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Macron, la grande braderie de la France (2019)

Fleurons industriels, infrastructures stratégiques, mais aussi sites classés, ressources naturelles ou territoires entiers, avec le VRP Macron, toute la France est à vendre… depuis Bercy sous Hollande, la grande braderie, voire la casse pure et simple, se poursuit de plus belle depuis qu’il est à l’Élysée.

Image qui restera Bruno Le Maire sous les huées de la foule manifestant contre le plan social de General Electric (GE). Visiblement, son piteux « Il est important que General Electric revoie sa copie » n'a pas convaincu. « Ne vous y trompez pas, ce plan, avec son millier de suppressions d'emplois, c'est la dernière étape avant la fermeture du site turbines à gaz ! », rétorque un syndicaliste, qui voit clair dans ce dossier.

Alstom, fleuron industriel et stratégique, a été vendu à la découpe par Macron, ministre de l'Économie de Hollande. Aux Américains de General Electric (GE), les turbines à gaz, utilisées dans le nucléaire, vitales pour notre indépendance militaire et énergétique. Aux Allemands de Siemens, la branche ferroviaire, volet flingué, ironie de l'histoire, par Bruxelles. L'activité nucléaire d'Alstom n'a pas eu cette chance. Promesses de créer 1 000 emplois nets non tenues, « garanties » allègrement bafouées, avec le millier de licenciements annoncés le 27 mai par GE, l'affaire revient en boomerang au visage de Macron Président. Un coup qui fait d'autant plus mal que Hugh Bailey l’actuel patron de GE France, était conseiller pour les affaires industrielles de Macron à Bercy lors de la vente d'Alstom à GE. Quand le conflit d'intérêts est une seconde nature…

Ce n’est pourtant que le dernier avatar d'une série de cessions : si certains souffrent de fièvre acheteuse, chez Macron, c'est la fièvre vendeuse qui domine chantiers navals de Saint-Nazaire (STX) dont le contrôle a été cédé à l'italien Fincantieri en 2017 N°1 mondial de l'industrie parapétrolière Technip absorbé par le Texan FMC en 2016, OPA du finlandais Nokia sur Alcatel, champion tricolore des télécoms, soutenu par Macron en 2015.

Tous les secteurs stratégiques y passent

Deux ans plus tard, Nokia démantèle Alcatel et souhaite revendre sa filiale "câbles sous-marins" une activité liée à la souveraineté nationale. Passons rapidement sur la fusion en 2015 des cimentiers Lafarge et Holcim, au profit de ce dernier, un groupe suisse. À croire que Macron n'aime pas les cols bleus, leur préférant de proprets startuppers.

Bref, autant de « fusions entre égaux », de « futurs Airbus de… » (la mer, des télécoms, etc.), autant de projets ficelés par Macron avec de « solides garanties sur l'emploi », qui finissent invariablement par des prises de contrôle par l'étranger et du chômage supplémentaire en France.

Alors, quand le régime et la presse ronronnent d'aise à l'idée d'une nouvelle « fusion entre égaux » entre Renault et Fiat-Chrysler* dévoilée fin mai, il est temps de sonner le tocsin, et sans doute bientôt le glas. Tous les ingrédients y sont. La fusion à 50/50, d'abord. Bruno Le Maire se félicite de voir se créer « un champion mondial automobile européen », potentiel N° 3 mondial, oubliant que la proposition vient des Italiens. Or, « c'est toujours le proposant qui l'emporte. Quand on propose à un concurrent une fusion, même à 50-50, c’est qu 'on a prévu le coup d'après », souligne Marc German, spécialiste en intelligence compétitive. Bref, Fiat-Chrysler sait où il va, Renault suit à l’aveugle, d'autant que cette fusion « à parité » se fait sur la base d'un cours de bourse de Renault qui s’est effondré de moitié depuis l'arrestation de Carlos Ghosn.

Les garanties, ensuite : « L’État français, qui est actionnaire de Renault, aura un certain nombre d'exigences sur l'assurance qu'il n'y ait pas de fermeture de sites industriels en France, mais aussi sur le fait qu'il y ait un équilibre dans le pacte d'actionnaires qui sera signé le cas échéant » détaillait Sibeth Ndiaye, porte-voix du régime. Des garanties qui n’engagent à rien : l'État, actionnaire à hauteur de 15 % n'étant déjà guère en position de peser sur les décisions du groupe, devrait descendre à 7,5 % si la fusion voit le jour.

