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Averroès : un lycée musulman « en harmonie avec les valeurs de la République » ?

 

Il y a, d’un côté, la vitrine qui se veut alléchante et lisse et, de l’autre, les coulisses où se jouent toutes les magouilles. Côté vitrine, l’image du lycée Averroès, ouvert il y a vingt ans à Lille, est impeccable. Sous contrat avec l’État depuis 2008, ce lycée musulman assure être « engagé, dévoué et animé par les valeurs de la République ». L’établissement promet, par ailleurs, de transmettre une belle « harmonie entre les valeurs républicaines et les valeurs de l’islam » afin de former des « citoyens libres, autonomes et responsables ». C’est ainsi qu’en 2020, comme une très grande partie des lycéens de France, les élèves du lycée Averroès ont marqué une minute de silence en mémoire de Samuel Paty. Un hommage que l’établissement n’a pas manqué de relayer sur ses réseaux sociaux. À cet attachement républicain d’apparence sans défaut, le lycée lillois affiche également de brillants résultats, avec près de 98 % de réussite.

Financé par le Qatar

Mais derrière cette façade bien lisse et respectable se cacheraient d’importants dysfonctionnement ainsi que de graves dérives dans l’enseignement. C’est, en tout cas, ce que tend à démontrer un récent rapport de la chambre régionale des comptes des Hauts-de-France, révélé par Le Figaro. Premier point noir au tableau : les finances. Les experts de la chambre régionale s’inquiètent, en effet, d’une « dégradation brutale et continue » des comptes de l’association gérante depuis 2015. Des difficultés financières bien antérieures, donc, à la volonté de Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France, de mettre un terme à la subvention annuelle versée à l’établissement en 2020 (subvention qui sera malgré tout versée après une décision du Conseil d’État). À ces ennuis financiers s’ajoutent des soupçons de financement étranger. Comme le précise Le Canard enchaîné, « lors des investigations, les magistrats ont découvert que cette école brassait beaucoup d’oseille suspecte venue de l’étranger ou de la poche des ouailles ». Déjà, en 2019, deux journalistes détaillaient, dans leur ouvrage Qatar Papers, les importants financements – près de trois millions d’euros, selon eux – que recevait le lycée en provenance du Qatar. À cela s’ajoutent les dons des particuliers collectés en France, mais également dans des mosquées allemandes et néerlandaises. Ainsi, le lycée Averroès, qui perçoit par ailleurs des subventions publiques, s’accommode d’un financement étranger. Résultat : « L’analyse des bilans de l’association témoigne d’une politique d’investissement difficilement soutenable et d’une gestion des dettes dépourvue de stratégie de long terme », alertent les experts.

Ces difficultés de comptabilité vont de pair avec des problèmes de gouvernance. En effet, la chambre régionale des comptes s’inquiète de voir un même petit groupe diriger l’association Averroès depuis la création de l’établissement. De plus, il apparaît qu’un membre du conseil d’administration est également salarié alors même que le conseil d’administration décide des recrutements et licenciements. Un conseil d’administration, par ailleurs, n’a pas été renouvelé depuis 2017, contrairement à ce que prévoient les statuts de l’association.

Dérives salafistes

Mais plus grave encore que ces problèmes de gestion, le lycée Averroès dispenserait aux élèves inscrits au cours facultatif d’éthique musulmane des préceptes « en décalage » avec les valeurs républicaines revendiquées. La présence, dans une liste de lectures, des Quarante hadiths de l’imam An-Nawawi, écrit par Mustafa al-Bugha et Muhyi ad-Din Mistu – deux exégètes connus pour leur vision rigoriste de l’islam, selon Le Figaro – interpelle les magistrats. Cet ouvrage recommande notamment aux femmes de ne pas se faire ausculter par un homme et également d’éviter la mixité sociale au travail. Ce décalage avec la façade républicaine avait déjà été dénoncé en 2015 par un ancien professeur de philosophie. Dans les colonnes de Libération, il dénonçait le double jeu de l’établissement : « D’un côté montrer patte blanche dans les médias pour bénéficier d’une bonne image dans l’opinion publique et ainsi continuer à profiter des gros avantages de son contrat avec l’État, et d’un autre côté, diffuser de manière sournoise et pernicieuse une conception de l’islam qui n’est autre que l’islamisme. » Il pointait du doigt, notamment, les difficultés d’enseignement après les attentats de Charlie Hebdo et le problème de l’antisémitisme. Condamné pour diffamation, il avait finalement été relaxé en cassation.

Clémence de Longraye

Tribune reprise de Boulevard Voltaire

https://fr.novopress.info/231085/averroes-un-lycee-musulman-en-harmonie-avec-les-valeurs-de-la-republique/

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