Il semblerait, à en croire la doxa dominante, que face aux déferlantes conjointes de l’immigration et de la délinquance, la fatalité soit de mise. Fatalité tout relative, la Tunisie ayant pris de sévères mesures quant à ce premier péril. Et c’est une nation plus modeste encore, le Salvador (6,3 millions d'habitants), qui pourrait bien nous en remontrer face au second péril. L’information était passée sous les radars médiatiques avant que Damien Rieu, ancien cadre du Rassemblement national, depuis passé chez Reconquête, ne vienne lever le lièvre, grâce à ce tweet : « Avec une politique répressive, le Salvador, dirigé par le président Nayib Bukele, est passé de dix homicides par jour à zéro. »
Certes, le Salvador n’est pas un pays comme les autres et nos racailles plus ou moins armées ne sauraient en aucun cas faire le poids face aux « maras » locaux. De quoi s’agit-il ? De gangs organisés de manière quasi militaire, leurs tatouages tenant lieu de galons, leurs meurtres de décorations. L’un de leurs caïds les plus influent, Viejo Lin, interviewé par nos confrères du Figaro, s’en vantait même, avant d’accepter un accord entre sa bande, le Barrio 18, et son rival historique, la MS13, sous arbitrage du gouvernement salvadorien.
Depuis, ce dernier semble s’être contenté de gérer le problème sans vraiment chercher à le résoudre. Il est vrai qu’il n’a pas toujours eu le choix, malgré de viriles tentatives de reprise en main. La donne paraît avoir aujourd’hui changé depuis l’élection du président Nayib Bukele, héritant d’une situation plus qu’explosive, lorsqu'il est devenu président le 1er juillet 2019.
Car ces « maras », Barrio 18 et MS13, ne viennent pas de nulle part. En effet, des années 1970 à 1990, la politique anticommuniste de Washington a produit en Amérique latine des dommages dont on constate désormais les ravageuses conséquences. Pris entre deux feux, la jeunesse locale émigre tout d’abord au nord du Rio Grande, s’établissant principalement à Los Angeles. Ils y fondent les gangs en question. Là-bas, ils s’organisent, face à d’autres bandes, noires et mexicaines, y développent leur culture du tatouage et de l’obéissance absolue au chef. La plupart seront renvoyés en leurs pénates d’origine : les USA ont beau être « terre d’immigration », il y a tout de même des limites. Mais ils ne tardent pas à y introduire leurs codes.
Les « maras » ne sont pourtant pas une mafia comme les autres, ces gangs étant connus pour leur désorganisation chronique et leurs luttes intestines. Face au crime organisé et mondialisé, ils ne pèsent rien. Un peu comme leurs homologues français des quartiers nord de Marseille ou de Seine-Saint-Denis. Qu’importe, ils parviennent néanmoins à pourrir la vie quotidienne de leurs riverains.
C’est donc à ce vaste chantier que le nouveau président salvadorien Nayib Bukele s’est attelé. Et les résultats ne se font pas attendre : « Le taux d’homicide est passé de 103 pour cent mille habitants, en 2015, à seulement 7,8, en 2022, puis à 2,5, en 2023. Ravie, la population soutiendrait la politique sécuritaire de Nayib Bukele. »
Bien sûr, Amnesty International n’est pas du même avis : « Le président Nayib Bukele plonge le pays dans une crise des droits de l'homme, trois ans après son arrivée au pouvoir », cette ONG stigmatisant au passage le mépris des « droits des enfant et des adolescent.e.s ». Il est un fait avéré que, devant ces bandes armées, le tout nouveau président Nayib Bukele a pu avoir la main lourde. Mais, au fait, qui est cet homme ?
Né le 24 juillet 1981 à San Salvador, la capital locale, ce Palestinien dont le père est à l’origine chrétien, avant d’épouser la religion musulmane, devient imam. La mère de Nayib est chrétienne, ce qui n'empêche pas son fils d’entretenir une certaine ambiguïté sur ses opinions religieuses propres. Photographié en pleine prière, dans l’une des mosquées de Mexico, il affirme « n’appartenir à aucune religion, mais croire en Jésus Christ ». Pourquoi pas, sachant qu’en Amérique latine, Libanais, Syriens, Palestiniens forment, de longue date, des communautés dont le poids démographique n’a rien de négligeable : les uns fuyaient les persécutions ottomanes et les autres la lourde tutelle de l’État hébreu.
En attendant, Naybib Bukele nous démontre que face à la violence de la rue, il y a toujours une voie d’État. C’est déjà ça. Cela dit, peut-on comparer le Salvador à la France ?
Nicolas Gauthier
https://www.bvoltaire.fr/eradiquer-la-delinquance-cest-possible-la-preuve-par-le-salvador/