Emmanuel Macron a promu d’anciens harkis et des représentants d’associations dans l’ordre de la Légion d’honneur ou dans l’ordre national du Mérite. Après la reconnaissance de la responsabilité de la France dans la disparition, en 1957, de Maurice Audin, mathématicien communiste, militant de l’indépendance de l’Algérie, le président de la République, fidèle à son principe du « et en même temps » et soucieux de pallier sa baisse de popularité, a décidé d’honorer les harkis, qui avaient combattu dans les rangs de l’armée française. Comme l’a dit, ce matin, un de leurs représentants sur France Info, cela vient un peu tard !
Ces promotions interviennent quelques jours avant la Journée nationale d’hommage aux harkis, prévue pour le 25 septembre. Cette journée, instituée par le décret du 31 mars 2003, « en reconnaissance des sacrifices consentis du fait de leur engagement au service de la France lors de la guerre d’Algérie », est sans doute mieux que rien – même si elle n’est pas électoralement désintéressée. Mais suffit-elle à faire toute la lumière sur les conditions dans lesquelles le gouvernement de l’époque a mis fin à l’Algérie française, sans se préoccuper du sort des harkis ?
Emmanuel Macron, après avoir satisfait la gauche et les autorités algériennes en qualifiant la colonisation de « crime contre l’humanité » et en présentant ses excuses à la veuve de Maurice Audin, fait un geste en direction de la droite nationale, des pieds-noirs contraints à l’exode et de tous ces supplétifs de l’armée française qui ont été abandonnés après les prétendus « accords d’Évian ». Jusqu’à présent, pas le moindre mot de compassion pour les victimes des attentats terroristes du FLN, pour les Oranais tués, disparus ou enlevés, le 5 juillet 1962, ni pour les harkis abandonnés au massacre, suppliciés et torturés, alors que l’armée française avait reçu l’ordre de ne pas intervenir.
Il faut expliquer pourquoi, alors que les troupes du FLN étaient vaincues, le gouvernement de l’époque a choisi de livrer l’Algérie aux indépendantistes minoritaires. Il faut expliquer pourquoi des généraux, qui s’étaient souvent illustrés dans la Résistance, pourquoi des officiers, des sous-officiers ou de simples soldats se sont rebellés contre le pouvoir en place, au nom du respect de la parole donnée. Il faut comprendre pourquoi des personnalités comme Georges Bidault, Jacques Soustelle et bien d’autres encore se sont ralliées au combat pour l’Algérie française.
Il faut que les gaullistes admettent la duplicité du général de Gaulle, qui s’est servi de la guerre d’Algérie pour revenir au pouvoir. Il a déclaré à Alger, devant la foule réunie : « Je vous ai compris. » Il a ajouté qu’il n’y avait plus, en Algérie, que « des Français à part entière, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs », puis il s’est empressé de faire tout le contraire. À chacun de juger où était l’honneur, où était le cynisme.
Il ne s’agit pas de cultiver la nostalgie d’une Algérie française, qui aurait pu connaître un autre destin. Ni d’exiger une revanche mémorielle ou d’imposer une nouvelle repentance. Mais, plus de cinquante ans après ces événements, il est temps de faire toute la lumière. C’est le rôle des chercheurs de tenter d’appréhender la vérité. Sans a priori et sans préjugés. Quand on sait que l’historien quasi officiel de cette guerre, proche de Macron, est un ancien trotskiste, longtemps membre de l’Organisation communiste internationaliste, on peut légitimement s’interroger sur l’objectivité de sa vision de l’Histoire.