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Le député européen Nicolas Bay a vu son immunité parlementaire européenne levée à une immense majorité ce 2 février pour que des poursuites s’engagent contre lui. Il a critiqué la construction d’une mosquée. La procureure générale de la Cour d’appel de Rouen a demandé cette levée de son immunité. Celui-ci s’exprime en défaveur de la construction de la mosquée de Guichainville en Normandie. Il lui est reproché d’inciter à la haine raciale. Il aurait dit : “L’islam politique qui se propage partout en France et ici même en Normandie … Il faut arrêt le communautarisme quand on sait qu’il importe à la fois de la délinquance, de la criminalité et du terrorisme …”
Dans le même temps, en janvier 2023, l’ancienne ministre de la culture, Roselyne Bachelot, invitée de l’émission “C à vous” prédit la destruction des églises dites “sans grand intérêt”, même si elle invite à la mobilisation des citoyens pour conserver ces édifices. Cette situation est emblématique de la spiritualité en France. J’ai pour ma part été plusieurs fois le témoin oculaire des attentes des pratiquants de l’Islam, à l’entrée des centres religieux et salles de prière; faisant patiemment la queue. Ils sont à chaque fois des centaines et des centaines. A l’inverse, l’entrée des églises le dimanche matin ressemble à une petite réunion entre soi de quelques chrétiens perdus dans ce monde.
Mais les réactions témoignent aussi d’un renoncement des élites européennes à être des élites spirituelles. Entendons nos élites politiques et religieuses. Sous la pression du Qatar, dit-on, les députés européens font de nouveau le choix d’une laïcité nihiliste qui ne résistera pas une seconde à l’extension spirituelle de l’Islam en Europe selon la formule prophétique de Tariq Ramadan : “les sociétés démocratiques à majorité musulmanes”. Et les propos de R. Bachelot ont suscité l’enthousiasme des laïcards qui soutiennent cette démarche de liquidation du patrimoine chrétien sur le sol européen. A aucun moment, il ne lui est reproché d’annoncer une déchristianisation, voire de l’encourager. A cet égard, le Saint Michel des Sables d’Olonne ou la Vierge de la Flotte-en-Ré sont des symboles de cette déchristianisation active.
En fait, les chrétiens sont une minorité politique qui commence à ne plus intéresser nos élites. Par contre, l’électorat de tradition musulmane pèse de plus en plus lourd. C’est pourquoi je finis par m’interroger par le sens réel d’un livre : Les lettres persanes de Montesquieu. En effet, celui-ci n’annonçait-il pas la véritable préférence des élites des Lumières pour cette religion de la soumission (Islam signifiant bien la soumission et la sujétion aux ordres de Dieu) là où le christianisme promeut la liberté de conscience, l’amour et le pardon. Montesquieu raille avec les arguments du mahométan les absurdités, à ses yeux, qui sont les mystères et les sacrements des chrétiens. La société mahométane lui paraît plus civile, plus éduquée, plus désirables.
Est-ce bien ce que veulent nos élites ? Peut-être devons-nous leur demander tout simplement ? Etes-vous pour l’instauration de l’Islam comme nouvelle religion, non pas en Europe, mais de l’Europe ? A cet égard, il faut discuter avec nos élites du sens réel de la laïcité. Car là est peut-être le piège. D’ailleurs, que signifie ce mot ? D’où vient-il ? Traditionnellement il dénomme celui qui n’est ni ecclésiastique ni religieux. Il qualifie alors ce qui est propre au monde profane ou à la vie civile. On dira du laïc qu’il vit dans le “siècle”. La religion désigne alors par habitude le « séculier », ou laïque, comme opposé au « régulier » qui appartient à un monde religieux. Mais l’étymologie va beaucoup plus loin. Laïque vient du grec ” laikos ” (“λαϊκός “). Ce terme dérive de ” laos ” (“λαός”) le ‘peuple’ et du suffixe grec “ikos”, au sens de ce qui est “relatif à “. Ce mot grec signifie donc ce qui concerne le peuple en le séparant de ce qui n’est pas clérical. Et dans le latin “laicus”, cela signifie le commun, l’ordinaire.
Faire l’apologie de la laïcité, c’est tout à la fois pour les modernes se séparer du religieux pour s’en émanciper et revendiquer une liberté politique. Mais c’est aussi exprimer le peuple, son commun et son ordinaire. Or, si le peuple est très majoritairement de confession musulmane, la subversion de la laïcité par l’Islam est alors inévitable pour deux raisons tout à fait simple. Une première démographique où la société démocratique à majorité musulmane fera démocratiquement le choix d’instaurer sa préférence. D’où la seconde qui tient au fait que le laïc et le clérical se confondent dans la pratique même de l’Islam. La laïcité aura vécu.
Cela jette un regard cru sur ce qu’il convient d’envisager. Il y a un effort de spiritualisation de nos élites européennes mais aussi de compréhension du sens profond de l’héritage chrétien où les deux pouvoirs sont bien dissociés depuis toujours. Or, ce qui se joue sous nos yeux, n’est rien d’autre que la disparition de la liberté religieuse et de la liberté politique. Est-ce vraiment ce à quoi nos élites aspirent, par leur soumission héritiée de Montesquieu ? Ouvrons le débat avec nos élus sereinement, car les perspectives sont là.
Pierre-Antoine Pontoizeau