les successions - comme l'ISF qui relève du même procès - traduit la volonté de l’État de déposséder les gens, lentement, mais sûrement, en quelques générations. Les loges maçonniques en sont à l'origine. Un Jean Jacques Servan-Schreiber disait dans les années 1970 qu'un patrimoine devait être liquidé en trois générations.

Dans l'intérêt de chaque nation, il faut préserver la propriété qui est le fondement de la stabilité d'une société et adopter une fiscalité qui consolide ce fondement au lieu de le détruire.

André Gandillon, Président des Amis de Rivarol - Rivarol du 27 avril 2017

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