Le sondage Elabe pour BFMTV publié hier confirmerait une embellie pour la liste LREM/MoDem aux élections européennes qui retrouverait le score d’Emmanuel Macron au premier tour de la présidentielle (23,5%). En seconde position, le Rassemblement National est crédité de 20,5%, loin devant LR (12,5%), LFI (9,5%), EELV (9%), le PS (6%), DLF (5%) ,le PC (2%), Les Patriotes (1,5%)… BFM précise sur son site que l’enquête a été publié avant l’annonce du lancement d’une liste de “Gilets Jaunes”, menée Ingrid Levavasseur. Le sondage émettait cependant l’hypothèse d’une telle liste, qui pénaliserait principalement le Rassemblement National, puisque dans ce cas de figure LREM arriverait en tête avec 22,5% des suffrages, le RN à 17,5%, la liste GJ à 13%, LR à 11,5%… « Pour comprendre les bons augures autour des listes LaRem/MoDem et EELV, qui enregistrent les gains les plus nets, il faut examiner l’intérêt suscité par le rendez-vous électoral. Et il est encore bien limité, avec 53% de Français se disant intéressés (…). De plus, les électorats les plus pro-Union européenne, bien qu’avec certaines réserves parfois, concentrent l’essentiel de ces concitoyens enthousiastes à l’idée de se rendre dans l’isoloir (…). Les électorats les plus partagés quant à la marche des institutions européennes sont aussi les moins enclins à se passionner pour le sujet. La perspective de l’élection n’éveille l’intérêt que de 51% des électeurs de Jean-Luc Mélenchon et 55% de ceux de Marine Le Pen. Dans la population, ce sont les jeunes et les classes populaires qui s’annoncent les moins intéressés, avec des seuils respectifs de 41% et 42%. Les cadres et les classes moyennes envisagent bien davantage le vote, avec 69% d’intéressés dans le premier cas, et 56% dans le second. »
Un constat factuel auquel l’analyse de sondage ajoute les thèmes de campagne plébiscités par les sondés : « le réchauffement climatique » est cité par 37%. De quoi réjouir les participants au très controversé Forum de Davos qui a mis largement en avant les questions environnementales. Mais faites ce que je dis et pas ce que fais: l’Afp rapportait que 1500 jets privés ont acheminé les happy few, 200 de plus que l’année dernière… Les autres thématiques arrivant en tête sont « La maîtrise des flux migratoires » et « la lutte contre le terrorisme » (tous deux à 34% ), « la lutte contre le chômage et la croissance économique » ( 33%) , « la lutte contre la fraude fiscale » (28%)…
Alexandre Jardin ou encore Francis Lalanne ont émis chacun de leur côté le souhait de mettre sur pied une liste de GJ aux élections européennes, mais l’annonce la plus concrète de sa mise sur pied a donc été faite par Ingrid Levavasseur sous l’appellation consensuelle du RIC « Ralliement d’initiative citoyenne», sigle faisant bien évidemment référence à celui du Référendum d’Initiative citoyenne. Les premiers noms annoncés pour figurer sur cette liste n’ont pas été accueillis avec enthousiasme par les GJ sur les réseaux sociaux, et c’est un euphémisme. Fdesouche rapportait le passif européiste et immigrationniste de plusieurs d’entre eux, en tant qu’anciens du PS (Hayk Shahinyan). de l’UDI, (Brigitte Lapeyronie) ou même comme Marc Doyer tout récent candidat à l’investiture LREM aux européennes !