Si le privé fait les frais de la fièvre vendeuse du roitelet-soleil, c'est encore pire pour le secteur public. Pas besoin de Troïka à la grecque pour tordre le bras de Macron il devance l'appel de Bruxelles et cède tous les bijoux de la famille France. Ce fut l’objet de la Loi Pacte. La Française des jeux en a donc fait les frais : l'État dispose de 72 % de son capital, Macron souhaite n’en garder que 25 à 30 %, choisissant ainsi de se priver d'une bonne centaine de millions d'euros de dividendes par an. Dans la foulée, les députés ont aussi voté la privatisation d'Engie, l'ex GDF-Suez, dont l'État détenait encore 23,64 % du capital et 33,84 % des droits de vote.

Des projets qui n’ont guère rencontré d'opposition, à la différence de la concession au privé d'Aéroports de Paris (ADP), qui a soulevé l’opinion au point que des députés ont lancé un référendum d'initiative partagée pour la faire capoter. Initiative plus symbolique qu’autre chose, tant les obstacles à sa réalisation sont nombreux.

Aéroports, barrages, jeux… le programme de la Troïka

Entre craintes (en partie infondées) d'une perte de souveraineté, celles (bien plus réelles) d'une hausse des tarifs et l’exemple désastreux de la privatisation de l'aéroport de Toulouse, cédé à un groupe chinois qui l'a revendu deux ans plus tard après avoir empoché des dividendes extravagants, la pilule ne passe pas. Enfin, ces trois privatisations d'actifs, qui rapportent 700 millions d'euros par an, doivent servir à abonder un fonds pour les nouvelles technologies, d'un rendement d'environ 2,5 %, soit... 250 millions d'euros annuels ! Mais les opérateurs privés en situation de monopole, soutiens de Macron, seront contents. Cela « participe d'une république bananière » dénonçait Nicolas Dupont-Aignan.

Pourquoi dès lors s'arrêter en si bon chemin ? Les barrages ont donc été les suivants sur la liste, toujours sur injonction bruxelloise, qui met la France sous pression depuis plus de dix ans sur ce dossier. 150 concessions sont visées sur les 2 300 barrages que compte le pays. Énergie pas chère, facilement mobilisable en cas de pic de consommation, propre, l'hydro-électricité a tout pour plaire et, seconde source de courant derrière le nucléaire, elle est indispensable à l'équilibre énergétique de la France. Base de loisirs, réserves d'eau potable pour l'agriculture ou la consommation… les barrages impactent également des bassins économiques considérables, dont habitants et élus s'inquiètent déjà devront-ils payer pour ce qui est actuellement gratuit ?

Et pourquoi pas les îles ?

Quant au prix de l'électricité, des mains privées pourront aisément couper le robinet pour les faire monter, au mépris de l'intérêt général, mais cette notion pèse visiblement peu pour Macron.

À croire que c’est même l'inverse qui l'anime le 29 mai dernier, à l'occasion de la visite en France du nouveau Président malgache, Macron a annoncé vouloir « régler le litige entre la France et Madagascar » au sujet des îles Éparses. Propriété de la France depuis 1722, ces atolls n’ont jamais appartenu à Madagascar, même s'ils lui étaient administrativement rattachés du temps de la colonisation. Macron veut-il céder à cette revendication qui date des années 70 ou est-ce un simple jeu diplomatique ?

Ces îles, situées dans le Canal du Mozambique de l’océan Indien, passage stratégique de 30 % du pétrole mondial, représentent une zone économique exclusive (ZEE) de 640 000 km2, soit près de 10 % du domaine maritime français dans la zone indo-pacifique. Hydrocarbures, pêche, minerais, cette corne d'abondance suscite la convoitise d'un État corrompu et quasi failli, l'une des cinq économies les plus pauvres de la planète. On voit d'ici le désastre écologique et économique qui s'en suivrait.

Si Macron cédait, ce serait une perte pour la France en termes stratégiques, diplomatiques (il enverrait le signal d'un désengagement de la France sans contrepartie) et économique. Tout cela au nom d'un prétendu « pragmatisme », qui consiste essentiellement à brader la France.

Richard Dalleau monde&vie 13 juin 2019 n°972

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