Nous apprenons l’existence d’un dispositif officiel dont l’objectif est d’identifier et valider les informations de presse considérées comme authentiques et ainsi d’opérer un tri, dans la presse écrite ou radio professionnelle – entre les « bonnes » et les « fausses » informations – qui ne sont pas dignes d’y figurer. Un tel raisonnement correspond à une logique de censure. Il incombe à la puissance publique, érigée en garante de la vérité, de valider les bonnes informations et dès lors, en creux, d’invalider les autres qui ne correspondent pas à sa conception du vrai ou du bien, de la vérité, ce qui revient à une forme de bannissement aux yeux du public. Certains journaux, certains articles, disent le vrai, les autres non: dès lors inutile de les lire. Or, en démocratie libérale, il n’appartient pas à l’Etat d’opérer un tri dans l’information. Nous avions déjà un naufrage du régime dans le culte de la personnalité, la neutralisation du parlement, la déresponsabilisation des gouvernements devenus quasi inamovibles quels que soient les désastres, une banalisation de la suspension des libertés individuelles (confinement obligatoire de deux mois), l’acceptation de principe de pratiques qui n’ont rien de libéral, comme le traçage. Aujourd’hui, la réintroduction d’un contrôle officiel sur l’information. Et tout cela dans l’indifférence généralisée. Une interrogation profonde: ont-ils conscience de ce qu’ils sont en train de faire? Ou juste dans l’incapacité intellectuelle d’en avoir conscience? Nous nous disions, attention, la démocratie libérale est d’autant plus précieuse qu’elle est fragile. Mais nous n’y croyons pas vraiment, nous la pensions, au fond, immortelle. La preuve est faite que non.
Maxime TANDONNET