Le pouvoir s’est trompé à chaque étape de la bataille à mener. Il a commencé par nier qu’elle pouvait atteindre notre sol. Le 24 janvier, Mme Buzyn, ministre de la Santé, déclarait que « le risque d’importation du virus depuis Wuhan est pratiquement nul, le risque de propagation très faible ». Ce jour-là, le ministre de la Santé s’appuie sur « des analyses de risques modélisés par des équipes de recherche ». L’INSERM vient de construire « un modèle pour estimer le risque d’importation de l’épidémie en Europe ». Ses chercheurs ont réalisé deux scénarios, « celui d’un faible risque de diffusion et celui d’un risque élevé ». Pour la France, le risque d’importation était estimé entre 5 % et 13 %. Il n’était donc pas nul, contrairement à ce qu’a dit le ministre, et il a été moins faible que les manipulateurs de chiffres plutôt que de molécules ne l’avaient prévu.
Pendant près de deux mois, jusqu’au 15 mars, quand la Chine multipliait des mesures d’exception, avec le confinement des villes avec contrôles et prises de température à l’entrée et à la sortie, la concentration des moyens dédiés et les commandes appropriées, la construction ultra-rapide de nouveaux hôpitaux, la France lançait une bande dessinée : Manu au bar des handicapés, Manu au théâtre, Manu va voter et puis Manu va-t-en guerre. Dans la dernière édition, le climat avait changé : il ne s’agissait plus de tranquilliser la population mais de la préparer à un combat pour lequel on avait oublié de stocker les munitions : manque de masques, notamment FFP2 pour le personnel médical, manque de tests, manque de respirateurs et de lits adaptés dans certaines régions particulièrement touchées.
Toute la communication gouvernementale s’est, dès lors, ingéniée à justifier une stratégie imposée à la France par le manque de prévoyance et par la pénurie des moyens. L’absence de contact devait pallier l’absence de solution médicale. La France, grande puissance, pays riche, menait une lutte médiévale destinée à ralentir la propagation, le temps de fabriquer ou de commander les armes nécessaires pour livrer le vrai combat en dépistant systématiquement les personnes atteintes par le virus et capables de le transmettre, sans laisser elles-mêmes apparaître de symptômes, en protégeant le personnel médical avec des masques FFP2 et en soignant le plus vite possible les malades avant que les cas ne deviennent trop graves.
Dans cette gesticulation du pouvoir mêlant mensonges et avalanche de mesures, les unes limitant la liberté de circuler, les autres visant à empêcher la panique économique à grand renfort de dépenses d’un État déjà hyperendetté, les boulettes se sont multipliées.
Dans cette confusion qui est l’apogée du « en même temps », un conflit local typiquement français s’est déclaré : entre le village gaulois de l’IUH de Marseille dirigé par le professeur Didier Raoult et l’État parisien, ses consuls et ses légions. Le virologue, de réputation mondiale, mais climato-sceptique, définit une bonne stratégie : dépistage massif et soins précoces à base d’hydroxychloroquine associée à un antibiotique. Comme la France n’a pas les moyens du dépistage, « en raison de difficultés techniques et logistiques », contrairement à l’Allemagne qui fait quatre fois plus de tests, une levée de boucliers a été organisée contre l’iconoclaste : les autorités « scientifiques » et médiatiques pointent les dangers d’un « vieux » médicament pourtant bien connu et veulent le réserver aux cas graves…
Un essai clinique européen a été lancé : Discovery. Les essais français sont supervisés par l’INSERM et cinq hôpitaux français participeront, mais l’IHU du Pr Raoult n’en fait pas partie. Le Pr Bruno Lina, virologue, membre du Conseil scientifique, met en garde contre la prescription de la chloroquine. Le traitement associant l’antibiotique ne sera pas expérimenté… Pour des raisons qui mêlent la science à d’obscures rivalités, auxquelles prendrait part, selon certains, l’ancien patron de l’INSERM et époux de Mme Buzyn, le professeur Raoult n’est pas en cour… On n’ose imaginer que l’appétit de certains laboratoires se cacherait derrière cette obstruction. Mais nous sommes sauvés, un nouveau « machin » a été créé pour conseiller le pouvoir : le CARE, au nom typiquement progressiste français…