La constitution d’une ou de listes de GJ était un souhait exprimé de longue date par la macronie, notamment par Richard Ferrand avec la commande à la clé mi-décembre d’un sondage IPSOS pour donner de la visibilité à cette hypothèse. Une enquête qui créditait déjà une liste de GJ de 12% des intentions de vote. « Qu’ils (les gilets jaunes, NDLR) s’organisent, qu’ils fassent une plateforme de propositions et qu’ils aillent aux élections européennes, par exemple (sic) puisque c’est la prochaine échéance» déclarait-il sur France 3 le 16 décembre. Invité sur France 2 ce matin, le député LR Bruno Retailleau s’est lui aussi réjoui de cette liste (« C’est le jeu de la démocratie, je les félicite, je les encourage », tout comme le chef de file des députés LR, Christian Jacob, sur CNews qui a repris les mêmes arguments que M. Ferrand : « c’est une bonne initiative, à partir du moment où on se revendique au nom du peuple, et c’est ce que font les gilets jaunes qui disent: nous sommes le peuple, hé bien il faut accepter de s’y soumettre, c’est la règle de la démocratie; »
Le 18 décembre, RT relayait les témoignages de Gilets Jaunes sur l’hypothèse d’une liste aux européennes : « c’est exactement ce que veulent Macron et l’oligarchie, pour affaiblir leurs opposants !»; « la pire erreur des Gilets Jaunes serait de se constituer en parti politique. C’est l’ultime erreur qui va les enfoncer et arranger le pouvoir. Plus ils conserveront leur caractère apolitique et protéiforme mieux ils constitueront une menace contre le régime »; « pourquoi tout le monde insiste tant que que les Gilets Jaunes constituent une liste européenne ? Tout simplement parce que ceux qui voteront GJ ne voteront pas pour la FI ou le RN, permettant ainsi LREM de garder le leadership ! »… « L ‘avantage d’une telle liste ne fait aucun doute pour les têtes pensantes de la majorité ne s’y trompent pas, à l’image du président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand (…). Dans les colonnes du Monde, un cadre du parti ne s’embarrasse même plus de l’argument de la démocratie : Ce serait la meilleure chose qui pourrait nous arriver.»
Michel Geoffroy relevait sur Polemia le 13 janvier que le mouvement des GJ est « clairement politique même s’il s’affirme non partisan : quoi de plus politique en effet que la question de l’impôt ou de la représentation du peuple ? A-t-on oublié que la réunion des Etats Généraux en 1789 a achoppé sur ces deux questions ? »« Mais les revendications des Gilets Jaunes sont multiples, pour ne pas dire brouillonnes tout en étant incomplètes : car elles font curieusement l’impasse sur les questions sécuritaires ou relatives à l’immigration, par exemple, qui pourtant concernent aussi la France périphérique. Pour devenir un mouvement crédible, il fallait les mettre en ordre, les hiérarchiser et les replacer dans un cadre politique cohérent. Bref avoir une ambition et un programme (…)Les Gilets Jaunes ont beau crier Macron Démission ou réclamer le référendum d’initiative citoyenne (RIC) sur l’air des lampions. Cela ne suffit pas à créer une nouvelle dynamique politique dans la France de 2019. » « Dans un tel contexte, la perspective de créer un parti des Gilets Jaunes pour les élections européennes ne peut déboucher en outre que sur un score ridicule et profiter en réalité à Emmanuel Macron, en fractionnant un peu plus l’opposition à sa politique. Comme l’écrivait Lénine dans son célèbre essai La Maladie infantile du communisme : Sans théorie révolutionnaire pas de mouvement révolutionnaire. Le constat, qui remonte à 1920, reste valable. »
Le mouvement des GJ ajouterons-nous, est l’expression d’un peuple se réappropriant le champ politique, qui prend conscience de ses intérêts communs, d’une commune volonté de rupture avec leSystème oligarchique, la Caste, mais certainement pas un parti politique. Ce qui fait sa force (son hétérogénéité, le côté protéiforme de ses revendications, son absence de leaders, de hiérarchie, toutes choses soulignées et/ou défendues par les Français se revendiquant de ce mouvement), ferait sa faiblesse dés qu’il entrerait dans le champ électoral. Or, Il apparait en effet assez évident, note Bruno Gollnisch que tout ce qui peut contribuer à affaiblir, diviser le mouvement d’opposition le plus puissant électoralement, le plus radical, le plus identifiée, le plus vertébré; cohérent dans son opposition à la politique macroniste, à l’euromondialisme au sens large, est une aubaine pour le régime. Rejetés par trois français sur quatre, Emmanuel Macron et ses soutiens remporteraient ainsi une victoire symbolique, celle d’apparaître comme le premier parti de France à la première élection majeure depuis la présidentielle.