Extrait de la lettre que le professeur Costentin, président du Centre national de prévention, d’études et de recherches sur les toxicomanies, vient d’adresser aux députés à l’origine d’un rapport sur le « cannabis récréatif ».
Cette appellation de « cannabis récréatif » qui vous est propre, s’agissant de cette sale drogue, illustre votre manipulation de l’opinion qui, dans les fonctions que vous occupez, s’apparente à une forfaiture.
Vos déclarations banalisant cette drogue et l’absence de prévention en milieu éducatif (que vous ne déplorez ni réclamez) expliquent le premier rang de sa consommation par les Français en Europe.
Votre « cannabis récréatif » est une addiction affectant 20 % de ceux qui l’ont expérimenté. Chez l’adolescent, son pouvoir addictif est supérieur à celui des morphiniques (étude récente de Nora Volkow). Malgré sa prohibition, il piège 1.500.000 « usagers réguliers » ; on est incapable de les en guérir. Ils y ajoutent souvent d’autres drogues, dans une escalade dont les mécanismes neurobiologiques sont maintenant précisés.
Sa toxicité physique est supérieure à celle du tabac, responsable de 75.000 décès annuels et de nombreux handicaps, en produisant sept fois plus de goudrons cancérigènes et d’oxyde de carbone : troisième cause de déclenchements d’infarctus du myocarde, responsable d’accidents vasculaires cérébraux, inducteur d’artérites.
Les femmes enceintes, souvent incapables d’arrêter sa consommation, ont des grossesses abrégées, des nourrissons hypotrophes, porteurs d’éventuelles malformations, avec un développement psychomoteur retardé ; une fréquence accrue d’hyperactivité avec déficit de l’attention ou des troubles du spectre de l’autisme. À l’adolescence, ils sont plus vulnérables aux toxicomanies, à la schizophrénie, avec des difficultés cognitives.
Drogue de la « crétinisation », elle fait stagner intellectuellement ses victimes, recrutant même des assistés à vie. Elle nous relègue au vingt-septième rang du classement PISA des performances éducatives internationales. Drogue du syndrome amotivationnel, elle sévit quand il faudrait être performant dans la compétition internationale pour éponger notre dette abyssale, aggravée par la Covid.
Elle tue sur la route ou au travail ; elle rend auto-agressif (suicide) ou hétéro-agressif (bouffées délirantes).
Elle induit des dépressions (avec leur risque de suicide) ; elle induit, décompense ou aggrave la schizophrénie (qui, dans 10 % des cas, conduit à une mort brutale).
Elle est une étape de l’escalade vers d’autres drogues, dont les morphiniques et leurs overdoses mortelles.
Quoi de récréatif dans tout cela ?
Où est l’attention que vous devriez porter à la santé de notre société et à celle de ses membres, en particulier des plus jeunes d’entre eux ?
La promesse du caractère « encadré » que revêtirait cette légalisation, à la lumière des précédents du tabac et de l’alcool, est une sinistre plaisanterie.
N’ayant pas été conviés à vos audits, des points essentiels manquent à votre rapport, tels les effets épigénétiques du THC, dont les méfaits affectent non seulement ceux qui le consomment, mais aussi leurs descendants. Ses consommateurs en âge de procréer, exposant au THC leurs spermatozoïdes ou leurs ovules, transmettent à l’enfant qu’ils viendraient à concevoir des marques épigénétiques, réduisant l’expression de certains de leurs gènes, à l’origine d’anomalies tératogènes, d’une vulnérabilité aux addictions à l’adolescence, et d’autres méfaits.
Votre « consultation citoyenne » sur ce « cannabis récréatif » interrogeait des citoyens désinformés, ayant encore l’idée fallacieuse d’une « drogue douce » ; elle était indécente. La pratiquer au cœur de la Covid-19, source de préoccupations vitales, détournant du cannabis l’attention des citoyens ; elle était inconvenante. Espérant l’appui des 1.500.000 consommateurs réguliers, seuls 250.000 citoyens vous ont répondu, dont 20 % pour dire leur opposition à la légalisation ; ce fut un « bide » retentissant. Pourtant, aussitôt, vous proposez un référendum. Dans le déclin national que cette légalisation aggraverait, n’y a-t-il pas sujets plus importants à soumettre à cet exceptionnel arbitrage démocratique ?
Si l’on ne sait à qui imputer les drames liés à l’alcool et au tabac, vos signatures au bas de ce rapport permettront de vous identifier comme les responsables des drames que recrutera le cannabis. Pour notre nation, pour votre réputation entamée, passez votre rapport dans le broyeur à papier et faites oublier ce très mauvais faux pas en vous investissant dans d’intenses actions de prévention.