En Prologue, les auteurs esquissent quelques rappels salutaires :
– « La centralisation (…) n’est pas sortie tout droit du cerveau fertile en idées du Premier consul. »
– Avant 1789, la France est une monarchie absolue et centralisée.
– Quant au millefeuille, il était pire sous la monarchie, un « inextricable maquis territorial ». Soit 70 provinces, 40 gouvernements militaires, une carte judiciaire émiettée et surtout 34 généralités constituant le maillage essentiel avec ses intendants aux pouvoirs étendus mais ne dépendant que du monarque. Les intendants s’occupent de tout, des impôts d’abord mais aussi de l’économie, du maintien de l’ordre…
La Révolution a mis à bas tout ce « bel édifice administratif » mais la rupture est en trompe-l’œil. Car le centralisme idéologique est dominant et c’est celui des jacobins, de la république montagnarde. Un court temps (moins de deux ans), les révolutionnaires « modérés », les girondins, ont rêvé d’une France décentralisée, fédérale, inspirée par la révolution américaine. Mais les girondins perdent le pouvoir en juin 1792 et, une fois proscrits, leurs idées disparaissent.
L’héritier, fidèle, intransigeant, du centralisme jacobin est Napoléon Bonaparte. Il a compris toute l’importance du département et il en fait le maillon territorial essentiel, unique, de son empire fort de 130 départements, des Bouches-de-l’Elbe (Hambourg) aux Bouches-du-Tibre (Rome).
Le préfet devient « la clef de voûte de la centralisation ». Tout lui est subordonné, il ne rend de comptes qu’à l’empereur qui l’a choisi. Il a tout de l’intendant. Il donne toute satisfaction au point que les régimes successifs le pérennisent, jusqu’à nous. De quoi réfléchir sur les habitudes, les traditions et si l’on veut les pesanteurs de la pratique administrative. La France est décidément un pays difficile à réformer.
Jean Heurtin
Photo : Wikipedia
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