Emmanuel Macron – c’était louable – entendait renouer avec la verticalité du pouvoir, malgré son jeune âge. D’ailleurs, Louis XIV, au début de son règne, n’était pas non plus le faisan de l’année. Avec l’affaire Michèle Marchand se profilant à l’horizon, ce serait plutôt le retour à l’horizontalité des pratiques d’antan, personnalité de cette nouvelle Athénaïs de Montespan oblige.
En effet, après l’affaire Benalla, Mimi, titre du livre éponyme, signé Marc Leplongeon et Jean-Michel Décugis, respectivement journalistes au Point et au Parisien, annoncé pour le 17 octobre prochain, le temps pourrait durablement se couvrir au Château. Mais qui est « Mimi », dame de 71 ans, qui gère la communication présidentielle depuis plus d’un an ?
À en croire Le Point, « Michèle Marchand, fille de coiffeurs de Vincennes, a été gérante d’un garage du VIIIe arrondissement parisien, femme de voyou et directrice d’un magazine pour amateurs d’armes. En 1986, elle est condamnée à quatre mois de prison avec sursis pour émission de chèques sans provision. Au début des années 1990, elle tient des boîtes de nuit lesbiennes rue de Ponthieu ou porte Maillot, où l’on croise Muriel Robin et Pierre Palmade, des malfrats et des flics dont elle est l’indic. » Il est un fait qu’à ce palmarès comparé, Alexandre Benalla, c’est un peu Bernard Menez, l’imparable caïd des films de Pascal Thomas.
La carrière de Michèle Marchand ne s’arrête évidemment pas là. Toujours selon les mêmes sources : « Après un retour à la case prison en 1994 pour trafic de cannabis, elle entre à Voici et, déjà grand-mère, y fait une OPA. Virée pour avoir inventé une interview d’un garde du corps de Lady Di, elle reste rédactrice en chef officieuse, tant elle est indispensable. » Mieux que Voici, nous y voilà. Michèle Marchand, à la tête de Bestimage, la société qu’elle fonde dans la foulée, est alors l’une des pipelettes les mieux informées de France. Mais comment expliquer, ensuite, son voisinage de plus en plus intime avec la sphère politique ? Tout simplement parce que les grands de ce monde sont les plus avides des commérages du demi-monde. Qui couche avec qui ? Tel homme est-il véritablement porté sur les femmes, malgré les apparences ? À l’instar des rois de jadis, nos Présidents aiment savoir ce genre de choses ; surtout quand elles peuvent les toucher de près.
Et c’est ainsi que « Mimi » désamorce les rumeurs parfaitement infondées et relatives à l’homosexualité présumée d’Emmanuel Macron. C’est encore la même qui, sachant tout des liens unissant François Hollande et Julie Gayet, ne fait rien pour empêcher la révélation de cette affaire. Interrogé par les auteurs de ce livre, le prédécesseur de Macron reconnaît : « Vous ne pouvez pas avoir à l’Élysée quelqu’un dont le métier est de faire de la révélation privée. » Étrange mélange des genres, donc. Mais qui s’explique aussi par l’antédiluvienne propension des gens de pouvoir à fricoter avec des personnages qui ne sont pas toujours des enfants de chœur.
François Mitterrand et Bernard Tapie, Dominique de Villepin et Alexandre Djouri, Valéry Giscard d’Estaing et Michel Poniatowski, Napoléon et Fouché, Nicolas Sarkozy et Patrick Balkany, quoi de commun ? Si ce n’est l’odeur un peu soufrée de la transgression et de l’encanaillement.
Dans le registre, Michèle Marchand est d’autant plus imbattable que rusée comme un régiment de fouines. Elle sait d’où vient le souffle dominant et, surtout, jusqu’où il peut la porter. D’où des amitiés politico-médiatiques soigneusement mises en scène. Cyril Hanouna, toujours à en croire Le Point, l’appelle sa « deuxième maman », tandis que « Marc-Olivier Fogiel, qui vient de publier un livre sur ses deux filles nées d’une GPA, la remercie pour avoir veillé à ce que son intimité ne devienne pas publique ». Comme madame Mado, la mère-maquerelle des Tontons flingueurs, madame Mimi sait protéger ses arrières.
On ne lui en voudra pas, tant tout cela relève de « l’ancien monde ». Le problème, c’est qu’un certain Emmanuel Macron s’est hissé à la plus haute marche du podium en voulant abattre ce dernier et en proposer un « nouveau ». Il fallait être aussi naïf qu’un Philippe de Villiers ou la quasi-majorité du troupeau de l’électorat conservateur pour ne pas voir que notre Saint Louis en devenir était, par nature, programmé pour finir comme Paul Deschanel.